Ré-écoutez l’émission
Cliquez sur le player pour écouter l’intégralité de l’émission :
Le résumé de l’interview en vidéo
Le grand public a entendu parler du Parti Pirate pendant les élections législatives, vous avez présenté plus de 100 candidats, vous étiez une des attractions des médias… Comment ça va, 6 mois après cette célébrité soudaine ?
Aujourd’hui, on essaie de développer un travail de fond. On a réussi ce pari, avec très peu de moyens financiers et aucun permanent, d’avoir une visibilité importante. On a fait ce pari de présenter plein de candidats en leur disant « faites une campagne avec 0 euro » et ça a marché : on a réussi à avoir un écho médiatique important. Maintenant il faut développer des propositions, des idées. Il y en a plein sur nos forums mais il faut les synthétiser.
Vous êtes né le 5 octobre 1985. Le premier mot que vous avez prononcé était « IP ». A l’âge de 4 ans, vous piratez votre premier Minitel, puis vous trouvez le premier code pour hacker des jeux Super Nes. A 13 ans, vous créez votre premier logiciel libre en cours de techno devant votre prof médusé. Vous avez rejoint le Parti Pirate en 2009 à l’âge de 23 ans, dont vous avez été le premier candidat à se présenter à une élection – des législatives partielles. Vous l’avez co-présidé jusqu’à fin octobre… Quel est le vrai et le faux de cette biographie ?
Non, non je ne suis pas un hacker ! Je ne sais pas où vous avez trouvé toutes vos informations ! Par contre, la fin est vraie. Moi je fais de l’informatique, je m’y connais un petit peu mais je ne suis pas un hacker, je ne me suis pas introduit dans le système du Pentagone.
Comment passe-t-on de la passion pour un hobby, le hacking au sens bidouille, à un engagement politique ?
J’ai rejoint le Parti Pirate parce que je m’opposais à la loi Hadopi. Concrètement, on voit qu’aujourd’hui, ça ne marche pas. En plus, l’objectif est mauvais en soi : empêcher les gens d’écouter librement la musique. Alors que plus les gens écoutent de la musique, plus ils la partagent, plus ils vont se retrouver à aller à un concert. Le partage est positif, on a des moyens pour démultiplier les capacités de partage. Et au lieu de le faire, on va essayer de protéger un système qui donne un monopole à quelques entreprises comme Apple ou Amazon qui empochent tout l’argent au détriment de l’artiste.
La loi Hadopi vous a marqué dans votre chair puisque vos parents en ont fait les frais….
Les premières personnes à avoir reçu un avertissement Hadopi, c’était mes parents ! Et je suis bien placé pour savoir que c’est complètement faux ! C’est quelqu’un qui a récupéré un identifiant pour se connecter à distance. Une personne totalement innocente peut se retrouver à être condamnée par Hadopi, parce qu’elle s’est fait voler son accès.
div(border). La Matinale Politique
Chaque lundi à 19h, la « Matinale Politique » vous donne rendez-vous pour parler politique… en se prenant la tête mais pas trop quand même. L’émission est diffusée en direct sur Radio Campus 93.9FM et en streaming sur StreetPress. Retrouvez le podcast de l’émission en cliquant ici.
Je ne suis pas un hacker
Un de vos slogans, c’est « nos idées vous plaisent, hackez-les ! » Mais vous voulez vous saborder, c’est ça ?
Le but premier du Parti Pirate ce n’est pas de prendre le pouvoir. On n’est pas un parti de gouvernement, on n’a pas réponse à tout. On est là pour mettre en avant des idées pas suffisamment défendues. Si on est élu, on jouera le jeu des propositions. Mais ce n’est pas l’objectif en soi. L’objectif c’est que les propositions soient votées par ceux qui ont le pouvoir, que les bonnes idées soient adoptées.
En fait, c’est de la philosophie que vous essayez d’insuffler à la vie politique…
Oui, c’est vraiment une réflexion de fond. On considère qu’on ne peut pas mettre de protection sur des idées. Si c’est une chanson, on peut librement la chanter dans la rue. Si c’est un processus industriel, il ne faut pas qu’on nous empêche de fabriquer des médicaments à bas coût dans le 1/3 monde… C’est une réflexion de fond sur un ensemble de choses qui fonctionnaient il y a 100 ans, on a créé le brevet à une époque où innover était complètement différent. Mais aujourd’hui les brevets, c’est une entrave complète à beaucoup de choses. Les brevets de logiciel, par exemple aux Etats-Unis, ça empêche les entreprises d’innover parce qu’elles violent forcement plein de brevets et se retrouvent avec plein de procès. Il faut repenser le système.
Si je vous donne ce masque d’Anonymous, est-ce que vous acceptez de le mettre ?
Oui. On approuve la plupart du temps les actions d’Anonymous. La grosse différence entre Anonymous et le Parti Pirate, c’est qu’Anonymous est un mouvement de protestation, avec des manifestations en ligne, alors que le Parti Pirate a vocation à proposer des lois pour arrêter les abus que dénoncent les groupes d’Anonymous. On est complémentaire.
Vous préférez le clivage « droite/gauche » ou le clivage « 1 % vs 99 % » pour reprendre le célèbre mot d’ordre des indignés ?
On essaie de se tenir en dehors du débat droite/gauche. Ce qui est intéressant avec les indignés, c’est que ce n’est pas récupéré par une mouvance politique. Les grands enjeux ne sont plus tant dans des rapports gauche/droite mais dans le rapport à l’évolution du monde, aux échanges entre les pays, les continents… Il y a un accord entre les grands partis de droite ou de gauche sur ces questions, et ce ne sont pas forcément les positions sur lesquelles sont les membres du Parti Pirate. Oui, « 1% VS 99% » ça se rapproche.
