Les habitants de Combre-sous-les-Côtes (55) ont eu un weekend agité. Ce 15 juin 2024, les 118 âmes du village de la Meuse ont vu débarquer plus de 300 militants néonazis dans un hangar agricole du coin. Les adeptes du bras tendu s’y sont donné rendez-vous pour le « Day of Glory-Pride France », un tournoi de MMA organisé par la branche française du réseau néonazi hammerskin – des suprémacistes blancs skinheads, à la base américains –, comme l’a repéré le Réseau antifasciste du Grand-Est. Crânes rasés, t-shirts à la gloire d’Adolf Hitler ou ornés de fusils d’assaut, organisateurs couverts de tatouages suprémacistes… Curieusement, malgré les appels d’habitants et d’élus locaux à la gendarmerie durant la journée et la soirée, le grand raout violent qui a pu aller à son terme. Les pandores ont fait une courte visite au tournoi néonazi durant l’après-midi, avant de rapidement quitter les lieux.
Plus de 300 militants néonazis se sont donnés rendez-vous pour le « Day of Glory-Pride France », un tournoi de MMA d'extrême droite. / Crédits : Exif – Recherche & Analyse
Les néonazis Tomasz Szkatulski et Jérémy Flament sont ceux qui ont discuté avec les bleus lors de leur passage. S'ils ont peut-être pu constater les nombreux tatouages suprémacistes sur les deux hommes, les pandores n'ont pas annulé le rassemblement. / Crédits : Exif – Recherche & Analyse
Des organisateurs néonazis
Le point de rassemblement aurait pourtant pu donner des indices aux forces de l’ordre. Le hangar agricole en question est la Taverne de Thor, lieu d’implantation de la mouvance hammerskin française. Ce local est tenu par Jérémy Flament, habitué des combats de MMA et surtout des concerts néonazis. Ce dernier est couvert de tatouages suprémacistes et a été par exemple l’organisateur du « White X-Mas 2014 », un concert néonazi organisé dans un gymnase municipal au prétexte d’une manifestation sportive… À ses côtés se tenait ce weekend une figure bien connue du milieu hammerskin, que StreetPress a déjà évoquée : Tomasz « Gamin » Szkatulski. Néonazi d’origine polonaise, son CV est long comme son bras (tendu) : il est dirigeant de Pride France, l’organisation derrière le tournoi de ce weekend. C’est aussi un ancien des JNR et un hooligan de la Losc Army à Lille (59). Il a été condamné à plusieurs reprises pour des agressions de SDF dans le Nord, dont une fois à coups de chaînes de vélo. Il a aussi été impliqué dans de nombreuses attaques de bars LGBT et est fondateur d’une marque de vêtements « par et pour les blancs ». Sur son corps se trouvent de multiples tatouages à la gloire des SS, un « White pride » (« Fierté blanche » en français) lui barre le cou. Autant de références que les gendarmes ont pu constater : Tomasz Szkatulski et Jérémy Flament sont ceux qui ont discuté avec les bleus lors de leur passage.
Cette édition du « Day of Glory » est loin d’être la première : on peut par exemple relever une édition en 2015 en Ardèche (07), puis en 2017 en Haute-Savoie (74). L’organisation Pride France s’exporte aussi à l’international : outre de nombreux liens avec des groupes néonazis russes, Tomasz Szkatulski a aussi été un des co-organisateurs d’une « European Fight Night » le 6 mai 2023 en banlieue de Budapest.
Blood and Honour au rendez-vous
Le tournoi était prévu de longue date, sa promotion sur les canaux Telegram de la mouvance a commencé dès janvier dernier. Il fallait payer 25 euros pour le ticket d’entrée, et déposer 50 euros de caution si l’on voulait ramener un combattant. Dans le public, il y avait plusieurs membres de Blood and Honour. Ce réseau, à l’origine dédié à la promotion de musique néonazie, est très lié à l’organisation Pride France et Tomasz Szkatulski. Il a pourtant été dissous en 2019 par le gouvernement, notamment pour leur diffusion d’« une idéologie néo-nazie, raciste et antisémite, exaltant la « race blanche », appelant à la haine, à la discrimination et à la violence », et l’organisation « de concerts de musique néonazie dont la musique véhicule des propos racistes et xénophobes et de combats de MMA »…
Et parmi les combattants, StreetPress a repéré François Delagrande, un ancien militaire du 13e bataillon de chasseurs alpins. Ce militant néonazi originaire de Chambéry, qui se fait surnommer « Frankreich », a été condamné en juin 2020 à une peine de 18 mois de prison dont 12 avec sursis pour avoir tabassé un militant antifasciste. L’ancien militaire, par ailleurs chanteur dans un groupe de Rac (Rock against communism, du métal néonazi), a remporté son combat en boxe anglaise devant plusieurs de ses camarades de l’Edelweiss Chambéry – section locale du groupuscule dissous Bastion social –, venus spécialement pour l’occasion.
Plusieurs membres de l’Edelweiss Chambéry – section locale du groupuscule néofasciste dissous Bastion social –, sont venus au tournoi. / Crédits : DR
Parmi les combattants, StreetPress a repéré François Delagrande, un ancien militaire du 13e bataillon de chasseurs alpins, condamné en juin 2020 à 18 mois de prison dont 12 avec sursis pour avoir tabassé un militant antifasciste. / Crédits : DR
Il y aurait aussi dû avoir des néonazis allemands du groupe Kampf der Nibelungen. Las, eux ont été empêchés par les policiers germaniques de passer la frontière, selon une vidéo postée sur le canal Telegram de l’organisation allemande. Ils ont affirmé que les forces de l’ordre étaient bien au courant, en amont, de la tenue de l’événement.
À l’heure de la publication, la préfecture de la Meuse n’avait pas donné suite à nos sollicitations.
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