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    09/09/2014

    De 1968 à aujourd’hui : La story

    La Ligue de défense juive, en vrai – Partie 2

    Par Johan Weisz

    Qui est Pierre Lurçat, l’idéologue qui œuvre à diffuser en France les thèses les plus radicales de l’extrême droite israélienne ? En 2000, c’est lui qui fonde la branche française de la Ligue de Défense Juive, qui rapidement supplantera le Bétar…

    Septembre 2000, la seconde Intifada éclate en Israël et dans les territoires. Le processus de paix entamé à Oslo vole en éclats. Les images des opérations de Tsahal, qui laissent des centaines de Palestiniens morts et blessés et détruisent des maisons au bulldozer, tournent en boucle sur les chaînes de télévisions. Dans le même temps, le Hamas, le Djihad islamique et les Brigades des martyrs d’Al Aqsa se tirent la bourre pour savoir qui commettra le plus d’attentats suicides dans les villes israéliennes.

    En France, les Juifs ont l’impression de vivre presque pire. Ils découvrent que des rabbins se font tirer les papillotes par des jeunes des quartiers, que des cocktails molotov explosent dans des synagogues, que des militants anti-israéliens défilent avec des drapeaux de l’Etat juif marqués d’une croix gammée en criant « Hitler, Sharon, où est la différence ». Près de 750 actes antisémites sont recensés en 2001, contre moins d’une centaine l’année précédente. Pour les juifs de France, c’est clair, l’importation du conflit israélo-palestinien dans l’Hexagone est le révélateur d’un « nouvel antisémitisme » qui prend le prétexte de la défense des Palestiniens pour frapper.

    L’idéologue

    C’est le moment précis que choisit Pierre Lurçat pour concrétiser son projet de créer une « Ligue de Défense Juive » en France. Le choix de Lurçat, diplômé de l’Essec dix ans plus tôt, n’est pas anodin. Le trentenaire, un homme grand et mince aux lunettes fines, choisit de donner pour symbole à sa Ligue de Défense Juive l’étoile de David marquée d’un poing, sur fond jaune. C’est le symbole du parti d’extrême droite israélien Kah, qui vient d’être interdit 6 ans plus tôt en Israël après qu’un de ses membres, Baruh Goldstein est entré dans une mosquée de Hébron armé d’un fusil mitrailleur et a assassiné 25 fidèles en prière, en blessant 129 autres.

    Lurçat est un intellectuel, formé à l’école de la droite sioniste. Le mouvement étudiant Tagar, qu’il dirige au début des années 1990 est connu pour son activisme musclé et est affilié au Likoud, le grand parti de la droite israélienne, mais n’a jamais versé dans le racisme. Lurçat immigre en Israël à 26 ans, au moment où l’extrême droite israélienne se radicalise. En 1994, le massacre de Hébron est perpétré par Baruh Goldstein ; en 1995, Ygal Amir assassine le premier ministre israélien Itzhak Rabin, qui avait signé les accords d’Oslo avec Arafat deux ans plus tôt.

    Lorsqu’il rentrera en France à la fin des années 1990, Pierre Lurçat œuvrera désormais à diffuser dans la communauté juive l’idéologie de Kah : le racisme anti-arabes (coupables en Israël des attentats et en France de l’antisémitisme), le « transfert » des arabes d’Israël et des territoires occupés vers la Jordanie, le combat contre les juifs partisans des accords de paix considérés comme des traîtres ou des « kapos ». Pour Lurçat, l’alliance de la communauté juive avec la frange pro-israélienne de l’extrême droite française s’impose pour affronter les nouveaux ennemis : islamistes, militants pro-palestiniens, intellectuels de gauche, médias ou « racailles » des banlieues.

    En Janvier 2001, Pierre Lurçat dépose les statuts de l’association « LDJ » dont les initiales sont censées signifier… « Liberté, Démocratie et Judaïsme » ! Mais la ficelle est un peu grosse : le site liguededefensejuive.com affiche à l’époque l’adresse de l’association, le nom de domaine est aussi enregistré par l’association que préside Lurçat. Les premiers articles du site sont tous signés par « Itshak » , le deuxième prénom de Pierre Lurçat et ses « recherches » sur l’islamisme réalisées dans le cadre d’un obscur « Centre de recherches sur l’Islam en Europe » y sont largement diffusées. Ce qui n’a pas empêché Pierre Lurçat de démentir à plusieurs reprises « être le fondateur de [la ligue de défense juive], avec laquelle je n’ai aucun lien » et de plaider, devant un tribunal, l’usurpation d’identité !

    En 2001, la branche française de la « Jewish Defense League » est donc née, les stickers et les t-shirts jaunes marqués du poing et de l’étoile de David commencent à se remarquer dans Paris. Dans un de leurs premiers tracts, les militants se présentent comme « les héritiers spirituels du Rav Kahana ».

    Méïr Kahana, rabbin du Queens et agent undercover

    Méïr Kahana, l’inventeur du poing et de l’étoile, commence sa carrière comme rabbin dans le Queens à New-York, à la fin des années 1950. Il a alors 26 ans. Mais sa communauté lui reproche de vouloir entraîner les jeunes fidèles vers un judaïsme trop orthodoxe et se sépare de son rabbin. Kahana se rase alors la barbe, loue un appartement sur la 85e rue – inconnu de sa femme et de ses quatre enfants restés dans le Queens – et se fait appeler « Michael King ». Michael King est tour à tour consultant en géopolitique dans un cabinet qu’il monte avec un ancien camarade du Betar proche des services de renseignement, activiste anti-hippie et pro-guerre au Vietnam sur les campus et… agent infiltré du FBI, pour qui il espionne de 1963 à 1965 la John Birch Society, un groupe de pression anti-communiste aux Etats-Unis.

    Le journaliste Gal Beckerman raconte :

    « Durant cette période, Méïr Kahana avait plus le look d’un escroc que d’un rabbin respectable. Dans les soirées où il rencontrait du monde, il se présentait comme un correspondant étranger travaillant pour une agence de presse africaine. Et se présentait souvent comme étant presbytérien. En juin 1966, Kahana, toujours sous le pseudonyme de Michael King, rencontre dans un bar de la 2e avenue Gloria Jean D’Argenio, une mannequin de 32 ans. Kahana tombe amoureux. Et sans révéler qu’il était rabbin ou qu’il était marié avec 4 enfants qui vivaient non loin de là dans le Queens, il la demande en mariage. Mais deux jours avant la cérémonie, il lui envoie une lettre de rupture. »

    Gloria se jette du haut du Queensboro bridge dans l’East River, la lettre de Kahana dans la poche, et meurt le lendemain de ses blessures.

    « Never again »

    C’est sous sa véritable identité que Méïr Kahana lance la Jewish Defense League (JDL) en 1968. Kahana ne jure alors que par la « fierté juive ». La JDL se présente comme un mouvement d’auto-défense, qui protège les juifs de Brooklyn, régulièrement agressés par la minorité noire. Son slogan est « never again », en référence à l’extermination des juifs pendant la seconde guerre mondiale. Et le logo au poing levé, directement inspiré de celui des Blacks panthers : La « jewish pride » répond au « black power ».

    De 1968 au début des années 1990, la JDL est une organisation semi-clandestine. Elle a des bureaux à New-York sur la 5e avenue et à Los Angeles, mais ne revendique pas les attentats. Des caches d’armes sont installées dans Brooklyn tandis que Méïr Kahana multiplie les interventions télévisées et se rapproche du parrain de la mafia italienne, Joseph Colombo. La JDL organise des camps d’entraînement paramilitaires pour ses membres, qui comparent la situation des juifs américains à celle des juifs dans « l’Allemagne des années 1920 ». On y commémore l’anniversaire de la nuit de cristal par une campagne incitant à l’autodéfense par les armes à feu : « Every Jew, a .22’ ».

    Une avalanche de punchlines et une capacité à attirer l’attention des médias qui parvient à rattraper l’organisation brouillonne d’un mouvement largement infiltré par la police, raconte Richard Rosenthal, un flic new-yorkais embedded qui deviendra vite instructeur en maniement des armes de l’organisation. Son récit montre un Kahana déterminé mais dépassé par les questions logistiques et entouré de gros bras attachants mais à l’amateurisme subjuguant.

    C’est sa lutte anti-communiste qui fait connaître la JDL au grand public américain. A l’époque, la situation des juifs d’URSS est tendue, ils n’ont pas le droit de pratiquer leur religion et le pouvoir soviétique leur refuse l’immigration en Israël. Le mouvement des « refuzniks », auxquels l’URSS refuse le visa vers l’Etat juif, suscite l’émotion dans la communauté juive de par le monde.

    Méïr Kahana se campe en un Moïse qui sauverait à lui seul les juifs d’URSS, comme il l’explique en 1971 au New York Times :

    « La chose la plus importante pour l’URSS en ce moment est la Détente avec l’Ouest. Ce que nous essayons simplement de faire est de leur mettre des bâtons dans les roues pour ensuite pouvoir mieux négocier avec eux : “Vous voulez la Détente, prenez votre Détente, mais faites aussi un pas, payez-nous en retour ; donnez-nous 8.000 juifs, 10.000 juifs, 12.000 juifs.” »

    Méïr Kahana fondateur de la JDL

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    Les bâtiments de la mission soviétique à l’ONU, attenants à une synagogue, seront visés une dizaine de fois : Par des manifestants qui grimperont sur le toit de l’édifice religieux pour étendre une banderole mais aussi par des tirs de pistolet sur la mission diplomatique, le passage à tabac de diplomates russes à l’entrée du bâtiment, l’explosion d’une voiture diplomatique garée à proximité, ou encore la tentative, stoppée par le FBI, de faire exploser un drone piégé au-dessus de l’immeuble !

    Les activistes de la JDL ne manquent pas non plus les représentations d’artistes russes qui se produisent sur les scènes new-yorkaises dans lesquels ils débarquent avec des souris et des boules puantes. De sorte qu’à l’hiver 1971, le Kremlin est contraint d’annoncer l’annulation de la tournée américaine du Bolchoï.

    Avec la défense des juifs russes, Kahana a frappé un grand coup et s’est attiré soutiens sinon sympathie, au sein de la communauté juive new-yorkaise. Mais tout va s’effondrer comme un soufflet quand deux membres de la JDL déposeront une bombe incendiaire à l’accueil des bureaux du grand impresario juif new-yorkais Sol Hurok. Kahana reproche à Hurok de faire produire aux Etats-Unis des artistes soviétiques et par là de « sacrifier sa fidélité au peuple juif sur l’autel des profits ». Ce matin de janvier 1972, la bombe incendiaire explose quelques minutes après l’arrivée de l’impresario dans ses bureaux. L’accueil s’enflamme provoquant une épaisse fumée noire, qui bloque les occupants de l’étage contraints de s’enfermer pour essayer d’échapper à la fumée. Une jeune secrétaire juive de 27 ans, Iris, n’en réchappera pas. Le New-York Times s’empare de l’histoire pour tomber à bras raccourcis sur Kahana et sa JDL. Le poète soviétique Evgueni Evtouchenko auteur du célèbre « Babi Yar » , écrit en souvenir du massacre de dizaines de milliers de juifs par la Wermacht, se trouve en visite à New-York. Il rédige un poème en hommage à Iris, « jeune fille juive asphyxiée par la fumée / à la manière d’une chambre à gaz nazie ». Le poète retourne contre Kahana sa rhétorique du « plus jamais ça ».

    Le rêve de Méïr Kahana, qui voulait rassembler les masses juives derrière lui, s’envole en fumée.

    La Jewish Defense League va perdurer aux Etats-Unis jusqu’au début des années 1990. Dans ce laps de temps, le FBI considère que la JDL est la deuxième organisation terroriste, par ordre d’importance, à opérer sur le sol américain.

    Après les Russes, les arabes sont une des cibles favorites de la JDL. Ses militants seront arrêtés à l’aéroport Kennedy de New-York, avec des armes à feu et des explosifs, alors qu’ils voulaient détourner un avion d’une compagnie arabe. En 1985, Alex Odeh, un Américain d’origine palestinienne qui dirige l’American-Arab Anti-discrimination Committee est tué dans un attentat contre les locaux de l’organisation. Le porte-parole de la JDL explique alors qu’« Odeh a eu exactement ce qu’il méritait ».

    Les organisations juives mainstream sont aussi régulièrement visées par des sit-ins ou des descentes de la JDL qui leur refuse le leadership communautaire. Tandis que les organisations juives de gauche sont dans le collimateur du mouvement, jusqu’à ses derniers souffles. Comme en 1994 lorsque des bombes sont déposées devant les bâtiments new-yorkais de « la Paix Maintenant » et du mouvement de jeunesse sioniste de gauche « Habonim ».

