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    23/04/2024

    Tribune de Garance Foglizzo, juriste

    « J’ai fait le tour d’Europe à vélo pour dénoncer les conditions d’accueil des exilés »

    Par Sara Carraud

    Après avoir traversé 13 pays européens à vélo et en train pour dénoncer l’accueil indigne des exilés, Garance Foglizzo prend la parole avant les élections européennes et invite à repenser l'accueil des migrants en Europe.

    « Le 10 avril 2024, l’Union européenne a adopté le pacte Migration/asile, dans la même lignée que la loi Immigration française. Les textes se concentrent surtout sur la répression aux frontières. En Europe, l’immigration est une réalité. Malheureusement, les politiques en place privilégient trop souvent la répression aux frontières au détriment de l’accueil digne. Après avoir traversé 13 pays européens à vélo et en train, je vous explique en quoi il est essentiel d’accueillir dignement.

    Racisme et exclusion

    C’est bientôt l’heure des élections européennes. Mon premier message s’adresse aux futurs électeurs : allez voter ! Cependant, attention aux discours qui vous promettent de faire disparaître le problème migratoire. C’est un mensonge. Il est prévu que l’immigration en Europe augmente d’année en année. Les personnes exilées que j’ai rencontrées m’ont toutes rapportées des moments où elles ont été victimes de racisme et de discrimination, particulièrement sur le marché du logement et le marché du travail. En Hongrie, par exemple, j’ai rencontré une femme pour qui il est très difficile de trouver un appartement, car les propriétaires ne veulent pas d’exilés en tant que locataire.

    Des conditions de vie précaires

    En Italie, j’ai été très choquée par le nombre de demandeurs d’asile qui ne pouvaient pas obtenir ce statut en raison du manque de places d’hébergement. Ils devaient donc vivre pendant des mois dans des bidonvilles en attendant qu’on les transfère dans d’autres villes pour faire cette même demande d’asile. Et même une fois les demandeurs d’asile reconnus comme des réfugiés, il existe certains pays où les droits sociaux ne s’appliquent pas de la même manière. Comme en France, où ils peuvent encore se retrouver dans la rue. Ils n’ont pas les mêmes chances dans l’accès au logement ou le marché du travail.

    Préférer l’inclusion à l’intégration

    On parle souvent de l’échec de l’intégration en France. C’est un sujet que je trouve vraiment intéressant. Pendant mon voyage, on m’a expliqué qu’il est plus intéressant de raisonner en termes d’inclusion que d’intégration. On m’a expliqué ça avec une comparaison. Le président de la communauté ivoirienne en Grèce m’a expliqué que l’intégration, c’est de préparer un repas, inviter quelqu’un à manger chez soi et manger le repas ensemble. Alors que l’inclusion serait d’inviter quelqu’un chez soi, décider du repas et le préparer ensemble, avant de le manger. L’inclusion met plus l’accent sur l’idée d’inviter, d’associer les personnes exilées à nos processus de décision plutôt que de s’attendre à ce qu’ils s’intègrent tout seuls.

    Quelles solutions ?

    Pendant mon voyage, j’ai eu la chance de découvrir des initiatives inspirantes à travers l’Europe. Des conseils de migrants en Allemagne permettent aux nouvelles communautés de participer aux décisions locales. Durant ce voyage, nous avons voulu également pousser une idée : créer des cartes de résidence. Cela permettra de reconnaître et légitimer toutes ces personnes qui existent en Europe. Des mesures pourraient nous inspirer. Par exemple, au Portugal, les demandeurs d’asile peuvent commencer à travailler dès l’enregistrement de leur demande d’asile. En Espagne, ils n’ont pas besoin de faire une demande de permis de travail pour travailler. En France, c’est le cas : les demandeurs d’asile doivent préalablement faire une demande d’autorisation de travail accompagnée de leur offre d’emploi. Ça veut dire trouver une offre d’emploi avant même d’être autorisé à travailler, ce qui reste compliqué.

    Je lance aussi un appel aux candidats des prochaines élections européennes pour qu’ils prennent ces enjeux au sérieux. Plutôt que de proposer des mesures répressives ou irréalistes, nous devons travailler ensemble pour élaborer des politiques migratoires qui reflètent nos valeurs communes d’égalité et de solidarité. Repenser l’accueil des migrants en Europe, c’est avant tout reconnaître notre responsabilité collective et agir en conséquence. »

    Illustration de Une par Caroline Varon.

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