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    20/03/2012

    Dur, dur de piéger un spécialiste aussi rôdé

    Décryptage: Les astuces de Sarkozy pour ne pas perdre la face au Grand Journal

    Par a/b

    Compliment qui tabasse, pardon très christique ou corde sensible: le passage de Nicolas Sarkozy au Grand Journal a été un inventaire des techniques de débat du président. Si tu veux assurer à la cafet' prends-en de la graine.

    Depuis que Nicolas Sarkozy est passé sur les plateaux de Michel Denisot et Yann Barthès vendredi dernier, beaucoup ont déploré le manque de répartie des hôtes du président. A la fois accusés de « servir la soupe au président » et de faire dans le scandaleux mélange , les journalistes de Canal + sont passés pour des zouaves. Mais est-ce bien de leur faute ? Car le président Sarkozy à quelques petits tours bien rôdés.

    1 Le compliment qui tabasse

    Contexte: Yann Barthès reprend avec Nicolas Sarkozy les images que le Petit Journal a débusqué lors de ses divers déplacements. Même si le président relève de temps à autres certains excès de montage, l’ambiance est plutôt bon enfant et le candidat-sortant rit de bon coeur.

    Ce qu’il dit: La dernière phrase de M. Sarkozy au Petit Journal:  « On a rarement été aussi sympathique avec moi , je vous remercie ça m’a beaucoup touché, j’y suis sensible. »

    Speed-analyse: Dire à Yann Barthès que son accueil a été des plus sympathiques, c’est transformer le rôle de poil à gratter du Petit Journal en douce caresse. Dur Pour le Petit Journal qui considère le président comme sa première cible !

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    2 Le pardon à ses adversaires, comme Jésus

    Contexte: Michel Denisot lance une vidéo. On y voit François Hollande s’exprimer sur le plateau de France 2 au sujet des relations France-Europe. Il s’exclame: « Je ne suis pas dans la soumission ». On demande à M. Sarkozy de réagir.

    Ce qu’il dit: « (Je n’ai) aucune réponse. Je ne peux pas lui en vouloir il n’a jamais siégé dans un conseil européen, il n’a jamais rencontré madame Merkel, il ne connait pas la question du compromis européen. »

    La speed-analyse: « Je lui pardonne, il ne sait pas ce qu’il dit ». Un effet de style efficace qui exprime la plus grande indifférence sous couvert de tolérance. Cette technique permet de dégommer M. Hollande tout en passant pour quelqu’un de raisonnable. Propre !

    Je ne peux pas lui en vouloir il n’a jamais siégé dans un conseil européen

    3 La question socratique

    Contexte: Jean-Michel Aphatie se moque gentiment de Nicolas Sarkozy qui vient seulement d’apprendre que les entreprises du CAC 40 ne paient pas d’impôt. « Il fallait nous le demander on vous l’aurait dit » s’amuse le journaliste. 

    Ce qu’il dit: Le candidat-sortant répond à la question par une autre question. Il s’adresse ainsi à M. Aphatie: « Vous pensez qu’ il faut que je fasse semblant d’être omniscient ? Est-ce que vous croyez que je sais tout? » 

    Speed-analyse: Lorsqu’on ne sait pas répondre clairement à une question, le mieux c’est de reporter la gêne sur son interlocuteur. La technique: répondre à la question par une autre question qui rend l’autre stupide. « Est-ce que vous croyez que je sais tout ? » Si Jean-Michel Aphatie répond oui, il passe pour un amoureux transi. S’il répond par la négative, comme ici, il passe pour un fébrile en matière de répartie… à la faveur du président.

    Vous pensez qu’ il faut que je fasse semblant d’être omniscient ? Est-ce que vous croyez que je sais tout?

    4 La technique du vieux sage

    Contexte: A propos du fils de Nicolas Sarkozy qui a lancé des légumes sur une policière, le chroniqueur du Grand Journal Vincent Glad l’attaque: « Vous avez l’air d’avoir un peu de mal à éduquer vos enfants »

    Ce qu’il dit: « Je vois que vous n’avez pas d’expérience, parce que le jour où vous aurez de l’expérience, ça vous donnera un peu plus d’ouverture d’esprit.(…) Et dans la vie on apprend de ses échecs et je vous souhaite d’en connaître bientôt parce que ça ouvre l’esprit. »

    La speed-analyse: Nicolas Sarkozy utilise en doublé la modestie et la hauteur du sage. Cela a l’effet de décrédibiliser le chroniqueur tout en lui signifiant qu’il n’a même pas besoin de se fatiguer pour le mettre à terre. Ce n’est pas M. Sarkozy qui est trop fort, c’est M. Glad qui est trop faible. Tel un sage du haut de sa montagne de connaissance, il remet à sa place le petit scarabé à la langue bien pendu qui plongera dans le silence jusqu’à la fin de l’émission. L’effet Sarkozy c’est aussi ça.

    Dans la vie on apprend de ses échecs et je vous souhaite d’en connaître bientôt

    5 Jouer la corde sensible

    Contexte: Sur le plateau, Ariane Massenet présente la playlist culturelle de Nicolas Sarkozy parmi laquelle figure le livre « La confusion des sentiments » de Stephan Zweig. Une occasion pour le président de jouer sur la corde sensible.

    Ce qu’il dit: « Les sentiments ça compte beaucoup plus que les fonctions; la fonction ne met pas entre parenthèses les sentiments. Parce que si vous mettez entre parenthèse vos sentiments, vous n’incarnez plus la fonction ,vous la jouez. »

    La speed-analyse: Mettre ses sentiments en avant permet de signifier qu’il ne joue pas et qu’en tant qu’être sensible, il peut comprendre la souffrance des Français. Or, à une époque où on accuse les politiques de mensonges et autres manipulations, Nicolas Sarkozy use de cet argument pour cherche la compassion autant que faire se peut. Il s’approprie à lui tout seul les qualités de Charles Ingalls et de l’Abbé Pierre.

    Si vous mettez entre parenthèse vos sentiments, vous n’incarnez plus la fonction ,vous la jouez

    6 Un président normal, lui aussi

    Contexte: Le Zapping du jour a retenu un passage extrait de l’émission de France 2, A chacun son histoire. On y voit un fétichiste qui propose aux jeunes femmes de leur racheter leurs bas en pleine rue. Sarkozy parle après.

    Ce qu’il dit: De retour sur le plateau, le président tient à donner son avis – sans que personne ne le lui demande – sur ce passage du Zapping.  « Dans la vraie vie il y’ a pas que ça; là on fait de la publicité à ce qu il y a de plus extrémiste, de plus épouvantable. La vraie vie c’est pas ça, c’est des gens qui travaillent, qui s’aiment, qui s’entendent, qui élèvent leurs enfants. C’est pas du tout ça. »

    La speed-analyse: Passons outre le fait que Sarkozy sous-entend que « la publicité à l’extrémisme » vienne d’une chaîne publique, le président prétend surtout ici parler au nom du peuple. Oubliés le Fouquet’s, les vacances avec Bolloré, le président est d’abord un homme qui travaille, aime et élève ses enfants comme n’importe quel Français. « La vraie vie », il l’a connait aussi. Peut-être se dit-il que l’expression « qui se ressemble s’assemble » pourrait marcher, qui sait ? 

    bqhidden. La vraie vie c’est pas ça, c’est des gens qui travaillent, qui s’aiment, qui s’entendent, qui élèvent leurs enfants

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