Mairie de Gennevilliers (92) – Une militante distribue fièrement des stickers à l’inscription « Stop Green Dock » aux manifestants qui commencent à se tasser sur les marches, en ce début d’après-midi. L’un d’eux balade une pancarte sur laquelle on peut lire : « Moins d’entrepôts plus de moineaux ». Ce samedi 25 mai, à l’appel des Soulèvements de la Terre et de nombreuses associations et organisations, près de 2.000 manifestants se sont rassemblés contre Green Dock, un projet d’entrepôt logistique d’une longueur équivalente à deux stades de France, et haut comme un immeuble de 12 étages. Il doit être construit sur les berges de Seine, à proximité du port de Gennevilliers, juste en face d’une zone Natura 2000. Pour plusieurs associations locales, c’est l’un des rares espaces boisé de promenade et de loisir de la Seine-Saint-Denis. Ils jugent que le paysage sera « défiguré » si le projet aboutit. S’il est mis en place, l’entrepôt fonctionnera 24h sur 24 avec plus de 1.200 rotations de véhicules et poids lourds par jour. La mobilisation dénonce un projet « écocidaire », porteur d’inégalités environnementales et sociales dans une banlieue déjà sur-polluée et saturée.
« Je suis sûr qu’on va gagner »
« La banlieue Nord en a marre qu’on se serve d’elle pour mettre en place des entrepôts et des autoroutes », déclare fermement au micro Antoine Gaudin, président de l’association Protection Berges de Seine. Il poursuit :
« Ce n’est pas du tout green et c’est à peine un dock. »
Les prises de parole se suivent devant une foule conquise. Le député LFI Éric Coquerel s’indigne :
« Il n’y a pas un seul argument en faveur de ce projet, je ne m’explique même pas qu’il puisse exister ! »
Optimiste, le député termine : « Je suis sûr qu’on va gagner, ce projet n’a rien à faire là », et appelle le maire de Gennevilliers, favorable à Green Dock, à ne pas autoriser le permis de construire. Marine Tondelier, secrétaire nationale d’EELV parle, elle, d’un « projet périmé ». « On manifeste contre des gens qui ne comprennent rien à l’écologie », décrit-elle en haussant la voix.
Près de 2000 manifestants mobilisés contre le projet GreenDock. /
« Mort assurée » de la zone Natura 2000
Trois cortèges se mettent en place après les discours. Chacun a son nom et son drapeau : grand cormoran, ronce des bois et lézards des murailles. Pour la première fois de leur histoire, les Soulèvements de la Terre organisent une grande manifestation nationale en ville. « Les colis c’est pour Paris, les ennuis c’est pour la Seine-Saint-Denis ! Cet air est le nôtre ! Qui sème l’entrepôt récolte le chaos », clame Ambre, membre des Soulèvements de la Terre devant les cortèges qui se forment. Les manifestants arpentent les rues des Hauts-de-Seine (92) en direction de la Seine-Saint-Denis (93) sous les yeux étonnés des riverains perchés sur leurs balcons.
Les manifestants dénoncent une réduction des espaces verts aux portes d'un département déjà très bétonné. /
« T’es pas pour ce gros truc moche qui tue des oiseaux toi ? » « Ah non non », répond timidement Marius, huit ans, à sa mère. Salim aussi est venu en famille avec sa femme et ses deux enfants. Il se balade sur les bords de Seine depuis 20 ans et a encore espoir que ce projet soit abandonné. Pour lui, s’il est mis en place : « C’est la mort assurée de la zone natura 2000 ». Il assure même avoir constaté une diminution du nombre de grands cormorans depuis que la démolition des anciens entrepôts a commencé. Green Dock est pour le moment encore en discussion mais s’il est autorisé les travaux pourraient débuter bientôt, pour un début d’exploitation prévu en 2027. « Le peu de point positif qu’il y avait avec la nature et les espaces verts qu’on est venus chercher en quittant Paris, ça va peut-être disparaître », déplore la compagne de Salim qui ne comprend pas un tel recul.
La manifestation est bon enfant. « On est venus en soutien ! », expliquent en souriant Lucien, Raphaël et Lisa qui brandissent tous les trois un cormoran en carton, symbole du cortège à l’avant de la manifestation. Charlotte, elle, montre fièrement les huit bannières qu’elle a réalisé avec ses amis qui représentent chacune une espèce d’oiseaux de la zone Natura 2000. « J’avais besoin de m’engager contre Green Dock, c’est proche de chez moi et c’est complètement absurde un tel projet en 2024 ! », s’agace-t-elle.
Les grands cormorans /
Intervention musclée des forces de police
Vers 16 heures, pendant que l’avant du cortège chante en chœur en tapant des mains « nous sommes tous les enfants de la Seine », un groupe de manifestants à l’arrière quitte le cortège aux abords du parc des Chanteraines. « N’hésitez pas à rentrer dans le parc pour une balade contre l’empire logistique », appelle un militant à l’aide de son mégaphone. Les forces de polices s’engouffrent à leur tour dans le parc, pour les faire sortir. Damien, membre des Soulèvements de la terre Île-de-France assure qu’« il n’y avait aucune volonté d’affrontement de notre part. Nos militants ont réalisé une action symbolique de blocage de la zone logistique de Gennevilliers, la police les a chargés très violemment en tirant au LBD et une personne a été transportée à l’hôpital », affirme-t-il. Du côté de la police on affirme qu’« un groupe de manifestants qui s’est détaché du parcours pour commettre des dégradations » . Ils ont « immédiatement » été pris en charge par les policiers qui ont procédé à 58 interpellations, toujours selon la police.
Cet article est en accès libre, pour toutes et tous.
Mais sans les dons de ses lecteurs, StreetPress devra s’arrêter.
Je fais un don à partir de 1€Si vous voulez que StreetPress soit encore là l’an prochain, nous avons besoin de votre soutien.
Nous avons, en presque 15 ans, démontré notre utilité. StreetPress se bat pour construire un monde un peu plus juste. Nos articles ont de l’impact. Vous êtes des centaines de milliers à suivre chaque mois notre travail et à partager nos valeurs.
Aujourd’hui nous avons vraiment besoin de vous. Si vous n’êtes pas 6.000 à nous faire un don mensuel ou annuel, nous ne pourrons pas continuer.
Chaque don à partir de 1€ donne droit à une réduction fiscale de 66%. Vous pouvez stopper votre don à tout moment.
Je donne
NE MANQUEZ RIEN DE STREETPRESS,
ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER