Valls est donné en tête à la primaire de la gauche, mais je pense que les sondages vont encore avoir tort dimanche. Voici pourquoi.
Je me suis penché sur les outils et les données numériques, d’abord en cherchant à mesurer l’influence de l’extrême droite et de ses sites.
Les instituts de sondage ne prennent pas en compte les données numériques
Les médias ont pris l’habitude d’analyser l’évolution de l’opinion à partir de sondages et n’ont pas pris la mesure des données issues du web. Du Brexit à Fillon, leurs pronostics sont démentis, mais les médias continuent à privilégier ces sondages. Pourtant une manne d’infos est sous nos yeux, que médias, politiciens et même, sauf exceptions, chercheurs refusent de considérer pour mesurer l’évolution de l’opinion : celles du web.
Ainsi, après le premier tour de la primaire de la droite, Le Parisien estimait ainsi que les données des réseaux sociaux étaient de « mauvais thermomètres de l’opinion ». Pareil pour La Croix.
Une condescendance vis à vis des citoyens ordinaires
La scène qui se joue dans notre société moderne est la suivante : D’un côté, les citoyens ordinaires se saisissent du web et se passent de plus en plus des institutions politiques et des médias officiels pour s’exprimer. De l’autre, les institutionnels, désarçonnés par cette activité qu’ils n’arrivent pas à comprendre, répondent par une certaine condescendance. Cette suspicion à l’égard des réseaux sociaux notamment est déconcertante.
Comme au moment de l’invention de l’imprimerie, les réseaux sociaux sont accusés de ne colporter que du faux, des faits « non vérifiés », des rumeurs. Comme si les contre-vérités, la propagande fallacieuse et la diffusion de rumeurs étaient nées avec les réseaux sociaux.
Grâce aux données numériques, on aurait pu prédire la victoire de Fillon
Ce dédain pour les données numériques est dommageable. On se prive ainsi d’une possibilité de comprendre plus finement les phénomènes de société. Pour le dire autrement : on se complaît dans le brouillard. Instruit par la primaire de la droite, les sondeurs se méfient, mais commencent seulement à mesurer la percée de Benoît Hamon perceptible sur le Web depuis des semaines
« Pour avoir un sondage fiable sur cette primaire, il faudrait interroger des milliers de personnes »
Antoine Bevort, sociologue @AntoineProvo
Il est vrai que pour avoir un sondage fiable sur cette primaire, il faudrait interroger des milliers de personnes pour avoir un échantillon de 800-1000, (c’est-à-dire le minimum d’un sondage un peu fiable), de personnes sûres d’aller voter.
Le suivi des données numériques est plus efficace (et par ailleurs bien moins coûteux). Grâce à elles, on a pu entrevoir la victoire de François Fillon lors de la primaire de la droite, et la victoire d’A. Van der Bellen en Autriche.
Mais il ne faut pas mesurer n’importe quoi sur les réseaux
Mais attention, toutes les données n’ont pas du sens. Les données d’audience sur les réseaux sociaux (les nombres de fans sur Facebook, followers sur Twitter ou abonnés sur YouTube) ne sont pas un bon indicateur. Il faut privilégier ce qu’on appelle les données d’engagement (les likes, partages, retweets, commentaires), qui mesurent vraiment l’impact de la communication politique pendant les dernier 7 jours.
Ces données, bien plus significatives, donnaient François Fillon en tête. Elles existent dans tous les pays et permettaient ainsi d’anticiper la victoire d’Alexander Van der Bellen en Autriche (voire une démonstration plus détaillée sur le site de The Conversation).
Mais, par ignorance ou par suspicion, on néglige ces données.
Benoît Hamon, devant Valls et Montebourg les réseaux sociaux
Quant à cette primaire socialiste, les dernières données d’engagement donnent une issue différente de celle prévue par les sondeurs. Les sondages commencent à anticiper une surprise Hamon, surprise inscrite dans les données numériques depuis plusieurs semaines. Ils continuent cependant à donner Manuel Valls en tête du premier tour.
Si nos données ont un sens, Benoît Hamon sortira en tête du premier tour de la primaire socialiste. Manuel Valls et Arnaud Montebourg se disputeront la deuxième place.
Concernant la participation, il est difficile d’anticiper celle-ci à partir des données des sites et des réseaux sociaux. On peut toutefois remarquer que l’intérêt pour le site de la primaire est bien inférieure à celle pour le site de la primaire de la droite.
Il ne s’agit que d’une ébauche des analyses possibles, on pourrait approfondir encore bien plus l’étude des opinions politiques en entrant dans une analyse plus fine des messages de communication de l’un ou l’autre des candidats par exemple, ou de l’opinion de leurs sympathisants. Ou pour traiter tout autre sujet de société. Cela constitue sinon une alternative, au moins un complément intéressant aux sondages dits d’opinion. Cela commence d’ailleurs à être fait. C’est un immense chantier plein de promesses.
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