Le magazine d’extrême droite Livre Noir en kiosque, consacre un article au régiment de l’armée ukrainienne Azov qui compte dans ses rangs de nombreux néonazis (1). Le papier est dithyrambique :
« C’est sans doutes la force d’Azov, leur camaraderie et cet esprit de famille qui y règne. »
Glissé dans les dernières pages du périodique, l’article est signé d’un certain Xavier Maire et s’accompagne d’une série de photos qui mettent en scène ce reporter en immersion au milieu des soldats bardés de patchs en forme de croix celtiques ou du trident ukrainien, dans ce qu’il décrit comme un « bataillon ultra-nationaliste ». Ce néo-journaliste Français connaît bien Azov et les symboles néofascistes. Xavier Maire, connu aussi sous son pseudo « Henri de la Marchandise », a milité au sein de certains des groupuscules néo-fascistes les plus radicaux de France. Il a porté les couleurs du Groupe Union Défense (GUD) puis du Bastion Social Strasbourg, et a même été condamné pour des violences commises avec les Zouaves Paris pendant l’acte III des Gilets jaunes le 1er décembre 2018.
À la plage, Xavier Maire n'hésite pas à faire tomber la chemise pour montrer son tatouage de tête de mort nazie. / Crédits : Capture d'écran
Cette radicalité est même gravée sur sa peau. Comme certains soldats ukrainiens, le Français arbore sur son torse un tatouage représentant une Totenkopf, le symbole des SS. En 2018, un exemplaire de Mein Kampf avait également été retrouvé lors de la perquisition de son domicile. Il s’était alors justifié de manière assez hasardeuse :
« Chaque famille alsacienne [en] possède [un] depuis la Seconde Guerre mondiale. »
Le Strasbourgeois est également passé par les rangs du Front National il y a quelques années. Interrogé à ce propos, il déclare à StreetPress être « devenu hétérosexuel par la suite », ne préférant « pas [s’]étendre sur ce sujet ».
L'ancien militant du Bastion Social Strasbourg a également œuvré dans les rangs de l'association Solidarité Arménie, liée à la galaxie néofasciste française. / Crédits : Capture d'écran
Ses copains en Ukraine
Le séjour dont il fait le récit dans Livre Noir n’est pas son premier voyage en Ukraine. Peu de temps après le début de l’offensive russe en 2022, il a participé à un voyage humanitaire sponsorisé par le Rassemblement National et les néofascistes de l’Alvarium, fraîchement dissous. Une épopée humanitaire que StreetPress vous avait racontée au cours de laquelle il est allé rendre visite au siège d’Azov, mais aussi à Corps national, un parti nationaliste-révolutionnaire ukrainien fondé par des anciens d’Azov avec qui il semble entretenir d’excellentes relations.
Xavier Maire s'était déjà rendu en Ukraine en mars 2022, au côté du leader du groupe dissous l'Alvarium, Jean-Eudes Gannat. L'occasion de nouer des contacts. / Crédits : Capture d'écran
Lorsqu’il écrit son reportage pour le magazine d’extrême droite, Xavier Maire est de nouveau en Ukraine pour raison humanitaire, comme il le documente lui-même sur les réseaux sociaux de son association, Urgence humanitaire. Et cette fois encore, il croise des copains. Dans son éloge du bataillon Azov, Xavier Maire évoque le front d’Avdiivka, où il retrouve sur place des volontaires. Parmi eux, sur une des photos d’illustration choisies par Livre Noir, un Français. Lui non plus n’est pas un inconnu. Sticker croix celtique sur son arme, cache-cou drapeau français orné d’une fleur de lys, « Kenneth », pseudonyme du Valentinois Gwendal D., pose entouré de deux autres soldats. Xavier Maire ne s’épanche pourtant pas sur son CV dans les colonnes de Livre Noir. Le volontaire français, ex-militant du groupuscule Lyon Populaire, est un néonazi convaincu, en témoigne ses nombreux tatouages suprémacistes ou à la gloire du IIIème Reich. Il est aussi connu pour son implication dans plusieurs actions violentes dans l’Hexagone et en Europe. Un hasard sûrement.
Xavier Maire était présent en Ukraine début mars avec son association Urgence Humanitaire pour venir en aide aux soldats ukrainiens. / Crédits : Capture d'écran
Il n’est pas payé donc ça ne compte pas
Contactés, le directeur de la rédaction de Livre Noir Erik Tegnér et Xavier Maire ont préféré se réfugier dans l’ironie et les commentaires acerbes. Le premier affirme ne pas être au courant du pedigree de son collaborateur et explique avoir « donné la voix – donc il n’a pas été payé – à quelqu’un qui a fréquenté et apporté de l’aide au bataillon Azov », avant d’ironiser sur le fait d’avoir été accusé d’être pro-russe. Sur le tatouage néonazi de Xavier Maire, il répond ne pas avoir « eu le loisir de [se] promener en petite tenue avec ce monsieur » et ne pas avoir cette information pourtant disponible en ligne. Xavier Maire s’est contenté de faire des commentaires à la limite du complotisme et de l’antisémitisme, ajoutant que son tatouage est un symbole des Hussards noirs.
(1) Edit le 12/04/24 à 16h : S’il ne fait aucun doute qu’Azov compte dans ses rangs des néonazis, ils ne seraient aujourd’hui plus majoritaires. Nous avons donc reformulé.
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