Vendredi 27 septembre, deux militants d’extrême droite ont passé à tabac un syndicaliste étudiant qui avait recouvert un sticker de la Cocarde à l’université d’Assas. La victime, qui a eu deux dents cassées et neuf jours d’ITT, a porté plainte.
« Je leur hurlais d’arrêter pendant qu’ils me tabassaient et m’insultaient », se souvient Axel (1), étudiant à l’université Paris 2 Panthéon-Assas. Vendredi 27 septembre, alors qu’il sortait de cours, il a été passé à tabac par deux militants d’extrême droite en pleine rue. Suite à l’agression, le vingtenaire a eu deux dents cassées, quatre points de suture, et s’est vu prescrire neuf jours d’ITT. Il a porté plainte.
À 11h50, alors qu’il sort du centre universitaire de la rue d’Assas, dans le sixième arrondissement de Paris, Axel se retrouve nez à nez avec une dizaine d’hommes qui distribue des tracts appelant à un rassemblement organisé par plusieurs groupuscules d’extrême droite suite au viol et au meurtre d’une jeune femme de 19 ans, Philippine, quelques jours plus tôt. Habitué, l’étudiant refuse le tract d’un signe de tête, et s’éloigne des militants qui encadrent le trottoir. Quelques mètres plus loin, il aperçoit un sticker du syndicat étudiant d’extrême droite la Cocarde collé sur un panneau de signalisation, et décide de le recouvrir d’un sticker antiraciste, comme il le fait souvent à cet endroit.
Immédiatement, l’un des militants qui tractaient vient l’interroger d’un ton agressif sur ses motivations. « Je lui ai dit que je n’avais rien à lui dire, et j’ai commencé à partir », raconte Axel auprès de StreetPress. « Il m’a mis un coup d’épaule, mais pas violent, et je l’ai dépassé. » Quelques insultes fusent derrière lui, « baltringue », « connard », qu’Axel ignore. Le jeune homme envoie un message qui résume la scène sur la conversation WhatsApp de son syndicat, Solidaires étudiant·es Assas, et avance dans la rue Vavin, en direction de la station de métro. « J’ai dépassé le café Vavin, avec le sentiment d’être suivi. J’ai à peine eu le temps de me retourner, de les apercevoir et de me dire que je devais me réfugier dans une boutique. » L’étudiant n’a pas le temps de passer le pas de la porte : il est propulsé par terre par deux militants d’extrême droite qui ont fondu sur lui et le rouent de coups. Il souffle :
« Instinctivement, je me suis recroquevillé pour essayer de me protéger, mais ça n’a pas suffi. »
Une agression à visage découvert
Pendant une longue minute, les coups pleuvent, presque systématiquement sur son visage, alors que les deux militants d’extrême droite l’invectivent et l’insultent. « Ils me disaient : “Tu vas comprendre”, “Fallait pas coller ce sticker”, alors que je leur hurlais d’arrêter. À un moment, l’un des deux m’a relevé pour me coller une droite particulièrement forte sur la pommette, puis une autre sur la bouche », explique Axel. Le coup lui casse deux dents, et lui ouvre la lèvre. « Au bout d’une minute, ils me lâchent, et partent en courant vers le boulevard Raspail. » Un commerçant sort de sa boutique, des passants s’arrêtent pour aider Axel, appeler la police et les pompiers. Il est transféré à l’hôpital. Son visage est couvert d’hématomes, sa lèvre ouverte nécessite quatre points de suture. Après une pose temporaire de résine sur ses dents cassées, les médecins prescrivent à Axel neuf jours d’ITT.
À la suite de son agression, le syndicaliste étudiant vingtenaire a porté plainte. / Crédits : DR
Choqué par l’agression, Axel a porté plainte pour violences. « Entre les caméras de la fac, celles de la rue Vavin et celles des boutiques, j’espère que la police réussira à identifier mes agresseurs » explique-t-il. « Aucun n’était masqué, ce qui est rare lors d’agressions par l’extrême droite. » Contactée, la Cocarde étudiante Assas n’a pas répondu à nos sollicitations.
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La Cocarde, syndicat préféré du Rassemblement national
L’université Paris 2 Panthéon-Assas a longtemps été un bastion de l’extrême droite, y compris la plus radicale. C’est là que naît le Groupe union défense en 1968. Un nom utilisé par les nervis d’extrême droite depuis, et derrière des dizaines d’agressions. « La situation est tendue depuis toujours », reprend un ancien étudiant de l’université, « mais les exactions commises par le Gud sous l’étiquette Waffen-Assas en 2023 ont remis une couche ». Pendant le mouvement de lutte contre la réforme des retraites, un groupe au nom rassemblant la Waffen-SS et son université avaient attaqué des cortèges et des étudiants d’Assas, de l’ENS ou de Panthéon-Sorbonne. « Après l’agression de vendredi, on a peur d’une attaque similaire sur notre cortège étudiant lors de la manifestation intersyndicale du 1er octobre », s’inquiète un syndicaliste. « Assas a toujours été une fac sous tension à cause de l’extrême droite, mais pourtant l’université ne réagit presque pas. »
C’est aussi à Assas que naît en 2015 la Cocarde étudiante, d’une scission avec l’Uni, le syndicat de droite extrême. Très vite, celle-ci devient l’organisation étudiante préférée du Rassemblement national, qui y recrute militants et cadres pour son organe de jeunesse, le RNJ, assistants parlementaires, un eurodéputé depuis l’élection de Pierre-Romain Thionnet en juin dernier, et d’un député avec celle de Julien Limongi en juillet. Le syndicat étudiant comme le parti de Marine Le Pen nient systématiquement la participation de certains de leurs militants à des actions violentes, ou leurs liens avec des organisations d’extrême droite violentes comme le Gud.
L’agression d’Axel n’est pas la seule tentative d’intimidation de syndicalistes étudiants par l’extrême droite de ce vendredi à Assas. En fin de journée, alors qu’elle s’apprêtait à quitter l’université, Marie (1), une autre militante de Solidaires Assas, aperçoit deux hommes qui semblent attendre quelqu’un devant l’université. L’un d’entre eux la fixe. Sur son bras, elle repère un brassard orné d’une croix celtique – un symbole classique de l’extrême droite violente, notamment utilisé par le Gud.
(1) Les prénoms ont été modifiés.