Boire un pastis avec Matthew Spit, notre reporter roux maison, a fini de nous convaincre : « Faites de quoi sur les roux dans le porno. Ça, c’est quelque chose que je n’ai jamais vu ! » On le regarde : Matthew mesure 1m95, chausse du 12 (ndlr, 46 en France) et arrive à tenir un ballon de basket Spalding taille 7 d’une seule main…
Ferait-il de la prospection en vue d’une reconversion professionnelle ? «Non, mais trouver un roux qui ait réussi dans le porno, ça rappellera qu’eux aussi ont un sexe et qu’en plus, ils s’en servent au moins autant que les autres !» Le voilà, le premier super-héros roux du 21e siècle !
Allô ? « Je suis vraiment désolée. J’ai demandé à tout le monde – et partout – mais personne ne trouve d’acteur porno roux… » Un coup de fil à Adeline de chez Dorcel Productions (la multinationale du porno Made in France), et nos ambitions pour rétablir la justice se râpent comme une carotte dans un robot culinaire. Pourtant, Marc Dorcel est à peu près le Hugh Hefner hexagonal, producteur de milliards de scènes de double pénétration et de kilomètres de saucisse à l’écran… mais pas un rouquemoute dans le répertoire de son iPhone 5.
« À moins que vous ne considériez que Rocco Siffredi soit roux ? » tente Adeline. Mouais… Non, ce qu’on veut, c’est du rouquin, du vrai. Avec si possible un gros grain de beauté qui ressort sur sa peau laiteuse, de jolies petites taches de rousseur sur les pommettes et surtout… qui baise à tout va.
Je suis vraiment désolée. J’ai demandé à tout le monde – et partout – mais personne ne trouve d’acteur porno roux…
Bal masqué Problème : notre quête de l’étalon roux sent la débandade à plein nez. Jointe par StreetPress, Katsuni, la plus grosse star française du X de ces dernières années, « ne voit pas comment [nous] aider ». Tandis que Nina Roberts, 33 ans et plus de 150 films au compteur entre 2003 et 2010, est catégorique :
« J’ai beau réfléchir, je n’ai jamais tourné avec un acteur roux de ma vie… »
Nina Roberts, la pornstar cool des années 2000, écrit des livres avec la romancière Virginie Despentes, aime le punk rock, les tatouages et sort avec des métalleux chevelus. Elle a beau être ouverte d’esprit, elle n’a jamais offert sa croupe à un hardeur roux. Conformisme, quand tu nous tiens…
Mais comme dirait l’autre, c’est quand on s’y attend le moins que ça nous tombe dessus. Et on a le numéro du réalisateur porno Fred Coppula, alors ce serait bête de ne pas s’en servir. D’autant plus que Fred, comme il le dit lui-même, c’est « un peu moins de 100 acteurs » qui sont passés devant sa caméra :
– Allô Fred ? Dis-moi, un acteur roux qui a déjà déchargé sur un de tes tournages, ça te dit quelque chose ?
– Mais oui, j’ai déjà fait tourner un roux !
Le temps suspend son vol. Les mots du réalisateur résonnent dans notre tête. Le sang nous monte au visage et nos mains deviennent tellement moites qu’on en lâcherait le combiné. Quoi ?! On aurait trouvé ?! La perle rare ! Le Mark Zuckerberg du cream pie ! Le Michael C. Hall de l’éjaculation faciale ! Oui, on le tient ! Une belle leçon pour tous ceux qui ont le désespoir facile.
Coppula s’empresse d’ajouter :
– C’était au tout début de ma carrière et le mec était masqué.
On pleure. Des acteurs qui préfèrent cacher leur crinière rutilante plutôt que d’assumer leurs exploits sexuels à la caméra : voilà où ça mène, des siècles de bûcher et de blagues grasses.
Le Urbania nouveau est arrivé ! Dans ce numéro spécial roux, disponible dans toutes les librairies quebecquoises, une enquête sur « la révolution rousse », un reportage sur « les roux d’Afrique noire » ou encore le portait d’un trappeur de renard.
Pour découvrir Urbania, rendez-vous ici .
Parité Le porno a-t-il un problème avec les roux ? Comme tous les écoliers sadiques de la planète tout entière ? « Le porno, c’est un business dans lequel il n’y a aucune ségrégation » rétorque Fred Coppula, 44 ans. Le réalisateur aux deux Hot d’Or (ndlr, prix d’excellence de l’industrie pornographique) sur la cheminée explique l’absence de rouquins dans l’industrie en jouant la carte démographe :
« C’est très simple. Le nombre de roux, c’est peut-être 1 %, max 2 % de la population française. Dans le porno, c’est pareil. Moi, dans ma carrière, j’ai dû faire tourner une centaine de mecs. Donc voilà : j’ai fait tourner un roux. »
Dur, dur de ne pas être d’accord avec les équations du réalisateur de Niqueurs-Nés…
Comment expliquer alors le joli succès des actrices rousses ? Fovéa, vedette du très sportif Croupe du Monde 98, sorti à l’occasion du Mondial, a sublimé pendant 15 ans la rousseur dans le porno français. Et que dire des années YouPorn marquées par le crin de la spectaculaire Faye Reagan, régulièrement au sommet des Most viewed ? On peut aussi citer les plus franchouillardes Leeloo, Aurora Viper ou encore la très confidentielle Lara Flash.
Stéphane Rose est écrivain et travaille pour la maison d’édition érotique parisienne La Musardine. Il est surtout l’auteur d’une autobiographie porno-fétichiste intitulée Pourvu qu’elle soit rousse. Quand on lui dresse ce constat, il part au quart de tour :
« Les roux, quand ils sont enfants, on leur jette des cailloux, ils en prennent plein la gueule. Généralement, les filles arrivent à transformer cette spécificité en arme et deviennent des bombes atomiques à l’âge adulte. Mais pas les garçons, qui restent des pestiférés. »
Le porno, c’est un business dans lequel il n’y a aucune ségrégation
Même un roux, on n’en trouve pas ! Ce n’est pourtant pas subversif, un roux !
Standard and poor’s Contactons plutôt Judy Minx, actrice porno depuis ses 18 ans et qui a acquis une solide réputation de gauchiste du X pour ses prises de position pro-palestiniennes ou son militantisme dans des associations queer et LGBT. Avec elle, ça ne rate pas : on en vient rapidement à philosopher sur les questions de « norme » et de «standards». Sur la question rousse, elle n’hésite pas à parler de «racisme» en rappelant que dans le porno français, il n’y a pas non plus «de Chinois, d’Arabes et de Noirs.»
« Le fait qu’on ne trouve pas de roux dans le porno, ça montre la standardisation de malade qu’il y a dans ce milieu. Même un roux, on n’en trouve pas ! Ce n’est pourtant pas subversif, un roux ! C’est DINGUE! »
Enfin une qui se mouille. Bravo. Judy, dotée d’un physique de brindille atypique dans le milieu, s’en prend aussi aux producteurs qui « prennent les spectateurs pour des gens étriqués et limités dans leurs fantasmes ». Elle insiste sur leur « manque de courage ». Ça nous fait penser au réalisateur Fred Coppula, quand on lui a demandé pourquoi il n’a pas fait de parodie porno de Poil de carotte. Il nous a répondu :
« Si cette idée m’avait traversé l’esprit, je ne l’aurais pas fait. J’aurais eu peur qu’une association pro-roux vienne me faire chier. »
Jardin d’Eden Les enfants roux doivent-ils donc se résigner dès le plus jeune âge à abandonner leur rêve de devenir porn star ? Judy Minx, actrice notamment de Lolitas 100% sodomisées, fait sa rabat-joie en expliquant que de toute façon, pour les hommes, le milieu est très fermé :
« Ce sont les cinq mêmes qui tournent depuis 15 ans. »
(Illustration Guillaume Brière)
Fred Coppula insiste, quant à lui, sur la difficulté de trouver des acteurs compétents :
« On est en pénurie, tu n’as même pas idée ! C’est super dur, alors qu’il soit roux, brun ou blond, on s’en fout, faut qu’il arrive à bander sur un plateau avec 15 mecs autour ! »
Pourtant, il semble bien exister un petit coin de paradis pour les apprentis hardeurs roux : le porno gay. Un petit tour sur Video-2-gay.com ou 1MaxDeGay et c’est l’avalanche. «Des p’tits rouquins fans de sexe anal, de fellation et de levrette brutale! Regarde-les se faire péter leur petite rondelle!» s’extasie le préambule d’une vidéo sobrement intitulée Coquin roux enculé par noir homo.
Un autre site de vidéos qui fait sa promo : « Tu fantasmes sur les mecs roux ? Ces petits rouquins te font bander comme une bête sauvage ? Alors un seul conseil : viens vite de dévider (sic) les couilles sur ce site x dédié aux homosexuels aux cheveux roux. » Un phénomène qu’a bien remarqué le roussologue Stéphane Rose, qui se demande si ce n’est pas « le côté fragile » de certains roux qui peut plaire à certains homosexuels.
Notre rouquin préféré, Matthew Spit, sait ce qu’il lui reste à faire s’il veut vraiment faire carrière dans le porno.
bqhidden. Roux, brun ou blond, on s’en fout, faut qu’il arrive à bander sur un plateau avec 15 mecs autour !
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