« Je n’aime ni les idées d’extrême droite, ni celles d’extrême gauche (…) », tweetait Guillaume Bigot en 2018. Aujourd’hui, l’essayiste et éditorialiste semble avoir arrêté d’hésiter. Le chroniqueur de CNews a finalement été élu député après un parachutage dans la deuxième circonscription du territoire de Belfort (90) sous l’étiquette du Rassemblement national (RN), lors des élections anticipées de juin dernier. « Il n’est pas encarté au RN, mais se présente pour nous. Nous connaissons bien ses idées », avait déclaré à l’époque le délégué RN local Christophe Soustelle, qui a dû céder sa place au profit de l’éditorialiste. Apparemment pas suffisamment ! Car le nouveau député RN ne semble pas toujours avoir été un fervent soutien de son étiquette politique. Il critique le parti d’extrême droite et sa figure Marine Le Pen dans plusieurs de ses publications. Certaines sont toujours en ligne, d’autres ont disparu des radars. StreetPress a scruté ses archives dans lesquelles on retrouve une critique virulente du RN, mais aussi des tweets teintés d’islamophobie, de sexisme et de racisme…
En 2019, Guillaume Bigot écrivait sur Twitter que Marine Le Pen « est bas de plafond et pleine de ressentiments. Cette femme n’aime ni la vie ni donc la France ». Le tweet a depuis été supprimé. / Crédits : DR
En 2018, Guillaume Bigot répond à un tweet d'un compte désormais suspendu. Il tance les différents partis politiques, notamment « le Chavez » – Jean-Luc Mélenchon – et « la Mussolini de Monoprix ». Un tweet toujours disponible en ligne. / Crédits : DR
Critique du RN et de sa cheffe
« Je hais l’extrême droite (…) » ; « Ce n’est juste pas ma tasse de thé »; « (…) je n’ai aucune proximité ni sympathie ni pour l’extrême droite ni même pour la droite »… Entre 2018 et 2020, Bigot répète dans plusieurs tweets encore en ligne qu’il n’adhère pas aux thèses du parti d’extrême droite. StreetPress a déterré plusieurs tweets, désormais supprimés, où il trouve « le RN pas à la hauteur des circonstances », un parti « obsédé par l’immigration et la sécurité ». Dans un tweet de janvier 2020, il renchérit :
« Le RN n’est pas du tout enthousiasmant. Mettons de côté ses origines dégoûtantes (le détail de l’Histoire et j’en passe) il ne propose aucun élan, aucune dynamique, aucune grandeur. Que du gna gna gna geignard ! »
Si comme tous les députés RN, Bigot soutient aujourd’hui Marine Le Pen en relayant par exemple cette année le #JeSoutiensMarine lors du procès des assistants parlementaires du RN, la patronne en prenait pour son grade il y a quelques années. En 2018, il a comparé Marine Le Pen à une « Mussolini de Monoprix ». Un an plus tard, il cite un tweet disant qu’elle ne fédère pas et qu’elle est « une girouette », et complète :
« Elle est bas de plafond et pleine de ressentiments. Cette femme n’aime ni la vie ni donc la France. Il faut redonner un espoir vrai à notre grande nation. Assez de ces Politichiens minables ! »
En 2020, il la qualifiait également de « politicienne incompétente », des propos toujours en ligne. (1)
En 2020, Guillaume Bigot critiquait fortement le RN, « pas du tout enthousiasmant » et aux « origines dégoûtantes ». Un tweet désormais supprimé. / Crédits : DR
Selon Guillaume Bigot, Marine Le Pen serait « une politicienne incompétente faisant partie du système qu'elle dénonce ». Les propos étaient toujours en ligne le 15 janvier mais ils ont été supprimés le 16 au matin. / Crédits : DR
Le bingo de l’extrême droite
« Tout dans ma vie personnelle et dans mes écrits témoignent d’un rejet viscéral du racisme, de l’antisémitisme et de l’extreme droite », écrivait-il en 2018. Mais il y a de quoi douter… L’essayiste publie des tribunes et des articles depuis 2015 dans Causeur, Valeurs actuelles ou le Figaro Vox, puis est devenu éditorialiste régulier sur CNews. Il relaie ses interventions et ses opinions dans des centaines de tweets, aujourd’hui encore en ligne. On y retrouve des thématiques récurrentes chez l’extrême droite, comme l’islamisme radical, l’immigration, le « wokisme » ou encore le prétendu « racisme anti-blanc » et « l’islamo-gauchisme »…
Il a pu également faire dans un tweet un parallèle entre l'organisation terroriste État islamique et le mouvement féministe Balance ton porc. / Crédits : DR
Il paraît que les Français « aiment prendre femme ». / Crédits : DR
Tout est digne d’un bingo. Pour lui, le grand remplacement n’existe pas mais « les banlieues révèlent bel et bien que des petits remplacements localisés sont en cours ». La colonisation serait un « un phénomène banal dans l’Histoire » et l’islamophobie, « un racisme imaginaire ». Il affirme également qu’en « faisant venir trop d’étrangers dans un pays (qu’importe leur race), on remet en cause son identité ».
Côté écologie, il enchaîne les tweets sur Greta Thunberg qu’il qualifie de « Chucky du CO₂ », une référence à un film d’horreur sur une poupée maléfique, « promue par les médias politiquement corrects pour ahurir les gens autour du bobo-écologisme ». Il critique aussi à plusieurs reprises son âge, comme dans ce tweet de 2019 :
« Les adolescents sont beaux, enthousiastes et idéalistes : autant de qualités vitales pour l’équilibre du monde mais ils ne savent rien et doivent apprendre des plus vieux. Le jeunisme actuel est un héritage caché du nazisme. »
En plus de ces comparaisons outrancières, Bigot parle aussi de « wokisme [qui] devient irrespirable », tance le « lobby LGBT »,blague sur le fait qu’on ne puisse pas faire de blague misogyne sans conséquence, critique le rappeur Médine qui ferait des rimes « pour les pisseuses et les tapettes des Inrocks » ou encore des mecs qui deviendraient des « lopettes »…
Côté écologie, Bigot enchaîne les tweets sur Greta Thunberg qu’il qualifie de « Chucky du CO2 ». En 2019, il assimile également « le jeunisme » à « un héritage caché du nazisme ». / Crédits : DR
Contacté sur son mail de l’Assemblée et via son compte Twitter-X personnel, Guillaume Bigot n’a pas répondu aux questions de StreetPress. Il avait peut-être déjà tout écrit ?
Contacté via son attaché presse, le RN n’a pas donné suite aux sollicitations de StreetPress.
(1) Le 16 janvier à 11h14, ces propos n’étaient désormais plus en ligne.
Illustration de Une par Caroline Varon.
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