    Tupac

    Même les gangsta rappeurs Tupac et Eazy-E seront dans le viseur de la JDL ! C’est ce que révèlent des documents du FBI, déclassifiés il y a 3 ans. Car depuis les années 1980, c’est une figure du crime organisé qui est le boss de la section West Coast de la JDL. C’est lui qui a fait tuer Odeh en 1985 et c’est lui qui rackettera Tupac et Eazy-E au début des années 1990, comme l’écrivent les Fédéraux dans leur rapport d’enquête :

    « [Le chef de la JDL et d’autres individus ont] extorqué des fonds à de nombreuses stars du rap, via des menaces de mort. Le schéma était le suivant : Ils passaient des appels téléphoniques et menaçaient de mort le rappeur en question. Des individus contactaient ensuite la victime en lui proposant une protection contre une somme d’argent. La victime et sa famille étaient ensuite emmenées dans un “lieu protégé”, en général une propriété privée, et se retrouvaient protégés par des gardes du corps lourdement armés et membres de la Ligue de défense juive. Les individus expliquaient ensuite qu’ils étaient parvenus à un deal avec les auteurs des menaces et les menaces cessaient. La victime payait ensuite pour les services protection rendus. »

    Triste fin que celle de la JDL. Au début des nineties, la dérive mafieuse est totalement consacrée. Depuis plusieurs années, des factions rivales vont jusqu’à faire sauter les voitures des membres des factions concurrentes. Plusieurs chefs de la JDL terminent leurs jours en prison, pendus ou tués par des co-détenus.

    « Kah »

    Méïr Kahana meurt en 1990, assassiné par un extrémiste arabe après un meeting de la JDL à New-York. Mais depuis le début des années 1970, Kahana avait construit sa base arrière à Jérusalem, où il a créé le parti « Kah ». « Kah » signifie en hébreu « c’est comme ça » et fait référence à une formule célèbre de l’Irgoun, l’organisation juive clandestine à l’origine du massacre de Deir Yassin. Le « Kah » avec son poing et son étoile, c’est la naissance d’une extrême droite marketée par les formules chocs de son chef Méïr Kahana.

    Le rabbin a exporté son combat radical en Israël, où il fait régulièrement la Une des journaux. Son programme politique est centré autour de l’idée de « transfert » : Déporter les arabes d’Israël et des territoires, vers la Jordanie voisine. Et même au-delà, car Kahana veut un « grand Israël », avec ses frontières du temps de la Bible, de la Méditerranée à l’Euphrate et du désert du Sinaï au Liban. Pour le Kah, aucun accord de paix ne doit être signé avec « les 100 millions d’arabes » qui entourent le petit Etat juif et veulent sa destruction.

    Mais l’exposition médiatique de Kah ne se traduit pas en succès dans les urnes. Malgré un scrutin proportionnel inspiré de notre IVe République, le Kah ne décrochera qu’une seule fois un siège au parlement israélien. Méïr Kahana fait son entrée à la Knesset, en 1984. Mais la commission électorale israélienne interdit à un candidat d’un mouvement raciste de se présenter à une élection. Et c’en est fini de l’aventure parlementaire.

    Le Bétar et la LDJ, drapeau dessus dessous

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    C’est après l’assassinat de Kahana en 1990 que ses héritiers vont engranger les dividendes politiques de vingt ans d’activisme à droite de la droite. Kahana n’est plus, mais ses slogans sont plus là que jamais. A commencer par les tags, sur les murs des villes israéliennes : « Transfert », « Pas d’arabes = pas d’attentats », « Un bon arabe est un arabe mort ». On peut aussi lire « Kahana est vivant », mot d’ordre qui englobe les précédents. L’interdiction de Kah en 1994, après la tuerie de la mosquée de Hébron par un des membres du groupe, pousse les fidèles de Kahana à créer ou rejoindre de nouvelles organisations. Au cours des dix dernières années, Baruch Marzel, ancien responsable du Kah, ou les membres du parti d’extrême droite Otzma dont les thèses découlent le plus fidèlement de la doctrine de Kahana siègent à la Knesset. Bien installés dans le jeu politique israélien, les baby Kahana pèsent de plus en plus sur la politique israélienne.

    Au point que le Likoud, le grand parti de droite, a désormais sur sa droite une coalition de formations extrémistes qui compte davantage de sièges.

