Les cathos intégristes de Civitas font de la résistance. Malgré la dissolution de leur association en Conseil des ministres le 4 octobre dernier, ils s’activent en coulisses pour maintenir en vie leur mouvement. L’organisation pétainiste, dirigée par Alain Escada, a été accusée par le gouvernement d’appeler « à entrer en guerre contre la République » et de « provocation à la haine ou à la violence ». La goutte d’eau a été l’intervention antisémite de l’essayiste Pierre Hillard durant l’université d’été de Civitas, où il a proposé de déchoir les juifs de leur nationalité française. Créé en 1999, devenu parti politique en 2006, Civitas a multiplié ces dernières années les saillies contre « le lobby LGBT ». Ils ont aussi, à plusieurs reprises, fait pression pour faire annuler des événements qu’ils jugeaient blasphématoires, encore récemment avec un concert de Bilal Hassani dans une église messine désacralisée.
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La dissolution a-t-elle eu raison du mouvement ? Que nenni ! Selon les informations de StreetPress, des militants bretons de l’organisation sont à la manœuvre pour organiser – en toute illégalité donc – un pèlerinage et une messe dans le Finistère ce samedi 14 octobre 2023.
Civitas célèbre le « Christ-Roi »
Sur le site de Civitas, sur leurs réseaux sociaux ou ailleurs sur le net, il n’y a aucune mention du pèlerinage de ce week-end. Pourtant, des mails obtenus par StreetPress montrent bien l’organisation d’une marche dans le coin du très joli cap Sizun, à l’Ouest de Quimper (29). Le pèlerinage est organisé « en l’honneur du Christ-Roi ». Au programme de cette pieuse journée : « environ 11 kilomètres » de marche, avec des passages sur le sentier côtier qui longe la mer d’Iroise, un pique-nique avec « déjeuner tiré du sac » sur la plage et, bien entendu, la traditionnelle messe pour finir en beauté.
Le tout sous la houlette de plusieurs sections bretonnes de Civitas. Dans un mail du 16 septembre dernier, adressé aux « amis et militants » de Civitas, Gilles Martin, représentant des intégristes pour le pays de Cornouaille où doivent se dérouler les festivités, ne cache pas son implication dans la tenue du pèlerinage. Si Gilles Martin, dont le numéro de portable est indiqué sur l’affiche de l’événement, précise qu’il « devra se faire sans aucun signe distinctif [d’]appartenance [au] mouvement politique », c’est bien lui qui se charge de l’organisation, cherchant notamment des volontaires, « un chauffeur pour la voiture-balai » ou « deux personnes pour la sécurité ».
Des mails montrent l’organisation d’un pèlerinage à l’Ouest de Quimper, « en l’honneur du Christ-Roi ». / Crédits : Capture d'écran
Un pèlerinage interdit… aux bermudas et jupes courtes
Outre la célébration du Christ, ce pèlerinage est une occasion « de tisser des liens avec les militants et sympathisants des autres sections bretonnes », selon Nicolas Hrovatin, chef de la section Saint-Patern du pays Vannetais de Civitas, dans un autre mail envoyé la veille de la dissolution de Civitas, dernière preuve, s’il en fallait, que Civitas organise l’événement. Joint par téléphone, le boss Civitas-Cornouaille Gilles Martin confirme la tenue du pèlerinage mais tente de nier le rôle de Civitas dans l’organisation :
« Civitas n’existe plus. Et comme précisé dans mon mail, il n’y aura aucun signe d’appartenance à notre mouvement politique. C’est ouvert à tout le monde, c’est un pèlerinage apolitique. »
Ouvert à tout le monde, peut-être, mais pas à n’importe quoi ! Qui dit Civitas dit également respect d’une certaine tradition et des « règles de modestie chrétienne ». Aucun bermuda ne sera toléré : pour les « messieurs et jeunes gens », c’est pantalon obligatoire. Quant aux « dames, jeunes filles et petites filles », il faut mettre des jupes, « amples, longues et non fendues », qui descendent « au-dessous des genoux ». Consigne leur est également donnée de se couvrir la tête durant la messe.
Aucun bermuda ne sera toléré : pour les « messieurs ». Quant aux « dames, jeunes filles et petites filles », il faut mettre des jupes, « amples, longues et non fendues ». / Crédits : Capture d'écran
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La dissolution et Francis Lalanne
Il y a donc des interdictions qui sont plus respectées que d’autres chez Civitas. L’organisation a bien annoncé dans le dernier numéro de l’hebdomadaire pétainiste et antisémite Rivarol avoir contesté sa dissolution en déposant plusieurs recours devant la justice – on y apprend également qu’ils ont reçu le soutien de Francis Lalanne. Mais ces derniers ne sont pas suspensifs tant qu’ils ne sont pas acceptés, comme le rappelle Michaël Ghnassia, conseil de SOS Racisme et avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation :
« La dissolution, lorsqu’elle est notifiée, est immédiatement applicable. En cas de maintien de l’association dissoute, notamment par l’organisation d’évènements, des sanctions pénales peuvent être prises. »
De quoi donner matière à penser aux militants de Civitas qui passeront lors du pèlerinage par la baie des Trépassés… un peu comme leur mouvement.
Contactée, la préfecture du Finistère n’avait pas encore de réponse au moment de la publication de notre article.
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