Notre source est formelle : « Il est blacklisté. Il est inscrit au Finiada depuis le 9 avril 2022 ». Le youtubeur d’extrême droite Code-Reinho est bien fiché au Fichier national des interdits d’acquisition et de détention d’armes, nous confirme une source au sein du renseignement. Notre source précise également qu’il est « répertorié au TAJ », une manière de signifier qu’il est ou a été impliqué dans une affaire judiciarisée.
Une situation dont le faf pro-armes aux 328.000 abonnés sur YouTube, ne fait pas la publicité. Il faut dire qu’elle fait tache pour cet ancien militaire très véhément contre les « chances pour la France », comme la fachosphère appelle avec ironie – et racisme – les immigrés ou leurs descendants. Fini pour lui les tutos sur les gros flingues : Joël G. de son vrai nom a dû rendre son arsenal. Contraint et forcé.
Fake news
« Bon bah, fin de la chaîne », a annoncé Reinho en personne il y a près d’un mois via une vidéo depuis retirée de la plateforme, « j’arrête également le tir et tout ce qui concerne les armes à feu ». Puis de faire cette confidence surprenante, pour un passionné de gros calibres :
« Je ne possède actuellement plus du tout d’armes à feu, je me suis débarrassé de toutes mes armes et de toutes mes munitions. Je ne compte plus foutre les pieds dans un stand FFtir (la fédération française dédiée au tir sportif, ndlr). Je précise bien “stand FFtir” car je vais louer mes talents de formateur de fusil à pompe à une petite entreprise qui fait de la formation. »
Puis de détailler ses « emmerdes », notamment financières. Mais aussi le harcèlement qu’il subirait de la part des « anti-armes », « de plus en plus violents ». Marre aussi des « pro-armes », qui-ne-font-rien-qu’à-l’embêter. Les méchants. La légende est en marche : Reinho en a ras la casquette Maga des wokes et autres gauchistes qui ont fait de sa vie un enfer. Alors il tourne la page. Comment ? Via des formations au maniement du fusil à pompe, donc, facturées 150 euros et dont le lancement est prévu en fin d’année. Mais, plus surprenant, en lançant aussi une nouvelle chaîne, sur YouTube toujours.
« Boris le Rouge investigation » : une page dédiée au trolling des progressistes et à l’étalage de ses idées d’extrême droite. Il n’y a pas d’autres mots. Il encapsulait notamment des extraits du suprémaciste blanc québécois Alexandre Cormier-Denis avec qui il est en « très bons termes » et qui lui a apporté son « soutien total », dixit Reinho. Ça n’a pas duré longtemps : ladite nouvelle chaîne a été bannie en quelques semaines seulement. « En raison du non-respect des conditions d’utilisation de YouTube », précise un message de la plateforme. Dans l’intervalle, elle a tout de même réussi à attirer plusieurs dizaines de milliers d’abonnés.
Pour s'être filmé avec l’influenceur d’extrême droite pro-Zemmour Papacito en train de tirer sur « un gauchiste », Reinho et son comparse ont été entendus par la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP). / Crédits : DR
Facho revendiqué
Car Joël G. est bien un influenceur de premier plan du YouTube-game faf. Vidéaste depuis le mitan des années 2010, il est de ceux qui ont fait entrer les armes dans les foyers des Français avec des vidéos plutôt léchées, un ton cynique percutant et un montage efficace. Le tout pour parler de gros flingues et de « défense personnelle ». Très neutre les premières années, il en vient vite à se définir lui-même comme un « facho ».
Il y a trois ans, il commet également un court-métrage intitulé « Croisade », thème si cher à l’extrême droite. Le pitch : dans un futur proche, une jeune femme blanche a été violée et assassinée par « une chance pour la France ». La justice, évidemment laxiste et influencée par les merdias gauchistes, le condamne à une peine très légère. Le youtubeur qui incarne le héros décide donc de la venger. S’ensuit cette guerre civile que fantasme la fachosphère, menée par une population qui veut « récupérer (sa) terre ». Les croisades, c’étaient, argumente Code-Reinho dans le making-of, « ce temps béni où les Francs » ont « défoncé des musulmans radicaux » :
« Et ça, on doit en être fier. Surtout qu’aujourd’hui, on n’arrive même pas à le faire en France. »
Pas étonnant que les fafs aient vite proliféré dans les abonnés de la chaîne. Au milieu, il faut le dire, de simples curieux ou passionnés d’armes, qui ont toutefois commencé à fuir ce youtubeur très marqué politiquement.
Stage de combat urbain
Code-Reinho a fédéré une communauté soudée et nombreuse qu’il a fait fructifier. En amont du lancement de son association d’airsoft il y a deux ans, Joël G. a ouvert une cagnotte en ligne pour financer l’achat d’un espace dédié dans le département des Deux-Sèvres. Selon nos informations, il a récolté 46.000 euros (115% de la somme demandée) via 741 contributions. Le projet était de créer un « centre d’entraînement airsoft au combat urbain dans un local comprenant un étage, une cave et deux bâtiments annexes » sur un terrain de 3.000m2. « Le but est d’apprendre les bases du combat urbain de jour et de nuit de manière individuelle et en groupe avec divers scénarios, les stages se font par sept stagiaires à la fois, sans beaucoup de temps de sommeil de prévus », précisait-il.
L'ancien militaire organise des stages de combats. StreetPress a pu identifier qu’Epona – militante très active de l'ultranationaliste Parti de la France – y est notamment passée en mars. / Crédits : DR
La petite histoire ne dit pas si les stagiaires s’y sont entraînés à tirer sur « un gauchiste », comme dans le tuto vidéo de Reinho et l’influenceur d’extrême droite pro-Zemmour Papacito qui a fait scandale. Vidéo qui a d’ailleurs valu aux deux hommes d’être entendus par la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP). Ils y allumaient au fusil de chasse un mannequin habillé notamment d’un t-shirt : « Je suis communiste ». C’est sur ce terrain en tout cas que Reinho organise ses stages de « combat CQB » (pour « close-quarters battle », signifiant « engagement à courte distance »). Il en a tenu un en début de mois, d’autres sont prévus au rythme d’une à deux sessions mensuelles jusqu’en octobre prochain.
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StreetPress a pu identifier qu’une certaine Epona – Charlène Blanc de son vrai nom, militante très active de l’ultranationaliste Parti de la France – y est notamment passée en mars. Celle qui fréquente assidûment des stands de tir de la région parisienne y a même pris la pose en tenue paramilitaire et réplique d’arme automatique à la main. « Ma guerrière prête pour reprendre le 93 », commentait un internaute sous cette photo. « Je certifie (…) ne pas adhérer à un quelconque groupe extrémiste », précise pourtant la déclaration sur l’honneur du formulaire d’inscription aux stages de l’association.
Contacté, le youtubeur Code-Reinho n’a pas répondu à nos sollicitations.
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