Dans le port de Toulon (83), il y a des marins qui chantent. Et d’autres, comme Hugo, qui font des saluts nazis et menacent un militant de gauche en fauteuil roulant, comme StreetPress vous le racontait le 17 juin dernier. Depuis la parution de cet article, nous avons en effet appris que l’homme au bras tendu était un gars de la Marine… nationale. Ainsi qu’un militant identitaire. Dans la rade de Toulon, la principale base navale française, le jeune homme sert à bord d’un patrouilleur de haute mer de la flotte tricolore : le commandant Bouan.
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Le matelot ne s’en cache absolument pas. Sa photo de profil Instagram le présente sur le pont d’un navire, en tenue, et avec son bachi – nom d’argot maritime désignant le bonnet de certains marins surmonté d’un pompon rouge – portant l’inscription Guépard, du nom d’un des navires-écoles de la Marine nationale, basé à Brest (29). Dans une vidéo intitulée : « Pour la patrie », on peut tantôt voir l’approche d’un hélicoptère de combat, tantôt le pont du navire ou son quotidien avec d’autres marins. Une vidéo dans laquelle on peut apercevoir les épaulettes de son uniforme et donc son grade : quartier-maître de deuxième classe. Une autre vidéo, publiée en février dernier, montre ce qui semble être des exercices en mer impliquant plusieurs navires, avec les tirs de la tourelle avant de son patrouilleur.
Derrière son pompon, le marin cache des idéologies très radicales et qui ne sont pas partagées par ses supérieurs. « La Marine tient à rappeler que tout acte ou propos haineux et délictueux est inacceptable, et n’a aucune place dans les armées », souligne à StreetPress le service d’information et de relations publiques de la Marine (Sirpa). La com’ de « la Royale » indique également qu’elle traite ce dossier « en interne » :
« La commission d’actes délictueux dans l’espace public entraîne des sanctions disciplinaires. »
La justice toulonnaise a été saisie pour les saluts nazis et Hugo a été placé en garde à vue. « La procédure nous a été transmise afin que nous puissions l’analyser et prendre une décision », commente le procureur de la République Samuel Finielz.
Membre du groupuscule identitaire Le Maquis
Lorsqu’il n’est pas en mer, Hugo est un militant d’un groupuscule d’extrême droite : Le Maquis. Ce mouvement identitaire est apparu fin 2022 et s’inscrit dans la droite lignée de Génération identitaire, organisation dissoute en mars 2021 – notamment pour « provocations à la haine et à la discrimination ». Le Maquis s’affirme aujourd’hui comme l’un des avatars de cette mouvance disséminée dans le pays. Le groupuscule revendique une implantation provençale, surtout à Avignon (84) et à Toulon, mais aussi à Aix-en-Provence (13) dans une moindre mesure. Hugo, lui, milite logiquement du côté de la rade.
Au sein du Maquis, le quartier-maître côtoie de nombreux militants très violents. En mars dernier, Hugo immortalise une virée shopping devant une boutique de vêtements du centre-ville toulonnais. À ses côtés se trouve Paul Goudard, un technicien en radioprotection passé par les rangs du Rassemblement national, qui fait partie des 23 militants de Génération identitaire poursuivis pour leur intrusion dans les locaux de SOS Méditerranée en octobre 2018. Une affaire pour laquelle il avait écopé d’une peine de prison avec sursis. Sur le même cliché, se trouve également Hugo H., un autre identitaire connu de la justice. L’homme est actuellement poursuivi pour l’agression du maire de Péage-de-Roussillon (38), André Mondange en décembre 2023. Alors en déplacement privé à Avignon, l’édile aurait été attaqué par Hugo H. et un autre militant. Les deux hommes l’ont frappé après avoir proféré des insultes à caractère raciste envers sa fille métisse. Sous contrôle judiciaire, leur procès est prévu en 2025 (1).
Hugo republie également des contenus identitaires sur TikTok. C’est le cas en novembre dernier avec l’appel, en français, d’un des leaders de la Młodzież Wszechpolska, un mouvement ultranationaliste et catholique intégriste polonais, dans lequel il souhaite : « Bonne chance dans la défense de notre culture européenne, de nos traditions et de notre cohésion ethnique. » Avant d’ajouter :
« Combattez pour une Europe chrétienne, sans immigrants musulmans. »
(1) En attente de leur procès, ils sont présumés innocents.
Illustration de Une de Nayely Rémusat.
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