    RIP le Bétar

    En France aussi, les baby Kahana vont rapidement concurrencer le Bétar, affilié au Likoud. Le mouvement de jeunesse historique de la droite sioniste, a pourtant derrière lui une réputation de cogneurs qui a laissé quelques traces à l’extrême droite et dans la mouvance pro-palestinienne : saccages de locaux du Front National, attaque du congrès de l’Oeuvre française ou du QG du Gud…


    Live – Le Bétar chez Dechavanne

    Mais les années 2000 marquent le début de la fin pour le Bétar. Le mouvement n’a plus d’argent. « Les huissiers venaient au local, les PV n’étaient pas payés », se souvient Maxime. Du coup, le directeur du Bétar « voulait qu’on fasse du léger, il voulait se recentrer » raconte Anthony Attal. « Ca devenait une colonie de vacances », complète Maxime qui a rejoint la LDJ à ses débuts. « On s’est complètement séparés du Bétar », conclut Attal. Plusieurs « shlihim » (directeurs, littéralement « envoyés ») arrivent d’Israël pour relancer un mouvement qui cherche à se mainstreamiser. Mais malgré l’appui d’Israël et des organisations sionistes, le Bétar, endetté et délaissé par les jeunes juifs, stoppe ses activités en 2006 et n’a pas rouvert depuis.

    « Sébastien Sellam, Ilan Halimi, la tuerie de Toulouse »

    Dans le même temps émerge une identité LDJ. Les jeunes qui rejoignent la Ligue s’identifient aux histoires de Sébastien Sellam et Ilan Halimi, assassinés en 2003 et 2006, « parce qu’ils étaient juifs ». Ces jeunes feujs sont comme eux issus de quartiers populaires. Face à des organisations communautaires d’abord gênées aux entournures, l’organisation s’empare de ces tragédies.

    D’abord de celle de Sébastien Sellam, aka DJ Lam C, un DJ de 24 ans qui mixait au Queen ou aux Bains. En 2003, Adel, son voisin de palier et ami d’enfance l’attend dans le parking de leur immeuble du quartier Louis Blanc : il l’égorge et le défigure à coups de couteau.

    Ilan Halimi sera assassiné en 2006 par le groupe de Youssouf Fofana. Depuis, chaque année, c’est la LDJ qui organise la commémoration, boulevard Voltaire. C’est là qu’Ilan, comme de nombreux jeunes juifs, travaillait dans une boutique de téléphonie mobile.

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    Des drapeaux de la LDJ pendant un hommage pour Ilan Halimi / Crédits : Benjamin Barda

    «Tu sais je mange du porc, moi… c’est bon le cochon !» Elihaou

    « Nous on représente les simples juifs de la base », assure Elihaou le boss. « Le Crif ne me représente pas », s’agace Hervé, qui en a marre des « juifs de cour » des beaux quartiers. Hervé travaille « dans la vidéo surveillance » et a grandi dans le 91. « Vous voulez que je vous montre des juifs qui sont dans le besoin ? », me lance-t-il. « Je ne suis pas trop religieux, ce n’est pas trop mon truc », ajoute Hervé. Sarah, qui se fait appeler « Golda » et porte une grande étoile de David autour du cou, a rejoint la LDJ depuis un peu plus de 2 ans. Gilet blanc, et bracelet « Tsahal » en plastique au poignet, elle « travaille dans la restauration » et est aussi issue d’un milieu modeste. Elle va une fois par an en Israël et n’est pas pratiquante : lorsqu’on lui demande si elle fait le kiddoush le vendredi soir, elle répond par la négative.

    Des juifs « de base » donc, et pas non plus religieux pour un sou. Elihaou le vieux chef, jamais à court d’une vanne, en rigole : « tu sais je mange du porc, moi… c’est bon le cochon ! » Et de rebondir par une pirouette :

    « Mais tu sais qui c’est les meilleurs amis du cochon, c’est les juifs, haha !»

    Elihaou reprend entièrement les rênes de la Ligue de Défense Juive quand Pierre Lurçat repart en Israël au milieu des années 2000. Lurçat vit désormais dans le quartier de Talpiot à Jérusalem et a refusé de s’exprimer en « ON » sur StreetPress. Mais Eliahou, à la tête de la branche « politique », tout comme Lurçat précédemment, doit se contenter de donner la ligne et apporter les drapeaux jaunes aux manifs : il n’a pas entièrement la main sur les jeunes de la Ligue.

    Car c’est la branche « actions » qui rassemble les jeunes et qui rend la Ligue si médiatique. Elle connaîtra 4 chefs successifs, raconte Anthony Attal : « De 2000 à 2009, c’est moi qui dirige la LDJ. Ensuite, c’est [l’ancien skin] Philippe Wagner jusqu’en 2011. Puis Yossi Ayache pendant un an. Puis moi à nouveau. Et j’ai passé les clés à David il y a quelques mois. » Il continue :

    « Mais la vérité, c’est que c’est à mon époque, de 2000 à 2009, que la LDJ a connu ses grandes heures ».

    Son histoire, Tony Attal a bien voulu me la raconter.

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