En ce moment

    28/06/2013

    Street fight : pour l'amour du kick

    « On se rencontre dans un bar, on se sent, on se bat »

    Par Urbania

    Difficile de comprendre le streetfighting autrement qu'en étant dedans. Du coup, un combattant expérimenté raconte sa baston la plus mémorable... Mais attention : « l'univers du streetfighting n'a rien à voir avec Fight Club »

    16 h. Montréal, station Berri, en retournant à la maison, j’avais remarqué un gars qui mangeait à la pizzeria à l’intérieur du métro, sortie place Dupuis. Il avait l’air dur, combattant, presque militaire. Son look avait piqué ma curiosité.

    Sans réfléchir, je me suis approché de sa table et me suis invité à prendre place. Il m’a regardé m’asseoir, surpris, se demandant ce que j’allais lui dire.

    - Straight fight dans la ruelle ?

    - Tu veux te battre ?

    - Oui.

    Même si je ne le connaissais pas, je savais qu’il allait accepter. J’ai du flair pour ça. D’ailleurs, c’est souvent comme ça que les batailles commencent dans l’univers du street fighting : par un gut feeling , une intuition que l’autre pense comme soi, qu’il a le goût de se battre. Entre nous, on se reconnaît. Parfois, on n’a même pas besoin de dire qu’on est prêt. Un seul regard suffit.

    On va mettre tout de suite les choses au clair. L’univers du streetfighting n’a rien à voir avec le film Fight Club. On ne parle pas de batailles organisées dans des garages avec des gars qui prennent des paris sur le gagnant (même si ça existe à Montréal). Là, on parle de combats improvisés, qui peuvent avoir lieu à tout moment entre deux adversaires qui ne se connaissent même pas. Juste pour le kick. On se rencontre dans un bar, on se sent, on se bat. Comme ce jour-là.

    Avant d’aller dehors, je me suis quand même entendu avec lui sur les règles du jeu, qui sont toujours les mêmes pour chaque combat.

    - Un contre un, sans arme, et si l’un ou l’autre gagne et est en position de maîtriser l’adversaire, on arrête le combat.

    - OK. Mais je finis ma part de pizza avant.

    Je l’ai regardé manger tranquillement. Il n’avait pas l’air nerveux ni impressionné par mon bon mètre quatre-vingt, 86 kilos. Et j’ai compris pourquoi lorsqu’il s’est levé : il avait au moins une tête et demie de plus que moi. Mais je n’allais pas reculer à cause de sa grandeur. Surtout que c’est moi qui lui avais lancé le défi, donc bon…

    Il n’avait pas l’air nerveux ni impressionné. Et j’ai compris pourquoi lorsqu’il s’est levé

    Duel au parking En se dirigeant vers la sortie du métro, il m’a demandé si je connaissais un bon spot pour faire le combat. Je lui ai répondu que oui, qu’il y avait dehors un grand parking sur Saint-Christophe, parfait pour nous.

    Les questions qu’il me posait – et celles qu’il ne m’a pas posées quand je lui ai fait ma proposition – me laissaient croire qu’il était un habitué des combats de rue, ce qui me réjouissait et m’inquiétait en même temps. Moi, c’était loin d’être ma première bataille. D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours fait un peu de combat, organisé ou non, avec des amis ou dans des cours plus sérieux de boxe, de muay thai ou de jiu jitsu. Je ne compte plus le nombre de batailles que j’ai faites dans des ruelles.

    Ce jour-là, j’étais content d’avoir « trouvé » un combat comme ça, par hasard. En règle, en plus, c’est plutôt rare. Surtout l’après-midi. Ça se passe surtout tard le soir, après quelques bières.

    C’était le moment idéal de mettre en pratique ce que j’avais appris pendant mes entraînements d’arts martiaux… Contre un grand avec une gueule antipathique, en plus ! Jackpot . J’étais fier d’avoir eu les couilles de l’inviter à se battre, parce que s’il fallait que je gagne aux poings contre un géant, j’allais avoir une belle histoire à raconter.

    C’était le moment idéal de mettre en pratique ce que j’avais appris pendant mes entraînements d’arts martiaux…

    Pétage de gueule Rue Saint-Christophe, il y avait assez d’espace, aucun passant en vue. Tout était parfait. On s’est mis une dernière fois d’accord sur les règles du combat et on a commencé à s’observer, à s’étudier… Tout était en place. L’affrontement pouvait débuter.

    Tout est allé très vite : je lui ai balancé un coup de pied dans le ventre, il a répliqué en lançant un coup de pied que j’ai bloqué avec ma main, m’infligeant une entorse au pouce. J’étais déstabilisé, il m’a donné un coup de poing sec et violent au visage, puis un autre ; je me suis effondré.

    Le premier round était terminé : lui était debout, moi par terre. Il m’a laissé me relever et m’a demandé si je voulais continuer. Sachant que je n’avais aucune blessure majeure, j’ai accepté et on a repris nos distances comme deux boxeurs chacun dans leur coin du ring. Deuxième round.

    Il s’est élancé et a pivoté sur lui-même rapidement de façon inattendue, le bras en pleine extension, robuste et puissant ; son poing solide s’est écrasé encore dans ma face, coup fatal.

    Encore une fois, je me suis retrouvé au sol, vaincu. Il m’a tendu la main pour m’aider à me relever. Un vrai gentleman. En souriant, il m’a lancé, sorti de nulle part : « Beau combat ! On va prendre un coup ? »

    Il m’a invité à boire de la vodka sur un toit, où on s’est raconté le combat en boucle tout en faisant connaissance. Mon pouce endolori, nos contusions légères au visage et mes coudes râpés par l’asphalte seraient les seules traces de notre bataille. Malgré ma défaite, j’étais content d’avoir arrangé un combat de rue avec une personne qui m’était inconnue. Bien comme je les aime : vite fait, bien fait. Au prochain combat, je gagnerai peut-être.

    Le premier round était terminé : lui était debout, moi par terre

    bqhidden. Beau combat ! On va prendre un coup?

    Cet article est en accès libre, pour toutes et tous.

    Mais sans les dons de ses lecteurs, StreetPress devra s’arrêter.

    Je fais un don à partir de 1€
    Sans vos dons, nous mourrons.

    Si vous voulez que StreetPress soit encore là l’an prochain, nous avons besoin de votre soutien.

    Nous avons, en presque 15 ans, démontré notre utilité. StreetPress se bat pour construire un monde un peu plus juste. Nos articles ont de l’impact. Vous êtes des centaines de milliers à suivre chaque mois notre travail et à partager nos valeurs.

    Aujourd’hui nous avons vraiment besoin de vous. Si vous n’êtes pas 6.000 à nous faire un don mensuel ou annuel, nous ne pourrons pas continuer.

    Chaque don à partir de 1€ donne droit à une réduction fiscale de 66%. Vous pouvez stopper votre don à tout moment.

    Je donne

    NE MANQUEZ RIEN DE STREETPRESS,
    ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER