Concorde, Paris 8 – Il est 14h lorsque le premier char de la Marche des Fiertés, rempli de ballons arc-en-ciel et de danseurs, arrive sur la grande place. Maud et ses potes terminent leurs derniers préparatifs, avant de sortir de grandes banderoles de leur sacs :
« Scouts – Eclaireuse – Guide – Eclaireur – Fièr-e-s & Solidaires ».
Une petite vingtaine de scouts se sont rassemblés pour défendre les droits des LGBT, ce samedi 24 juin. Ils appartiennent à différentes obédiences – catholiques, protestants ou laïcs. Si ils ont choisis de défiler sans leurs uniformes, ils ont quand même détourné leur fameux foulard pour les couleurs de l’arc-en-ciel.
L’initiative vient de Maud. Dans le civil, la trentenaire bosse dans un hôpital de Toulouse. Le reste du temps, elle est membre des Eclaireuses et Eclaireurs de France, les scouts laïcs :
« On avait déjà manifesté à la Gay Pride de Paris l’année dernière. Cette fois, on a fait Toulouse, Rennes et Strasbourg. C’est important d’aller un peu partout. »
Quel joli foulard /
Une petite pancarte à la main où il est inscrit « Pas d’homophobie sur mon camp », la jeune femme aux cheveux courts et fines lunettes développe :
« Je considère que c’est essentiel pour l’éducation des jeunes de parler de ce sujet. D’autant que je m’occupe d’un groupe de 15 à 18 ans qui se pose plein de questions. »
Même son de cloche du côté de Quentin, grand gaillard de 27 ans, aujourd’hui chargé des réseaux sociaux pour les Scouts et guides de France (cathos mais progressistes) qui a longtemps été chef :
« Ça m’est arrivé trop de fois d’entendre de l’homophobie ordinaire entre mes jeunes. C’est aussi notre rôle de les sensibiliser à ça, on intervient comme des référents qui ne sont pas de leur famille. »
Casser l’image de catho-tradi
Une grosse demi-heure après leur arrivée à Concorde, le gros du cortège se met enfin en route. Derrière le char de tête qui diffuse du David Bowie à fond, les milliers de manifestants descendent la rue de Rivoli sous un soleil de plomb. « Y’a même les scouts, c’est un délire », rigole une petite brune. Pas mal de monde prend leur banderole en photo. Quentin sourit :
« C’est vrai que le plus souvent, les gens lisent le message sur la banderole, lèvent des yeux étonnés, relisent la banderole et posent des questions. C’est pour ça que cette année, on a imprimé quelques tracts, histoire d’expliquer la démarche. »
Le jeune homme embraye :
« L’idée c’est aussi de casser un peu l’image que les gens se font des scouts. On nous voit encore trop comme des cathos tradis, c’est un peu dommage. On veut montrer que chez nous, on accepte tout le monde. »
Dans leur appel à manifester, les organisateurs ont envoyé une lettre à toutes les associations scouts de France. Très peu ont répondu à l’invitation. « C’est dommage, l’année dernière on avait les israélites avec nous », regrette Maud.
Pas reconnu par la direction
Autre ombre au tableau : les différentes directions des mouvements scouts refusent de prendre parti et optent pour le ni-ni : ni-pour, ni-contre. Quentin, scout catholique, n’est pas surpris par la décision de ses boss :
« Cette année, le mot d’ordre [de la Gay Pride] c’est “PMA pour toutes”. Pour une instance religieuse, même si on est plus mesurés que d’autres mouvements, ça en dérange certains. »
« Y’a même les scouts, c’est un délire » /
Pour Maud, laïque, ce ne sont pas les questions religieuses qui posent problème :
« Dans notre asso, on a tendance à trop faire confiance à l’universalité : nous serions tous égaux. Du coup, se focaliser sur certains thèmes, comme l’homosexualité, remettrait en cause cette universalité. Je pense que c’est une erreur. »
Pour autant, Quentin veut croire à une évolution :
« A priori, ils ont prévu de faire un communiqué pour nous féliciter de cette démarche. »
Un poil jaloux du char de l’asso Ardhis – engagé dans la défense des réfugiés homos – qui attire tous les regards, Frédéric se marre :
« J’aimerais bien qu’on ait un char aux couleurs des Scouts nous aussi ! »
Dans une première version de l’article, nous avions écrit, à tort, que les mouvements avaient refusé qu’ils défilent en uniforme.
L’initiative vient des manifestants eux-mêmes.
Cet article est en accès libre, pour toutes et tous.
Mais sans les dons de ses lecteurs, StreetPress devra s’arrêter.
Je fais un don à partir de 1€Si vous voulez que StreetPress soit encore là l’an prochain, nous avons besoin de votre soutien.
Nous avons, en presque 15 ans, démontré notre utilité. StreetPress se bat pour construire un monde un peu plus juste. Nos articles ont de l’impact. Vous êtes des centaines de milliers à suivre chaque mois notre travail et à partager nos valeurs.
Aujourd’hui nous avons vraiment besoin de vous. Si vous n’êtes pas 6.000 à nous faire un don mensuel ou annuel, nous ne pourrons pas continuer.
Chaque don à partir de 1€ donne droit à une réduction fiscale de 66%. Vous pouvez stopper votre don à tout moment.
Je donne
NE MANQUEZ RIEN DE STREETPRESS,
ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER