« Salut tout le monde, c’est Ghost Elektra ! Je suis toute excitée à l’idée de vous retrouver pour présenter cette nouvelle saison de Drag Contest. » Les cheveux bleu électrique plaqués en arrière, une ceinture jaune fluo en choker autour du cou et deux diamants aux coins des yeux, la drag queen et productrice d’événements queers Ghost Elektra lançait la seconde édition du Drag Contest, le 11 janvier dernier. Cette compétition Instagram couronne les meilleurs looks de drag queens, drag kings ou makeup artistes. Chaque semaine, la présentatrice donne un thème – jeux vidéo, néon, méchantes de dessins animés, etc. – sur lequel la douzaine de participantes et participants vont s’affronter. « Comme d’habitude vous pourrez trouver les looks sur l’Instagram de Drag Contest pour voter. »
Inspirée par la série de téléréalité américaine RuPaul’s Drag Race, la compétition a duré neuf semaines. Suivi par presque 3.000 personnes, le compte du Drag Contest a surtout permis de réunir une partie de la communauté queer durant cette année de pandémie où aucun show n’a été possible. « Faire des makeups sur Instagram était le seul moyen pour les drags de montrer ce qu’ils et elles pouvaient faire », commente Adam, l’organisateur du concours, qui poursuit :
« Je pense que ça a bien marché parce que les gens avaient besoin de rigoler, de rêver, de voir des belles choses. »
Plus qu’un simple concours de maquillage
Les règles sont simples : chaque semaine, les douze candidats et candidates présentent un look dicté par un thème imposé. Les photos sont ensuite postées sur le compte Instagram @drag_contest. Les internautes peuvent voter pour leur drag queen préférée. Ils représentent 30% de la note finale. Celui du jury, composé de Kam Hugh de la maison L’Assemblé(e) et du makeup artist queer HitsuBlu, compte pour 70%. À chaque étape, la personne avec la moyenne la plus basse est éliminée.
À gauche, Oona lors du thème « Jeux video ». À droite, Lily Moon lors du thème « Monochrome ». / Crédits : DR
« Je venais de lancer ma chaîne YouTube quand Drag Contest m’a contacté », raconte la présentatrice, Ghost Elektra. « Ça fait un an qu’il est difficile de travailler. » La productrice d’événements queers et alternatifs s’est retrouvée sans travail avec la fermeture des bars et des boîtes de nuit. Une énorme claque, alors qu’elle revenait d’un festival aux Etats-Unis pour lequel elle avait été embauchée. Toutes les performances pour lesquelles elle était bookée – concerts, drag shows, soirées et brunch queer – ont été annulées. Elle poursuit :
« Au début, on a fait des shows digitaux. On ne pensait pas que ça allait durer. Mais le drag c’est un art performatif, scénique, qui est censé être au contact du public. Et le numérique, ça ne rapporte pas d’argent. »
Au manque d’interactivité des performances en ligne s’ajoute le manque de soutien de l’Etat. « Le gouvernement ne nous prend pas au sérieux », estime Ghost, qui voudrait être considérée tout autant que les intermittents du spectacle.
Alors, à défaut de rémunération, Drag Contest donne de la visibilité au savoir-faire technique derrière chaque look, ainsi qu’une plateforme aux « baby queens » qui se lancent dans le milieu. Parmi elle, il y a Esther Fern, qui joue « l’enfant gâté d’une bourgeoise parisienne qui a décidé de prendre son indépendance pour devenir une fille de rue ». Inspirée des chanteuses Lady Gaga, Bebe Rexha et du dernier album de Miley Cyrus, la rookie a rejoint la compétition après ses premières performances sur scène à Paris pendant l’accalmie de septembre :
« En novembre, j’avais 500 followers. Grâce au concours, j’en ai maintenant 870. »
Quant à Ghost, elle encourage le public à partager les vidéos IGTV et YouTube des artistes drag et, pour ceux qui le peuvent, à envoyer un pourboire via PayPal ou Lydia.
À gauche, Mademoiselle Kiss lors du thème « Apocalypse ». À droite, la Canadienne et gagnante de l'édition Bleu, lors du thème « Split Face ». / Crédits : DR
La grande famille queer
« Sur Instagram, on a un groupe pour chaque saison de la compétition. On se soutient même dans nos vies personnelles », raconte Adam, l’organisateur, pour qui Drag Contest est « comme une grande famille » :
« On arrive à créer du lien en pleine pandémie. »
« Je me suis fait des potes que je pourrai voir à l’avenir », abonde Esther.
Pendant quatre week-end d'affilée, Esther Fern s’est attelée à la préparation des looks en collaboration avec une photographe, à raison d’environ 8 heures par maquillage. / Crédits : Emilie Rappeneau / Retouches par Esther Fern
La finale de la saison 2 de Drag Contest s’est déroulée en live sur YouTube. Les neuf looks des quatre finalistes – Esther Fern, Bleu, Etta Courgette et Mademoiselle Kiss – ont été passés au crible par les jurés Kam Hugh et HitsuBlu. Avec une note moyenne de 9.1, la Canadienne Bleu est la grande gagnante. « Je pensais être désavantagée parce que j’étais la seule candidate non-française, et la seule femme », raconte l’intéressée. Elle s’est parfois sentie seule dans le milieu masculin du drag où certains considèrent que les femmes, de par leurs courbes naturelles, n’ont pas besoin de faire autant d’efforts pour accentuer leur genre par le maquillage. Mais pas au Drag Contest !
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Adam, de son côté, réfléchit déjà à la saison 3, prévue pour la fin d’année. Avec Ghost Elektra, il planifie également l’édition 2021 du Marché Drag & Queer, une journée durant laquelle des exposants vendent des biens et des services en rapport avec le drag.
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