Elle venait porter plainte, elle s’est fait expulser
En 2008, une marocaine de Lille s’est fait expulser alors qu’elle était venue déposer plainte contre son mari violent, certificats médicaux à l’appui. Elle s’est présentée au commissariat, s’est fait arrêter, envoyée au centre de rétention avant d’être expulsée vers le Maroc. La Cimade reçoit chaque année depuis 2004 environ 250 femmes en situation irrégulière victimes de violences (conjugales, mariages forcés, mutilations sexuelles, réseaux de prostitution, traite, esclavage moderne…), sans compter les centaines d’appels. Selon l’association, les évolutions législatives en 2003, 2006 et 2007 plutôt favorables aux femmes étrangères ne sont pas ou mal appliquées. « Elles sont sans papiers donc elles sont d’abord des délinquantes, regrette Jérôme Martinez, délégué Île-de-France de la Cimade. C’est totalement illégal. Toute personne doit pouvoir déposer plainte. Dans la réalité ça ne se fait pas ou très très mal. » « Les policiers ne voient que le fait qu’elle est en infraction sur le territoire français, ajoute Violaine Husson, responsable de la permanence des femmes de la Cimade en Île-de-France. C’est plus facile de la placer en détention que d’engager une procédure contre le mari. »
« Il sait qu’Elle est sans-papiers »
« Souvent, le seul moyen pour ces femmes de venir en France ou d’obtenir un titre de séjour va être de passer par un mariage, explique Jérôme Martinez, délégué Île-de-France de la Cimade. Donc on a affaire à des femmes qui vont avoir un titre de séjour en tant que conjoint ou concubin d’un Français ou d’un étranger régulier et dont le statut est complètement lié à cette vie commune. C’est un processus qui peut se comparer à la question par exemple des employeurs qui vont prendre des sans papiers en se disant “je pourrais le licencier et le dénoncer quand il y a un problème”. Les mêmes choses pourraient se poser pour un mari français qui prendrait une épouse étrangère dont il sait qu’elle est sans papier et qui pourrait mettre cette personne sous dépendance. »
Ne pas être dépendante du conjoint
« Il faut arriver à avoir des dispositifs de protection, des lois, une garantie que les services sociaux vont prendre en charge ces personnes, qu’on va trouver des hébergements d’urgence. Aujourd’hui, à Paris vous avez des lieux de protection pour les femmes victimes de violence. Sauf que ces lieux là ne prennent pas ou très peu de femmes sans papiers, justement parce qu’elles sont sans papiers. » Pour cela, la Cimade va proposer aux élus une charte d’engagement. « On demande le renouvellement de plein droit du titre de séjour pour les femmes victimes de violences », lance Violaine Husson. « Le but est d’arriver à ce que ces personnes-là aient un statut de manière autonome, ajoute Jérôme Martinez. C’est-à-dire qu’on considère qu’à partir du moment où elles ont construit des attaches familiales, quelque soit l’issue de cette vie familiale, qu’elle se termine par des violences ou pas, ces femmes doivent pouvoir garder leurs droits. Ça leur donnerait une garantie qu’elle ne sont pas dépendantes du conjoint ».
L’association d’aide aux sans-papiers espère que son point de vue sera pris en compte le 25 février, lorsque le projet de loi pour la protection des victimes, la prévention et la répression des violences faites aux femmes passera à l’Assemblée.
Voir aussi sur le web :
La Cimade lance une campagne pour obtenir une véritable protection des femmes étrangères victimes de violences sur le site de la Cimade
Source : Marie Molinario | StreetPress
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