La parade des Jeunesses Nationalistes, prévue de longue date, devrait avoir lieu au crépuscule, samedi 8 juin. Le mot d’ordre ? Rendre hommage au Duc Eudes d’Aquitaine qui, en 721, « triompha de l’armée arabe » à Toulouse. Énième prétexte donc, pour afficher leur haine des immigrés. Les mouvements antifascistes toulousains ne l’entendent pas de cette oreille! Très actifs dans la ville rose, ils organisent un grand rassemblement le même jour.
Le décès de Clément Méric, étudiant à Sciences-Po et militant antifa, violemment tabassé à Paris par un groupe de skinheads qui seraient selon le Front de Gauche, membres des Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires (JNR, un autre groupuscule d’extrême droite), fait encore monter la tension d’un cran.
Qui? Ce rassemblement des Jeunesses Nationalistes devait être la première démonstration de force de l’Oeuvre Française en culotte courte à Toulouse. Peu actives jusqu’à présent, les Jeunesses Nationalistes n’existent localement que depuis septembre 2012. Pour l’occasion, les « JN » toulousains avaient annoncé la présence des deux principaux leaders de l’organisation, l’ex-FN Alexandre Gabriac et Yvan Benedetti, président de l’Oeuvre française. La marche devait partir de François Verdier et rejoindre le parvis de la cathédrale Saint-Étienne. Coup d’envoi à 21h30.
Pourquoi? « Nous faisons honneur au Duc Eudes d’Aquitaine, qui, en 721, a contribué à la protection de la nation face aux invasions arabo-musulmanes et sarrasines » résume, par téléphone, le responsable des Jeunesses Nationalistes à Toulouse. Et pour lui, les Sarrasins ne seraient pas bien loin ! « Aujourd’hui, la situation est comparable. On voit l’État se déliter avec fond d’invasion et de substitution de population ».
Jusqu’à présent cette date était l’occasion d’un rassemblement d’un autre groupuscule d’extrême droite : le Bloc Identitaire. Jointe par StreetPress, Caroline C, l’attachée de presse toulousaine de ce mouvement dénonce une « récupération » par les Jeunesses Nationalistes, même si eux ont renoncé à défiler cette année, officiellement car trop « occupés ailleurs ». Le Bloc Identitaire fait profil bas depuis la mise en examen de son leader, Matthieu Clique, et de plusieurs de ses membre pour avoir tabassé un étudiant chilien qui s’est retrouvé dans le coma. « Nous n’avons aucun lien avec les JN, on ne fonctionne pas ensemble », précise Caroline C. Les Jeunesses Nationalistes ont profité de cette situation pour recruter plusieurs militants et cadres du Bloc Identitaire.
Combien? Quid du nombre de manifestants ? Les Jeunesses Nationalistes n’ont tenu à livrer « aucun chiffre ». Ca évite les déceptions! Les précédents rassemblements d’extrême droite dans la ville rose n’ont que très rarement mobilisé plus de 100 à 200 personnes.
Autorisation La préfecture de police de Toulouse confirme avoir « pris acte » de la déclaration de la marche, qu’elle juge « sensible ». Un responsable des question de sécurité à la préf’ n’exclut pas de l’interdire : « s’il y a une menace à l’ordre public, oui nous pourrons l’interdire par arrêté préfectoral (…) On attend le feu vert du préfet pour communiquer, ce ne sera pas avant vendredi ». La récente agression de Clément Méric à Paris rend l’interdiction quasi inévitable. * Jeudi après-midi, le maire socialiste de Toulouse, Pierre Cohen a demandé l’annulation de la manifestation.
Antifa D’autant plus que les mouvements antifascistes toulousains organisent le même jour une contre-manifestation. L’Union Antifasciste Toulousaine (UAT) et la Confédération Nationale du Travail (CNT) appelaient depuis plusieurs semaine à se rassembler à 14 heures, place Arnaud Bernard. « Cette manifestation vise à dénoncer les groupuscules d’extrême-droite qui sévissent partout en France », précise Simon, militant à Coup pour coup 31, une organisation antifasciste locale. « C’est récurrent. Les nationalistes accaparent régulièrement les journées des 8 et 9 juin pour manifester. »
Un rassemblement organisé pour mettre la pression sur la préfecture : « Notre manifestation a été déclarée la première. La leur sera probablement refusée en préfecture, du fait de la présence en nombre des antifas à Toulouse le même jour. La préfecture est consciente des risques d’altercations », explique un militant de l’UAT.
S’il y a une menace à l’ordre public, oui nous pourrons l’interdire par arrêté préfectoral
Clash Si, malgré tout, la manifestation nationaliste est maintenue, une contre-manifestation sur place « reste envisageable », glisse Simon de Coup pour Coup. « Ça va se décider au dernier moment, pour ne pas leur laisser de marge de manœuvre. Rien ne filtrera », complète un militant de l’UAT. « Le but est qu’ils ne soient pas visibles. Le plus souvent, on bloque [physiquement] le départ de la manifestation. » La méthode : être « plus nombreux au départ et sur le trajet. Les JN sont très souvent en sous-nombre. »
Partis politiques Dans un premier temps, le parti communiste n’avait pas appelé officiellement à manifester. « On a abandonné la stratégie de l’affrontement direct avec les forces nationalistes. On l’a fait pendant des dizaines d’années, et on s’est rendus compte que ce n’était pas efficace », explique Christophe Cerpedes, responsable départemental des Jeunesses Communistes (JC). D’autant qu’une rixe « risquerait de renforcer leur visibilité médiatique ». Après, le choix est laissé à chacun : « Les militants sont libres d’aller contre-manifester », lançait alors Constantin Lopez, coordinateur de l’Union des Étudiants Communistes à Toulouse.
Mais l’agression de Clément Méric, survenue ce mercredi, change la donne. Les responsables locaux appellent désormais à rejoindre la mobilisation antifa : « il est à présent indispensable d’y être », explique le coordinateur de l’UEC. Le syndicat SUD-Solidaires a lui aussi annoncé qu’il rejoindrait la manifestation et il en appelle à « toutes les forces démocratiques ».
Edit 06.06 18h45 : Ajout de la demande d’annulation par le maire de Toulouse, Pierre Cohen.
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