J’ai créé l’association Règles Élémentaires pour venir en aide aux femmes sans-abri. Le but : récolter des protections périodiques. Cette idée a germé lorsque j’étudiais à l’Université de Cambridge où une initiative similaire avait été prise. En effet, outre-Manche (et ailleurs dans le monde : États-Unis, Australie, Hong-Kong, Brésil…), la démarche est courante et le problème reconnu depuis longtemps. Cela m’a interpellée, d’autant plus que je ne m’étais jamais posé la question de comment les femmes géraient leurs règles en vivant dans la rue. Et apparemment personne dans mon entourage n’y avait pensé non plus !
Les banques alimentaires ne reçoivent pas assez de produits d’hygiène intime
Quand je suis rentrée à Paris, j’ai constaté que pendant les collectes des banques alimentaires, les produits d’hygiène intime étaient simplement inclus dans la catégorie « fourre-tout » des denrées « non-périssables ». Cela va des boîtes de conserves aux couches pour bébés, en passant par les tampons et les serviettes ! Pas terrible donc, pour communiquer sur ce sujet.
En septembre 2015, j’ai donc pris contact avec des refuges, des centres d’accueil de jour et le Samu social de Paris. Leur réponse a été unanime et alarmante : tous manquaient de produits d’hygiène intime et étaient incapables de faire face à la demande croissante, car les femmes sans-abri sont de plus en plus nombreuses.
C’est un sujet qui à la base dégoute et dérange
Plus problématique encore, la difficulté de communiquer sur un sujet qui dégoûte et dérange.
J’ai lancé la première collecte à Sciences Po. J’y étais étudiante et l’association Paris Solidaires pouvait m’apporter un soutien logistique. Mais aussi et surtout car le milieu estudiantin est très réceptif à ce genre d’initiatives. Ce fut un succès ! Pas mal de garçons ont participé. Même si au début, ils étaient plutôt surpris et embarrassés par notre initiative. Pour beaucoup, ce fut le premier achat de tampons et de serviettes de leur vie ! Tous les dons ont été reversés au Samu social de Paris, qui reste à ce jour notre principal partenaire pour assurer la distribution aux femmes SDF.
Règles Élémentaires est devenue une association loi 1901 au début de l’année 2016. Aujourd’hui sept personnes font partie de l’association : nous sommes en train de recruter d’autres bénévoles et de constituer un comité stratégique.
« Au total, nous avons pu redistribuer plus de 100.000 produits d’hygiène intime via nos partenaires. »
Tara Heuzé, fondatrice de l’asso Règles Élémentaires
On a redistribué plus de 100.000 produits d’hygiène intime
Les retours sur notre action ont été nombreux et très positifs. La première collecte a permis de récolter environ 25.000 tampons et serviettes grâce aux nombreux dons des étudiants et personnes extérieures ayant entendu parler de l’initiative. Au total, nous avons pu redistribuer plus de 100.000 produits d’hygiène intime via nos partenaires : le Samu social de Paris, la Croix-Rouge, les Restos du Cœur, Médecins du Monde… Depuis notre lancement, nous avons même été sollicités pour l’organisation de collectes en Belgique, au Canada et nous avons reçu des dons d’aussi loin que Singapour !
Cette année, nous allons déployer nos boîtes à dons avec de nouveaux partenaires, y compris plusieurs mairies parisiennes et des grands centres commerciaux partout en France.
Les produits d’hygiène intime doivent être accessibles à toutes
Nos collectes marchent car on s’est concentrés sur des dons en nature et non en argent. Les gens sont en permanence sollicités pour des dons financiers, alors que nous avons décidé d’insister sur les aspects de solidarité, de partage et de mettre fin au gaspillage.
Ensuite, notre lancement a eu lieu peu de temps après les débats sur la taxe tampon et quelques jours avant le deuxième vote sur le sujet à l’Assemblée nationale. Ces évènements ont sensibilisé beaucoup de monde au coût élevé de l’accès aux produits d’hygiène intime, et de nombreuses personnes ont pris conscience de l’utilité et de la nécessité de notre initiative !
« Souvent une femme SDF doit choisir entre manger et rester digne, dilemme inadmissible ! »
Tara Heuzé, fondatrice de l’asso Règles Élémentaires
Cette baisse de la TVA sur les produits d’hygiène se fait automatiquement sur les prix, ce qui est bien, mais cela ne règle pas le problème de l’accès à ces produits pour les femmes SDF.
Il y a un réel problème d’accès aux produits hygiéniques : souvent une femme SDF doit choisir entre manger et rester digne, dilemme inadmissible ! Aujourd’hui en France, les femmes sans-abri peuvent aisément se procurer des préservatifs, mis à disposition gratuitement dans la quasi totalité des centres d’accueil, mais pas de tampon ou de serviette ! Avec Règles Élémentaires on espère changer ça, en donnant accès aux produits d’hygiène intime à toutes, partout, tout le temps.
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