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    17/03/2016

    Les bons mois il se fait 350 euros

    Mohammed, sans pap’ et vendeur à la sauvette de cartes téléphoniques

    Par Lucas Chedeville , Denis Meyer

    Dans les couloirs de la Gare du Nord ou à Barbès, ils sont plusieurs dizaines à vendre des cartes téléphoniques Lycamobile et Lebara. Mohammed nous raconte les coulisses de ce petit business.

    Adossé à un poteau dans les couloirs de la Gare du Nord, Mohammed cherche à capter le regard des voyageurs. Le grand black d’une trentaine d’années traîne ici pour vendre des recharges de téléphone de marque Lycamobile. Un client se pointe. Même pas deux mots sont échangés, un billet de 5 contre une carte.

    Lycamobile, c’est l’opérateur téléphonique qui permet d’appeler à l’étranger pour pas cher. D’origine britannique, la compagnie se partage le marché avec Lebara.

    Le Spot

    Ce jour-là, il s’est posté dans le couloir à la sortie de la ligne 5. Mais son point de vente varie en fonction des mouvements des flics. Ces derniers tournent un peu partout dans les couloirs de la gare. Ils font la chasse aux vendeurs à la sauvette. Mohammed jette en permanence des regards de côté pour vérifier qu’aucun képi ne se balade dans les environs :

    « Ça m’arrive très souvent de me faire contrôler ! Au moins une fois par semaine. Ça m’est arrivé encore hier. Mais ils ne t’embarquent jamais au poste. Même pas besoin de montrer tes papiers. Ils prennent ta marchandise, la mettent à la poubelle et s’en vont. C’est pour ça que j’ai jamais beaucoup de cartes sur moi, au cas où. »

    Le business model

    Chaque matin, Mohammed se rend dans le quartier de La Chapelle acheter en gros les cartes. Comme lui, les vendeurs du métro viennent faire leur stock dans ces magasins tenus principalement par des Sri-lankais ou des Indiens. En fonction des vendeurs, le carnet de 10 se négocie entre 42 et 45 euros, pour un prix à la revente de 50 balles.

    https://backend.streetpress.com/sites/default/files/denismeyer_2016-03-3938.jpg

    Un billet de 5 contre une carte /

    Mohammed achète une trentaine de cartes 5 jours sur 7, avant de rejoindre son spot de vente aux alentours de midi. Il termine sa journée à épuisement des stocks, souvent aux alentours de 20h. Malgré ces longues heures à tenter de refourguer ces cartes bon marché, ses revenus sont très maigres. Les bons mois, il arrive à dégager près de 350 euros :

    « Ça suffit pas pour vivre mais ça dépanne ! »

    La vie de Mohammed

    Arrivé seul du Burkina Faso il y a 6 ans, un visa touristique de deux mois en poche, il n’est jamais reparti. Depuis, il enchaîne les petits boulots clandestins pour survivre : des petits travaux sur les chantiers, vendeur à la sauvette au Louvre ou sous la Tour Eiffel. Il a commencé ce taff de vendeur à la sauvette il y a un peu moins de 6 mois, sur les conseils d’un ami.

    « Même si ça ne rapporte pas beaucoup, il vaut mieux faire ça que rester les bras croisés ou voler. Au moins c’est honnête. »

    Un tiers de ses revenus partent dans son loyer. Avec 5 autres sans pap’, ils partagent un tout petit appartement composé seulement de trois lits superposés et d’une kitchenette à Aubervilliers, qu’ils louent à un « ami bienveillant ».

    Le peu qu’il lui reste, il le dépense dans la bouffe, s’autorise peu de plaisirs et essaye de mettre de côté pour envoyer un peu de maille à sa famille restée au pays.

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