En ce moment

    09/03/2016

    4 incendies en 4 jours

    Des sans-papiers en colère mettent le feu au centre de rétention du Mesnil-Amelot

    Par Tomas Statius

    Depuis samedi 5 mars, les incendies volontaires se multiplient au centre de rétention du Mesnil-Amelot (77). 2 sans-pap’ en rétention ont été blessés. Selon la Cimade, le « climat anxiogène » dans ces centres expliquerait ces tensions.

    Ce mercredi 9 mars, quand on lui passe un coup de bigo, Fawzi est toujours au centre de rétention de Mesnil-Amelot :

    « Depuis ce week-end, on a le moral dans les chaussettes… ».

    Entre le samedi 5 mars à midi et le lundi matin suivant, 4 incendies ont pris dans plusieurs ailes du centre de rétention, à chaque fois déclenchés par des sans-papiers en rétention. Un début de psychose s’installe dans les allées du centre. Fawzi raconte :

    « Mon pote, il est traumatisé par la situation. »

    Bon samaritain

    Aux côtés de Fawzi, Essah attend que son pote fasse l’interprète. Le jeune marocain de 31 ans a été témoin de la scène. Il ne parle pas très bien français. Ce samedi, Essah était devant le réfectoire quand le feu prend dans l’une des chambres du CRA. « C’était le bâtiment africain » remet Fawzi. Ni une, ni deux, Essah court au secours des 2 pensionnaires encore coincés dans les flammes :

    « Il est parti en courant. Il n’a pas réfléchi. »

    Dans la chambre, 2 hommes gisent, inconscients. Essah les aurait trainés jusque dans le couloir avant l’arrivée des secours, bien aidé par un officier de police. « C’est un héros, il a mis sa vie en danger pour sauver des gens. Il les a sortis de l’incendie », conclut Fawzi avant que l’enthousiasme ne retombe brusquement :

    « Tu vois comment il est récompensé ? Il est toujours enfermé. »

    Les circonstances restent floues

    Au Mesnil-Amelot, plusieurs jours après cette série d’incendies, les explications restent plutôt floues. Ce qui est sûr, c’est que samedi en début d’après-midi, 2 jeunes camerounais ont mis le feu à leur matelas : « Ils avaient des vols prévus [pour les renvoyer dans leur pays d’origine, ndlr.] dans les prochains jours » explique Alice Dupouy, responsable rétention pour l’asso La Cimade. Envoyés à l’hosto avant d’être placés en garde à vue à Chessy (77), ils ont écopé respectivement de 6 mois et un an de prison ferme au tribunal correctionnel de Meaux.

    Le lendemain c’est vers 20 h que le feu reprend dans un autre bâtiment du CRA. Rebelote dans la nuit de dimanche à lundi où 2 incendies se déclarent simultanément sur les coups de 3 heures du matin. « On a rien vu, on était en train de dormir », explique Fawzi au téléphone. En tout, 3 bâtiments sont endommagés. Certains sans-papiers ont été relogés dans une aile mal chauffée. Et suite à l’incendie, la maréchaussée a retiré le droit de visite aux pensionnaires du CRA ainsi que la possibilité de se faire amener des vivres. Dans ces conditions, pas facile pour les assos de faire leur taf :

    « Quand on est allé discuter avec eux, c’était plutôt tendu. »

    Ce n’est pas une première

    « Ça nous pendait au nez », lâche finalement Alice de la Cimade. En rétention, ces incendies ne sont pas une nouveauté. Depuis 2008, la Cimade a recensé « au moins 10 incendies » de centres de rétention. Pour Alice, les raisons de ces départs de feu sont multiples :

    « Le climat ici est anxiogène : l’attente de l’expulsion, les avions qui passent au-dessus de leur tête, la visite au juge des libertés et de la détention … Souvent quand ils arrivent ici, ils ont l’impression que c’est fini. Certains en ressortent assez traumatisés. »

    Cet article est en accès libre, pour toutes et tous.

    Mais sans les dons de ses lecteurs, StreetPress devra s’arrêter.

    Je fais un don à partir de 1€ 💪
    Sans vos dons, nous mourrons.

    Si vous voulez que StreetPress soit encore là l’an prochain, nous avons besoin de votre soutien.

    Nous avons, en presque 15 ans, démontré notre utilité. StreetPress se bat pour construire un monde un peu plus juste. Nos articles ont de l’impact. Vous êtes des centaines de milliers à suivre chaque mois notre travail et à partager nos valeurs.

    Aujourd’hui nous avons vraiment besoin de vous. Si vous n’êtes pas 6.000 à nous faire un don mensuel ou annuel, nous ne pourrons pas continuer.

    Chaque don à partir de 1€ donne droit à une réduction fiscale de 66%. Vous pouvez stopper votre don à tout moment.

    Je donne

    NE MANQUEZ RIEN DE STREETPRESS,
    ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER