Expulser toujours plus et toujours plus vite semble être le mantra de Gérald Darmanin. Ainsi mi-juin 2021, selon des documents que StreetPress a pu se procurer, le ministère de l’Intérieur a lancé l’opération « 1.000 étrangers en situations irrégulières (ESI) à éloigner avant le 31 décembre 2021 ». Le protocole fait suite à deux réunions portant sur la politique migratoire de la France, dans un contexte post-Covid.
La première, le 9 juin 2021, était présidée par Emmanuel Macron. Y ont participé Jean Castex, les ministres Darmanin et Jean-Yves le Drian (Affaires étrangères) ainsi qu’une représentante du ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti. La seconde, deux jours plus tard, réunissait le ministre de l’Intérieur et ses préfets. Dans les deux cas, priorité affichée ? Plus de fermeté en matière migratoire et expulser plus rapidement les étrangers en situation irrégulière, notamment ceux qui sortent de prison.
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La pression de l’élection
À cet égard, l’exécutif annonce cibler en priorité les détenus fichés pour radicalité. Mais la mesure s’étend à ceux condamnés pour droit commun, remarque un avocat spécialisé dans les questions d’immigration, dont un dossier a été signalé comme faisant partie de l’opération. « On se concentre sur des personnes dont le passé judiciaire rend leur présence sur le territoire plus problématique », assure un préfet, que StreetPress a pu joindre. Contacté, le ministère de l’Intérieur confirme :
« Comme le ministre l’a dit à plusieurs reprises, il a demandé aux services d’établir une première liste des étrangers les plus dangereux, à expulser dans les six mois. Cette liste avait été établie en juillet. Au 31 décembre, plus de 1.000 individus présents sur cette liste ont été expulsés. »
Dans une missive datée du 22 juin 2021 et consultée par StreetPress, un fonctionnaire dessine les contours de l’opération, après avoir pris attache auprès de la préfète Sylvie Houspic, directrice de l’immigration à la DGEF. Il en avise ses collègues et détaille : chaque préfecture est invitée à dresser une « short-list » d’étrangers à expulser. La méthode ? « Se coordonner avec les parquets mais aussi avec les prisons », complète ce même haut fonctionnaire.
La mission n’est pas nouvelle, soutient ce dernier. Bien que suivie avec un peu plus d’attentions de la part du ministère en cette année… électorale. « Je vous laisse tout seul faire les conclusions que vous voulez », ironise-t-il. En 2021, 37% des personnes expulsées depuis l’un des centres de rétention administrative (Cra) où l’association La Cimade intervient, étaient des sortants de prisons, assure l’un de ses salariés.
Pour parvenir à ses objectifs, le ministère compte s’appuyer sur une « task force laissez-passer consulaire », chargée d’obtenir, auprès des représentations étrangères, ces précieux sésames permettant à la France d’expulser des sans-papiers qui n’ont plus de documents d’identité. Mais aussi sur les conseillers diplomatiques de chaque préfecture, poursuit le message. Ce sont eux qui sont chargés, au jour le jour, de mettre de l’huile dans les rouages diplomatiques. Avec le succès que l’on connaît en ce qui concerne l’Algérie, l’un des pays les plus visés par la procédure. En ce moment, et depuis début décembre : impossible d’expulser quiconque à destination d’Alger.
_Image d’illustration issue du domaine public, via Pixabay.
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