La photo n’est pas de très bonne qualité. Elle a été prise la veille du match PSG-Lyon, le 18 septembre dernier. Sur le cliché, plus d’une centaine de supporters qui se revendiquent du Kop of Boulogne (KoB) pose fièrement. Ils se sont réunis pour se battre avec des Lyonnais. Ces derniers, en infériorité numérique, ont préféré reculer comme ils l’expliquent le lendemain sur les réseaux sociaux.
Jusqu’en 2010, plusieurs associations réunies sous le nom de KoB occupaient la tribune Boulogne du Parc des Princes. Dans leurs rangs, plusieurs groupuscules ouvertement néonazis, comme le Pitbull Kop de Serge Ayoub. La forte mobilisation de gros bras se revendiquant du KoB, ce 18 septembre, pourrait-elle être les prémices d’un retour du dans les travées du Parc ? Du côté de la préfecture de police, on botte en touche : « Ce sujet est confidentiel. »
Sur cette photo prise la veille du match PSG-Lyon, le 18 septembre dernier, des supporters se revendiquent du Kop of Boulogne (KoB). Ils se sont réunis pour se battre avec des Lyonnais. / Crédits : StreetPress
Des tentatives
Théoriquement, le KoB n’est plus en activité depuis le début le plan Leproux (2010). Une « pacification » du Parc des Princes mise en place suite à la mort de Yann Lorence (membre de Boulogne) lors d’une bagarre avant un PSG-OM. Mais il a refait surface épisodiquement. En 2018, ils repointent le bout de leur nez, avant un déplacement à Bordeaux pour la finale de la Coupe de la Ligue. Le Kop of Boulogne ranime alors la rivalité avec Auteuil et appelle ses anciens membres et sympathisants à se déplacer massivement. Le communiqué précise avec une dose d’orgueil :
« Ceci n’est en aucun cas un appel à la violence. Trop de personnes de chez nous ont payé cher par le passé. Nous voulons une démonstration de force. Montrer et rappeler à certains qui nous avons été, et qui nous restons : en un mot, les meilleurs. »
Ils se reforment pour des fights
Depuis, certains s’affichent sur les réseaux et posent avec le drapeau du Kop, un pitbull sur fond tricolore. Chaque année, une poignée organise également un tournoi de foot. Mais surtout, le groupe renaît non pas en tribune mais comme collectif de fights pour aller échanger des coups de poings avec des groupes hooligans, dans des bastons organisées et codifiées. À huit ou 14, ils se bagarrent contre des groupes français ou étrangers. Rien que sur cette année, le KoB a participé à au moins six bastons sous l’étendard de la team « Jeunesse Boulogne ». La dernière date du 25 septembre face à un groupe de Rotterdam. Résultat : défaite des Parisiens.
Le groupe se reforme en collectif de fights pour aller échanger des coups de poings avec des groupes hooligans, dans des bastons organisées et codifiées. / Crédits : StreetPress
Dans cette équipe, on retrouve des hooligans d’extrême-droite néonazis bien connus de StreetPress. Notamment le leader des Zouaves Marc de Cacqueray de Valmenier, multicondamné par la justice et présent lors du fight avorté contre les Lyonnais. Ou son comparse Hadrien M., ancien responsable du Gud Paris et habitué de groupes d’indeps (autre nom pour les hooligans) du Paris FC. Il y a aussi des membres de la Milice, des « hooligans de l’ancienne tribune Boulogne » selon les services de renseignement, un groupe dissous par le gouvernement en avril 2010. On retrouve aussi la petite troupe dans les manifestations contre le pass sanitaire. Le 4 septembre dernier, ils ont ainsi garni les rangs d’un « white bloc » de 200 nationalistes. Ou le 11 septembre, où ils ont affronté et selon eux repoussé, des militants antifascistes.
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Parfois, les hools sont renforcés par des équipes venues de province composées notamment d’anciens alliés du KoB, comme les supporters Toulousains du Viola Front qui ont garni les rangs parisiens face au Lyonnais. À l’inverse, ils vont aussi soutenir des groupes amis. La veille du non-fight avec les Rhodaniens, Marc de Cacqueray de Valmenier était à une baston avec les MesOs Reims – un autre groupe hooligan d’extrême droite aux multiples frasques – face aux Belges de Molenbeek. Le groupe néonazi pourrait avoir rejoint le KoB le lendemain.
Cette année, le KoB a participé à au moins six bastons sous l’étendard de la team « Jeunesse Boulogne ». / Crédits : StreetPress
Dans cette équipe, on retrouve des hooligans d’extrême-droite néonazis. Sur cette photo, un membre du groupe porte un masque d'Adolf Hitler. / Crédits : StreetPress
Des anciens à Boulogne
Mais viennent-ils au Parc des Princes, le stade du PSG ? Aucun groupe n’affiche les couleurs du Kop of Boulogne dans les travées parisiennes. Viennent-ils plus discrètement ? « Les Zouaves ne sont jamais allés au Parc des Princes », assure un observateur de cette mouvance. Globalement ceux qui participent aux fights n’ont jamais été signalés dans les tribunes du Parc. Par contre, on retrouve bien des anciens du KoB.
Au sein de l’enceinte parisienne, le premier groupe ultra à avoir réinvesti le Parc est le Collectif Ultras Paris (Cup). Ils occupent une partie de la tribune Auteuil. Dans leurs rangs, pas d’anciens membres du KoB. Le Cup a été suivi par trois groupes côté Boulogne : le Block Parisii en 2017, les Paname Rebirth l’année suivante et la Résistance parisienne en 2019. « Le club ne nous autorise pas vraiment, ils nous tolèrent », explique Nolan, président de la Résistance parisienne, apolitique. Des anciens du KoB se sont encartés dans ce dernier groupe « car le Parc leur manquait », estime Nolan. Le club est au courant. « Ils nous ont dits que ce n’est pas leur problème. Si un ancien qui est chez moi fout la merde, c’est mon groupe qui prend, c’est à moi de gérer ça », précise le vingtenaire, qui a beaucoup de respect pour le Kop of Boulogne :
« Actifs ou non, ça reste “leur tribune”. Ils sont là depuis le début du PSG et ils ne lâcheront pas Paris. Mais revenir à Paris sous le nom de KoB, ça risque d’être compliqué. »
Les trois groupes se sont lancés dans la tribune Boulogne avec le même objectif : redonner deux virages qui chantent au Parc des Princes. Au total, ils sont entre 150 et 200 à chaque match pour répondre aux chants lancés par le Cup en face. « On est obligé de s’allier à trois groupes pour faire bouger les gens. Si on fait ça chacun de notre côté, on n’y arrivera jamais », détaille Nolan.
Il n’y a en tout cas plus de rivalités entre les deux tribunes. Auteuil et le Cup « ont très bien compris qu’on n’était plus de la même génération », précise Nolan. Mais être ultra dans ce virage est un lourd fardeau :
« L’étiquette de Boulogne reste compliquée à porter. Il faut qu’on respecte le travail des anciens et qu’on montre au club qu’on ne va pas dans certaines mentalités de l’époque. »
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