Vous croyez encore à la démocratie représentative ?
La démocratie représentative ne répond plus à un certain nombre de choses, elle n’est pas efficace. On conteste ce système. En même temps on ne veut pas basculer dans la démocratie directe, puisque tout le monde n’a pas les moyens de participer à tous les débats. On réfléchit à des théories comme la démocratie liquide où tout le monde peut participer sur les thèmes qui l’intéressent et en même temps déléguer son pouvoir de citoyen ou d’adhérent du Parti Pirate à un autre membre de la plateforme.
Le but premier du Parti Pirate ce n’est pas de prendre le pouvoir
Les brevets c’est une entrave complète à beaucoup de choses
Vous intéressez aussi beaucoup l’extrême-droite radicale, toujours très à la pointe quand il s’agit de dénoncer la confiscation de la démocratie par les élites. Vous-même, vous avez donné un long entretien à Novopress, le site du Bloc Identitaire. Ce n’est pas gênant d’avoir la même conception de la démocratie que ces gens-là ?
Pour l’interview au site de Novopress, j’avais répondu à un journaliste et je n’avais pas fait attention à l’organe de presse. Je ne suis pas sûr que je l’aurais fait, autrement. On défend des idées qui peuvent être très proches d’idées de l’extrême-droite sur certains points. En même temps, on n’est pas du tout dans la même optique. À la dernière AG, on a voté une mesure sur les frontières de l’Europe. On est dans une réflexion où on ne veut pas s’enfermer en France, dans des traditions, des valeurs… Nos valeurs, ce sont plus les droits de l’homme. On critique l’Europe des partis de gouvernement, mais on ne veut pas casser ce mouvement qui doit absolument se produire. On veut construire une Europe qui serait plus démocratique.
Vous avez mené campagne pour les législatives autour de ces thèmes dans 101 circonscriptions. Vous avez obtenu moins de 1 % des voix. Est-ce que cette expérience est un échec ?
Non. 1%, c’est une moyenne qui inclut tous ceux qui ont fait campagne avec 0 euro, sans bulletin de vote, où les électeurs devaient les imprimer. Mais ceux qui ont fait une vraie campagne avec des moyens – bon il y en a peu, il fallait 3.000 ou 4.000 euros, ceux-là font les meilleurs scores parmi les petits partis. On n’est pas très loin du MoDem ou d’Europe Ecologie, quand ils ne sont pas soutenus par les socialistes. C’est vraiment très prometteur, mais il nous manque des sous.
Vous n’avez pas eu assez de suffrages pour obtenir une subvention de l’Etat. Comment le parti peut s’installer dans le paysage sans cette rente ?
L’objectif de 50 circonscriptions à 1%, ce n’était absolument pas dans nos prévisions. En partant, on espérait avoir une dizaine de candidats ! On était très heureux d’avoir plus de 100 candidats qui se sont présentés, et on a été agréablement surpris de voir que 20 d’entre eux ont dépassé ce seuil des 1%. Il y a beaucoup de partis d’extrême gauche, bien connus, qui ont présenté des candidats à la présidentielle et qui n’ont pas atteint ce seuil.
Pourtant vos collègues européens, en Allemagne et en République Tchèque notamment, ont réussi des bons scores qui les ont crédibilisés…
Oui, bien sûr. Mais notre objectif, c’était de nous faire connaître. Dépasser un seuil critique en France, c’est beaucoup plus compliqué. En Allemagne ils ont un système à la proportionnelle, il y a très peu de barrières à l’entrée pour les petits partis. En France, pour faire campagne pour les européennes, il faut qu’on trouve 500.000 euros d’ici à 2014. Toucher le financement public, c’est très difficile. C’est un cercle vicieux : tant qu’on n’a pas d’argent, on ne peut pas faire campagne et tant qu’on ne fait pas campagne on n’a pas de résultats, et tant qu’on n’a pas de résultats, on n’a pas d’argent !
Et vous n’avez pas de généreux donateurs ?
On en a quelques-uns. Mais on compte plus sur le nombre, essayer de convaincre plus de personnes qui peuvent mettre 10 euros. Ça peut jouer.
Vous allez présenter des candidats aux municipales ?
On n’a pas tranché là-dessus. Il y a des partisans qui sont pour présenter des listes indépendantes, d’autres des listes pluralistes. Il faut savoir qu’aux municipales, il faut être facilement plusieurs dizaines de candidats qui résident dans la ville. C’est très difficile de créer une liste pirate autonome. Et s’allier à une liste avec toutes nos réserves, c’est compliqué.
On défend des idées qui peuvent être très proches d’idées de l’extrême droite sur certains points.
bqhidden. Il faut qu’on trouve 500.000 euros d’ici à 2014
Cet article est en accès libre, pour toutes et tous.
Mais sans les dons de ses lecteurs, StreetPress devra s’arrêter.
Je fais un don à partir de 1€Si vous voulez que StreetPress soit encore là l’an prochain, nous avons besoin de votre soutien.
Nous avons, en presque 15 ans, démontré notre utilité. StreetPress se bat pour construire un monde un peu plus juste. Nos articles ont de l’impact. Vous êtes des centaines de milliers à suivre chaque mois notre travail et à partager nos valeurs.
Aujourd’hui nous avons vraiment besoin de vous. Si vous n’êtes pas 6.000 à nous faire un don mensuel ou annuel, nous ne pourrons pas continuer.
Chaque don à partir de 1€ donne droit à une réduction fiscale de 66%. Vous pouvez stopper votre don à tout moment.
Je donne
NE MANQUEZ RIEN DE STREETPRESS,
ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER