« Pour fêter la nouvelle année, je te fais gagner un bon d’achat de 200€ chez mon partenaire Prozis ! » Sur son compte Instagram, « Pierrot Fou » ne manque aucune occasion de rappeler qu’il est une des égéries françaises de la marque de nutrition sportive Prozis. Le bodybuilder est une rares personnes à posséder un code de réduction nominatif pour l’enseigne internationale, leader du secteur. À chaque fois qu’un client rentre « PIERROT » sur le site, il peut bénéficier de 10% de réduction du coach sportif sur les leggings ou les compléments alimentaires de l’enseigne. Mais cet ancien chauffeur de bus, fraîchement diplômé du Centre de Ressources d’Expertise et de Performance Sportive (Creps), n’a pourtant pas les attraits d’un modèle irréprochable. De son vrai nom Pierre-Béranger Scarano, il est connu pour son militantisme néonazi, en témoigne son corps couvert de tatouages qui mêlent références au hooliganisme et au national-socialisme.
Avant de devenir homme-sandwich pour la marque portugaise, Pierre-Béranger Scarano a été le secrétaire de Blood and Honour Hexagone, une branche du réseau néonazi éponyme dont le nom est une traduction de la devise des Jeunesses hitlériennes. La section française a été dissoute en 2019 et Pierre-Béranger Scarano a été condamné en décembre 2022 à six mois de prison avec sursis et 2.000 euros d’amende pour « possession illégale d’armes » par le tribunal judiciaire de Marseille (13). Contacté, « Pierrot » tient à préciser qu’il n’a jamais « été condamné pour des activités politiques » et que cette mention sur son casier judiciaire ne relevait que d’un fait « de non-régularité sur des formalités administratives ». Le militant a aussi fréquenté le Gud Lyon puis le Bastion Social Lyon jusqu’à sa dissolution en même temps que Blood and Honour.
Sur son compte Instagram, « Pierrot Fou » ne manque aucune occasion de rappeler qu’il est une des égéries françaises de la marque de nutrition sportive Prozis. / Crédits : Capture d'écran Instagram
Suprémacisme blanc
Son engagement politique ne s’est pas arrêté avec sa reconversion en coach sportif : il a participé à de multiples reprises au service d’ordre de la manifestation néofasciste annuelle du Comité du 9 Mai à Paris, organisée par le Gud. Interrogé sur ce point, il nie toute implication « dans l’organisation du défilé » malgré les photos qu’il a lui même posté sur Instagram cette année encore, et ce alors que le défilé néofasciste a défrayé la chronique. Il s’y affiche avec un brassard « sécurité » aux côtés d’autres néofascistes – il en profite même pour caser son code -10% chez Prozis. Malgré ses dénégations, il a tout de même tenu à défendre le C9M :
« Je ne pense pas que le qualificatif de néofasciste soit adapté à un événement commémoratif du décès d’un jeune homme poursuivi par les forces de police… Ni même Bastion social et autres… »
Après la fin de Blood & Honour Hexagone, Pierre-Béranger Scarano s’est aussi lancé dans la mode, avec sa marque de vêtements 9pursang, dont le nom est une référence suprémaciste à un supposé « pourcentage de blancs » dans le monde dans les années 1990. Marque pour laquelle il enchaîne les posts sur son compte Instagram où il vend à la fois son business de coaching, ses t-shirts néonazis et suprémacistes et… ses 10% de réduction pour Prozis (1).
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Face aux questions de StreetPress, Pierre-Béranger Scarano a répondu que tout cela était « bien loin derrière lui » et qu’il n’avait « plus aucun engagement militant depuis de nombreuses années ». Son dernier post faisant référence au suprémacisme blanc date pourtant du 9 décembre 2023.
Le bodybuilder est une rares personnes à posséder un code de réduction nominatif pour l’enseigne internationale, leader du secteur. À chaque fois qu’un client rentre « PIERROT » sur le site, il peut bénéficier de 10% de réduction. / Crédits : Capture d'écran Instagram
Islamophobie et féminisme identitaire
Scarano n’est pas le seul faf sponsorisé par la marque. Alice Cordier était pendant plusieurs années égérie de Prozis. Mais la fondatrice et présidente du collectif Némésis – groupe fémonationaliste qui utilise le féminisme pour justifier son racisme et son nationalisme – ne semble plus soutenue par la marque depuis peu.
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C’est l’influenceuse Mila Orriols, dont elle est proche, qui a noué un partenariat très récemment avec la marque portugaise. En 2020, âgée alors de 16 ans, elle fait un live sur son compte Instagram et subit des propos misogynes et lesbophobes de la part d’un internaute. Elle répond par une story, largement repartagée, où elle tient des propos islamophobes, entraînant une violente vague de cyberharcèlement massive à son encontre. Une séquence médiatique nationale s’ouvre autour de « l’affaire Mila », entre lutte contre le cyberharcèlement, « droit au blasphème » et récupération politique.
C’est l’influenceuse Mila Orriols, proche d'Alice Cordier, qui a noué un partenariat très récemment avec la marque portugaise. / Crédits : Capture d'écran Instagram
Mila Orriols, suivie aujourd’hui par plus de 55.000 personnes sur X-Twitter et 47.000 sur Instagram, se consacre désormais à son quotidien d’influenceuse, principalement sur le second réseau. Elle y relaie des posts de Marion Maréchal ou de Stanislas Rigault, publie régulièrement des posts sur « les racailles » et affiche très fréquemment son soutien au collectif Némésis.
L’influenceuse s’est lancée récemment dans le bodybuilding, soutenue au début par la marque de nutrition MyProtein. Celle-ci a mis fin à leur collaboration début décembre, affirmant que « certaines publications en ligne [de Mila] ne sont pas en accord avec [leurs] valeurs ». Qu’à cela ne tienne : la Lyonnaise est devenue un des nouveaux visages français de Prozis mi-décembre. Elle a désormais son code promo nominatif et enchaîne les stories promouvant une offre spéciale pour les fêtes ou des concours de Noël.
La Lyonnaise est devenue un des nouveaux visages français de Prozis mi-décembre. Elle a désormais son code promo nominatif. / Crédits : Capture d'écran Instagram
Des partenariats pas hasardeux
Les choix de partenariats de Prozis ne doivent clairement rien au hasard. Miguel Milhao, le fondateur de la marque, a pris des positions très droitières ces dernières années. Le Portugais soutient ainsi la fin du droit à l’avortement aux États-Unis où il vit, affirmant que les « fœtus avaient regagné leurs droits aux États-Unis » après la décision de la Cour Suprême en juin 2022.
Pour autant, Prozis assume peu ses égéries. Sur les réseaux sociaux de la marque, aucun influenceur n’est mis en avant, et on ne voit le visage d’aucun des mannequins sur les posts promotionnels, malgré les efforts des radicaux qui souhaitent vendre leur code promo.
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(1) Après les questions de StreetPress, le compte Instagram de la marque est passé en privé.
Contactée, l’entreprise Prozis n’a pas répondu à nos sollicitations concernant le processus de sélection de leurs égéries. Alice Cordier et Mila Orriols n’ont pas non plus répondu à nos solicitations.
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