En ce moment

    22/02/2023

    Les proches de Claude Jean-Pierre témoignent dans notre documentaire

    Le procureur de Guadeloupe requiert un non-lieu dans l’affaire Claude Jean-Pierre, mort après un contrôle routier

    Par Inès Belgacem

    Claude Jean-Pierre décède en 2020 après un contrôle de gendarmerie en Guadeloupe. Malgré une vidéo de l’interpellation, le procureur de la République requiert un non-lieu. Sa fille Fatia prend la parole dans notre documentaire.

    Le jeudi 16 février, le procureur de la République de Guadeloupe, Xavier Sicot, a rendu les conclusions de son enquête dans l’affaire Claude Jean-Pierre. Un peu plus de deux ans après le contrôle routier qui a précédé la mort du retraité de 67 ans, le magistrat sollicite le non-lieu. Fatia Alcabelard, la fille unique de Claude Jean-Pierre, tonne dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux :

    « Mon père est mort. Et aujourd’hui, un procureur estime qu’il ne s’est rien passé et qu’il devrait y avoir un non-lieu. »

    Avec son mari Christophe Sinnan, Fatia revient sur les circonstances de la mort de son père dans notre documentaire Violences Policières, le combat des familles, disponible gratuitement et en intégralité sur la plateforme France.tv Slash.

    Claude Jean-Pierre

    Claude Jean-Pierre avait 67 ans. Nouvellement retraité, l’ancien maçon habitait à Deshaies, une petite ville en bord de mer, au nord-ouest de la Guadeloupe. « Mon père connaissait l’endroit comme sa poche, il y a grandi et vécu. Il a de la famille et des amis ici. » Il a même participé à bâtir plusieurs maisons. Connu comme un homme jovial, qui aimait faire la fête et rigoler, « il laisse un grand vide, il était apprécié », commente tristement son unique fille.

    Il est arrêté en voiture le 21 novembre 2020 pour un banal contrôle routier. Le centre de Deshaies est minuscule, une boucle à sens unique qui passe à l’arrière de la mairie, où s’est passé le contrôle. « On est obligé d’y passer tous les jours », grimace Fiona, la nièce de Claude Jean-Pierre. « J’ai le cœur serré à chaque fois. Ça ne s’oublie pas. » Dans Violences Policières, le combat des familles, Fatia se rend sur les lieux avec sa cousine. Cette dernière était présente le jour des faits. Elle raconte avoir été prévenue par un voisin aux alentours de 15h. Sur place, elle trouve son oncle gisant au sol en plein soleil. « En me rapprochant, je vois les deux gendarmes et je leur demande ce qu’il s’est passé. Ils me répondent : “On ne lui a rien fait, il s’est effondré, c’était un malaise”. » Avec beaucoup d’émotion, elle raconte :

    « Quand je l’ai vu à terre, j’ai vu qu’il me regardait dans les yeux et je me suis demandée si c’était la dernière fois… Oui, c’était la dernière fois. »

    La version des deux gendarmes a depuis été mise à mal par une vidéo de surveillance tournée par une caméra située au coin de la rue, sur la mairie. Sur les images – révélées par Le Média TV et disponibles dans le documentaire – on voit la voiture de Claude Jean-Pierre. Il se range sur le bas-côté et donne ses papiers aux agents. Le retraité attend un moment, assis au volant, sa porte ouverte et une jambe en dehors de l’habitacle. Après 20 minutes, un gendarme tente de sortir Claude de son véhicule. « Il l’attrape violemment et le tire, par surprise ! Mais la tête se bloque dans l’habitacle. Claude faisait presque deux mètres », contextualise Christophe, le compagnon de Fatia. Les forces de l’ordre sortent ensuite le sexagénaire à bout de bras de la voiture, avant de le laisser s’effondrer sur le bitume. Claude semble inanimé.

    https://backend.streetpress.com/sites/default/files/retour_sur_le_lieu_fatia_et_sa_cousine.00_06_58_18.still001.jpeg

    Dans notre documentaire Violences Policières, le combat des familles, Fatia se rend sur les lieux avec sa cousine. / Crédits : StreetPress

    Le service de communication de la gendarmerie nationale, ainsi que le préfet de Guadeloupe, n’ont pas donné suite à nos sollicitations pour le documentaire.

    Le combat

    Claude Jean Pierre est conduit à l’hôpital de Point-à-Pitre où les médecins constatent les fractures des vertèbres C4 et C5. « En gros on lui a cassé le cou », traduit Christophe, le gendre. Le retraité est placé dans un coma artificiel avant de décéder quelques jours plus tard, le 3 décembre 2021. « Quand j’ai les images sous les yeux et que je me rends compte que le décès de mon père est intervenu à la suite des agissements de ces gendarmes. J’ai ce sentiment de colère qui m’envahit », commente Fatia. « En même temps, je me dis que ce n’est pas la meilleure façon de me défendre que de sombrer dans la colère. »

    Fatia, son conjoint Christophe, ainsi que ses cousins et cousines, ont choisi de se battre pour réclamer justice pour Claude jean Pierre. Il voudrait, aussi, faire perdurer la mémoire du retraité. Ils organisent des événements, participent à des manifestations et font tout pour médiatiser leur affaire. Aujourd’hui, ils attendent la décision de justice qui leur permettra d’aller devant les tribunaux et d’avoir justice pour le sexagénaire. Mais le non-lieu demandé par le procureur de la République de Guadeloupe ne présage rien de bon. Fatia conclut :

    « Si je pouvais dire quelque chose à mon papa c’est que je me battrais pour lui jusqu’au bout »

    https://backend.streetpress.com/sites/default/files/manif_pointe_a_pitre.00_25_23_18.still005_0.jpeg

    Sa famille se bat pour réclamer justice. / Crédits : StreetPress

    Violences Policières, le combat des familles est disponible gratuitement et en intégralité sur France.tv Slash.

    A LIRE AUSSI : « Mon père avait 67 ans quand il a été tué par des gendarmes »

    Cet article est en accès libre, pour toutes et tous.

    Mais sans les dons de ses lecteurs, StreetPress devra s’arrêter.

    Je fais un don à partir de 1€ 💪
    Sans vos dons, nous mourrons.

    Si vous voulez que StreetPress soit encore là l’an prochain, nous avons besoin de votre soutien.

    Nous avons, en presque 15 ans, démontré notre utilité. StreetPress se bat pour construire un monde un peu plus juste. Nos articles ont de l’impact. Vous êtes des centaines de milliers à suivre chaque mois notre travail et à partager nos valeurs.

    Aujourd’hui nous avons vraiment besoin de vous. Si vous n’êtes pas 6.000 à nous faire un don mensuel ou annuel, nous ne pourrons pas continuer.

    Chaque don à partir de 1€ donne droit à une réduction fiscale de 66%. Vous pouvez stopper votre don à tout moment.

    Je donne

    NE MANQUEZ RIEN DE STREETPRESS,
    ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER