Hey, tu vois Jérémie, mon micro réagit quand tu parles…
Oui, il est interactif. Je devrais peut-être l’utiliser pour mes installations…
Quand tu parles, le potard bouge.
Ahhhhhhh !!! Ah, ouais. Faudrait que tu l’envoies à des festivals d’art numérique…
Bon allez, c’est quoi tes créations du moment ?
Je présente « Paroles de », qui est une installation interactive. Et « Equations lyriques », qui est une installation générative, c’est-à-dire une œuvre qui n’existe que par elle-même, qui n’a pas besoin d’interaction pour exister.
Jérémie Dres expliqué par Jérémie Dres
Tu dis « installations », mais à chaque fois, elles tournent sur un logiciel que tu as créé qui pèse seulement quelques dizaines de kilo-octets…
Oui mais puisque tu parles de poids, il faut rajouter tout ce qui va avec : ordinateur, micro, ampli…
Bon, un petit logiciel, une réaction aux sons ou aux mouvements pour d’autres œuvres qu’on a vues au Cube… tout ça ferait de bonnes applications iPad !
Pas toujours. L’ordinateur n’a pas été forcément pensé pour faire des expos. L’art numérique est aussi un art d’expérience. On va au devant de l’installation pour se confronter à l’oeuvre. C’est l’expérience qui nous renseigne sur l’œuvre. Et puis sur le net ou un iPad, on a tendance à zapper très rapidement : la question de la disponibilité joue énormément dans la compréhension de l’oeuvre.
C’est quoi la valeur ajoutée du numérique pour le Dada qui sommeille en toi ?
Une œuvre comme « Paroles de » s’inspire des univers de collages de mots à la Dada. Mais le numérique amène une nouvelle méthodologie qui produit des mots. Grâce à l’informatique, on génère des conditions aléatoires, des conditions d’interaction qui permettent à la poésie d’évoluer. On obtient des résultats de phrases d’un nouveau type. Et au final, on développe un univers absurde de paroles… Mais je n’ai pas l’impression d’avoir fait évoluer les Dadas ! Parce que les Dadas ou l’ Oulipo, c’est fini, c’était une école. Maintenant on est passés à autre chose : La technique numérique permet à l’œuvre d’exister et ça change tout.
Jérémie Dres, la life
1982: Naissance à Paris
1990: Papa lui offre son premier PC
1994: Reçoit son premier pinceau
2007: Diplômé des Arts Décoratifs de Strasbourg
2009: Présente sa performance Tablographie, pendant un concert de So Called, l’inventeur génial du hip hop klezmer
2010: Exposé au Cube, pour le Festival l’Art Numérique Aujourd’hui
Le site de Jérémie Dres
Est-ce que le risque avec l’art numérique, ça n’est pas que l’œuvre soit dépassée par le progrès technique ?
Je trouve dommage de penser qu’une bonne œuvre numérique se résume à la technologie avant-gardiste qu’elle utilise. J’ai coutume de penser que l’art numérique, c’est de l’art qui utilise la technologie. La peinture utilise le pinceau, la photographie, l’appareil photo. Pour le numérique, l’outil utilisé est l’informatique, les capteurs, les micros… Mais comme dans toute œuvre, si le concept est moins travaillé que l’aspect technique, elle ne marquera ni longtemps les esprits, ni le champ de l’art en général. L’art numérique fait partie de l’art !
Des œuvres avec des concepts faiblards, tu balancerais ?
Après avoir vu certaines expos au Palais de Tokyo, je ressors en me disant : « Merde, qu’est-ce que l’artiste voulait dire ? ». Moi-même qui suis dans l’art, je vais observer des œuvres et je reviens en me disant « Pffff… ». A contrario, ce qui est intéressant, par exemple avec le Cube, c’est qu’il y a beaucoup de médiation [des étudiants en école d’art sont formés par le Cube et expliquent les œuvres au public, ndlr] ce qui permet aux gens de mieux comprendre l’œuvre et de savoir dans quoi elle s’inscrit.
Voir aussi sur StreetPress L’Oracle de Jérémie Dres
« Grâce à l’informatique, on génère des conditions aléatoires, des conditions d’interaction qui permettent à la poésie d’évoluer »
Source: Johan Weisz | StreetPress
Crédits photos : Michela Cuccagna pour StreetPress
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