Où ? Dans un foyer de jeunes travailleurs, à Paris, près de la place de la Nation. Dans une salle avec Coca, Orangina, chips et noix de cajou à volonté.
Qui ? Une vingtaine de jeunes. Certains sont encore étudiants, aussi bien en ressources humaines qu’en informatique. D’autres, comme Karen à la Banque de France ou Julien dans la « conception électronique », bossent déjà. Moyenne d’âge : 23 ans.
Leur choix avant le débat ? Avantage Hollande, clairement. Abdel, un plombier de 25 ans, fait les calculs : « Au premier tour, on est tous allé voter ensemble, je pense qu’on était 80 % à voter Hollande. » Robin, 23 ans, étudiant en informatique, sourit : « en même temps, je comprends pas comment on peut être jeune et voter à droite. » Avec quelques irréductibles : Carmen qui penche pour l’UMP, Julien au centre et Amélie, plus à gauche. Après 1h30 de débat, elle se pointe dans la salle avec un drapeau Front de gauche glané à la manif du 1er mai la veille. Bonne joueuse, elle crie : « allez Hollande ! »
À quelle heure s’est barré le premier téléspectateur ? 21h32, en plein combat de chiffres sur l’économie. À 21h, nous étions 25 à suivre le top départ. Après 2h50 de débat plus ou moins intéressant, nous n’étions plus que 7…dont les 3 journalistes infatigables de StreetPress. Écrémage 100 % garanti, encore plus efficace que The Voice.
Sérieux, qui comprend ce qu’ils disent ? Qui peut vérifier tous les chiffres ? Seulement 300 économistes en France ?
Le moment le plus relou ? Incontestablement, la partie éco entre 22h et 22h30. Bâillements prononcés, chips engloutis, portables qui sonnent un peu trop forts. Robin se marre :
« C’est un débat d’énarques là… même si Sarko a pas fait l’ENA ! Sérieux, qui comprend ce qu’ils disent ? Qui peut vérifier tous les chiffres ? Seulement 300 économistes en France ? Ça me conforte dans l’idée qu’ils vivent tous les deux dans un autre monde. Depuis 45 minutes, ils ne se battent plus pour la France, ils se battent pour leur gueule. »
Le passage le plus drôle ? Le rap d’Hollande, basé sur une rythmique « moi, président de la République » assénée 16 fois. « Allez, stop, mais stop ! » éclate la salle. Manon, une étudiante de 23 ans, pense aux conséquences en riant : « il va prendre trop cher au Petit journal. »
Le moment le plus houleux ? Le quart d’heure immigration/vote des étrangers. Abdel, exaspéré, soupire à haute voix : « Mais pourquoi Sarko parle des musulmans là ? Pourquoi ? Tous les immigrés sont pas musulmans ! » Soupirs ostensibles dans la salle. Robin, lui, est ravi : « 99 % des gens qui regardent attendent qu’ils se rétament, attendent les moments où ils se cassent mutuellement, le reste est imbitable. Les gens regardent cette émission comme s’ils mataient Secret Story. »
Il va prendre trop cher au Petit journal
La remarque pertinente sur Pujadas et Ferrari ? De l’avis de tous, ils sont transparents. Quoique, Robin est intéressé par des détails capillaires : « c’est fou, Pujadas, il a toujours sa coupe de Playmobil. »
Le meilleur débatteur (en toute objectivité) ? Farès, interne en médecine , trouve Hollande « plus à l’aise » : « c’est normal, il est en tête et en position de force. » Manon trouve elle-aussi Hollande « pas mal » : « j’avais peur que Sarko l’écrase, parce qu’il a du charisme, qu’il parle par raccourcis et que les gens aiment bien ça. Je suis un peu rassurée. » Elle poursuit : « de toute façon, je me rends compte que les gens votent souvent au pif et que peu d’entre nous sont politisés. » Robin trouve « Sarko bon dans l’exercice. Mais là, après 5 ans, il n’est plus crédible. »
La méthode la plus originale pour départager Hollande et Sarkozy ? Julien, qui remporte la palme haut la main : il a sur les genoux un calepin sur lequel il délivre des + et des – aux deux débatteurs, en fonction de leurs interventions. « Ce qui m’agace, ce sont les coups bas pour mieux déstabiliser l’adversaire. Moi, je suis là pour écouter le fond, la forme m’intéresse moins. » En 2007, il a voté Sarkozy et au premier tour 2012, il a opté pour Bayrou. Minuit s’approche, Julien peut faire les comptes et le couperet tombe : Hollande l’emporte. Mais, avant de se décider pour de bon, le jeune homme de 27 ans a prévu une journée décryptage des éditos/qu’est-ce qu’en pense Christophe Barbier/qu’en disent les observateurs. « Pour être sûr que mon opinion est la bonne. »
Alors alors, qui c’est qui gagne ? Hollande déclaré vainqueur par KO. Même Carmen, 27 ans et économiste, hésite un peu. Au premier tour, elle a voté Sarkozy, qu’elle trouve plus « crédible » sur les questions éco. Mais en entendant « pour la première fois » le discours d’Hollande sur « l’immigration et l’énergie » elle est un peu plus partagée. Sans savoir pour autant si elle va carrément changer son vote. Julien le Bayrouiste hésite également. Abdel, beau joueur, parle d’un « match nul » : « Sarkozy est plus offensif, il parle pas de sa politique. Hollande est plus précis. »
Ce qui m’agace, ce sont les coups bas pour mieux déstabiliser l’adversaire. Moi, je suis là pour écouter le fond
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