Quentin rêvait, comme pas mal d'entre nous, d'ouvrir un bar. Sauf que lui va y parvenir. Entre le bon vouloir des banques, la nécessité de s'associer et la recherche du lieu, le parcours est loin d'être une promenade de santé.
« De toute façon, on va tous quitter nos boulots de merde, et puis on ouvrira un bar à San Francisco ! » « Ouais, et puis ce sera aussi une médiathèque et on vendra des sandwich trop cool ! » « Et une agence de détectives en même temps que le bar ? » Qui n’a pas, après un ou plusieurs verres, imaginé racheter un bar ? Un monde où les litres de bière couleraient à flots – et gratuitement, en plus. Un café/bar ultra vivant, avec de la bonne musique. Le bar comme échappatoire face à la pression du boulot.
Sauf que vous n’avez pas quitté votre job, et nous non-plus. Quentin, lui, a franchi le pas. Il nous raconte, à la première personne, comment et pourquoi il a eu envie d’ouvrir un bar dans Paris.
Fuir les horaires de bureau « Vers mes 25 ans, comme tout le monde, j’ai commencé à me dire que j’allais acheter un bar. J’aimais – j’aime toujours – beaucoup sortir, ça me semblait logique. Mais je me suis vraiment dit que j’allais le faire il y a deux ans, quand j’ai eu 32 ans. Ça faisait dix ans que je bossais au même endroit, dans une compagnie aérienne où j’ai gravi pas mal d’échelons. Mais là, j’en avais ras-le-bol. C’est plutôt « bien tombé », si on peut dire ça comme ça, mais ma boîte nous a lourdé, moi et pas mal de collègues, pile à ce moment-là, pour des raisons économiques. Ça faisait des années que je bossais énormément, avec des horaires complètement décalés, je me suis dit que quitte à faire de gros horaires, autant monter mon propre projet. Je me voyais pas dans un bureau, c’est pas pour moi, cette vie-là. Je ne suis pas quelqu’un de posé, il me faut du mouvement, des rencontres. Alors pourquoi pas réellement acheter un bar ?
J’ai commencé par faire une (bonne) formation du Pôle emploi pour mieux saisir la gestion et la création d’une entreprise. La première question, très clairement, c’est : quel va être mon apport ? Est-ce que je vais mettre assez sur la table pour que la banque me prête le reste ? Les premières semaines, tout était assez confus. Il y a ceux qui te disent que les banques sont très frileuses, d’autres qui m’assuraient qu’elles adoraient les ouvertures de bars. Un jour, je m’imaginais que ça allait être très simple, un autre, je me demandais dans quoi je m’étais embarqué.
Vers mes 25 ans, comme tout le monde, j’ai commencé à me dire que j’allais acheter un bar
Le sacro-saint apport Perso, pour pouvoir financer mon futur bar, j’ai d’abord compté sur mes indemnités de licenciement. Sauf que le souci, c’est que deux ans après, on n’a pas réussi à s’entendre avec mon ex-boîte. Nous, les anciens salariés, on a gagné notre procès aux prud’hommes, mais l’entreprise a fait appel et tu vois, je ne connais même pas encore la date de l’appel… Donc j’attends toujours mes indemnités. Du coup, j’ai vendu mon appart à Paris.
Et puis j’ai cherché des associés. Ma règle de base, c’était de ne pas inclure ma famille dans mon projet. Ni chercher un mécène ou quelqu’un qui mette des ronds dans mon projet. Pas parce que je refuse systématiquement toute aide, mais je voulais avoir les coudées franches pour faire ce que je voulais. Pour ne pas recevoir d’ordre.
Concrètement, pour que t’aies une idée, j’ai failli signer pour un bar il y a quelques semaines, tout près de la station de métro Goncourt (pas loin de République, ndlr). Le bail de commerce me coûtait 250.000 €, la banque me demandait un apport de 90.000 €. Et encore, nous, on cherche une « petite affaire ». Après, tout dépend du quartier, de la clientèle, du fonctionnement du bar que l’on reprend. Il n’y a pas de règle.
Sachant qu’en plus du bail de commerce (également appelé la licence, ndlr), il faut que tu comptes aussi que tu vas devoir payer le matériel – tu rachètes aussi, en plus, les chaises, les verres etc… Et puis tu dois ensuite un loyer mensuel à celui ou celle qui possède les murs, comme pour ton appart’. Autrement dit, tu dois payer et ceux qui tenaient le bar avant toi, et le propriétaire des murs. Il y a très peu de bars qui possèdent aussi les locaux, parce que cumuler les deux achats, c’est hors de prix.
Pareil, il n’y a pas de moyenne du prix de la licence : tout dépend de la ville, du quartier, de la clientèle. C’est très variable. Ça va de 2.000 € dans une toute petite ville à des sommes astronomiques à Paris. À Saint-Tropez, la moyenne se situe autour de 100.000€.