A priori, la taxe robots paraît logique et intéressante. Pourtant, quand on y réfléchit, ce n’est pas une bonne idée. Dans la proposition de Benoît Hamon, le principe est de créer une TVA spécifique sur les robots pour financer le revenu universel d’existence.
L’idée part du constat que les entreprises comme Amazon utilisent de plus en plus de robots pour remplacer leurs employés, et payent de moins en moins de cotisations sociales. Du coup, ça crée du chômage technologique et un manque à gagner dans les caisses de l’Etat.
Il s’agit donc de modifier ces comportements par une taxe : comme quand on taxe le tabac pour vous dissuader de fumer, on va taxer les robots pour favoriser l’emploi humain. C’est logique, les robots seront plus chers, donc leur coût relatif moins intéressant. On va par exemple continuer à embaucher une femme de ménage plutôt que d’utiliser un robot ménager.
Le double discours de Hamon et les autres sur les robots
Mais ce faisant, on s’oppose au progrès technologique. Surtout, on entre dans une contradiction fondamentale. Benoît Hamon et d’autres nous disent qu’il faut se préparer à la fin du travail, à un monde de robots où on sera tous riches parce que les machines travailleront pour nous. Mais en même temps, on veut ralentir l’utilisation des robots. Au contraire, si on croit à la fin du travail, il faut inciter à l’utilisation des robots, pas freiner son avènement.
«Soit on veut ralentir l’utilisation des robots et on les taxe, soit il faut se préparer à la fin du travail, avec des machines qui travailleront pour nous»
Xavier Timbeau, économiste
Attention à l’exil fiscal… des robots
Voilà pour l’incitation. Ensuite, si la taxe doit financer une protection sociale plus importante, il y a d’autres soucis qui se posent.
Car la taxe induira des effets pervers, avec des possibilités d’évasion fiscale : s’il y a un endroit au monde où on ne taxe pas les robots, tous les robots iront là. Si on taxe les robots en France, on risque d’avoir des robots en Chine, et on ne pourra pas financer le revenu universel d’existence.
La taxe robot est un concept marketing
Je pense que le concept un peu marketing de « taxe robot » est maladroit. Il est fait pour parler aux gens, avec un discours simple de « taxons les entreprises comme Amazon qui remplacent le travail humain par des automates ».
Mais il part d’un constat véritable. Le grave problème qui se pose avec la robotisation n’est pas la fin du travail, c’est l’explosion des inégalités. Le problème du robot n’est pas le robot en lui-même, c’est son propriétaire
Un robot travaille toujours pour son propriétaire
Le robot travaille toujours pour quelqu’un. Par exemple, si vous avez un robot ménager chez vous, c’est tout bénef’ : il ne coûte pas cher et vous remplace dans des activités qui vous ennuient profondément. Au lieu de passer l’aspirateur vous pouvez rester au lit le dimanche matin par exemple. Vous êtes propriétaire de sa force de travail et de sa production.
A un niveau global, si le robot cultive les champs, nous on peut faire autre chose. C’est le principe du revenu universel : on n’a plus de travail parce que le robot le fait à notre place, mais on a quand même un revenu pour vivre correctement.
Plus on est riche, plus on s’achète de robots. Et du coup on devient encore plus riche
Sauf que ce que les gens craignent aujourd’hui avec raison, c’est la concentration de la propriété des robots. Les gens très riches vont pouvoir s’offrir des robots, fabriquer plein de choses et les vendre à plein de gens, et avoir une immense fortune. La robotisation c’est l’assurance de voir exploser les inégalités sociales.
La véritable réponse à ça, c’est la redistribution. Du coup, il ne faut pas taxer les robots, ce qui augmentera le prix d’achat du robot au départ (votre robot ménager par exemple), mais taxer les propriétaires de robots, qui doivent à leurs congénères de la solidarité. Le problème n’est pas d’inventer une taxe du futur mais de taxer les riches correctement.
«Il ne faut pas taxer les robots, mais taxer les propriétaires de robots»
Xavier Timbeau, économiste
Pour moi, une véritable fiscalité du futur est celle qui n’empêche pas le futur, donc qui reste neutre du point de vue de comment on fait les choses – avec du robot ou de l’humain. Mais c’est aussi une fiscalité véritablement juste. C’est-à-dire qu’elle va gommer les inégalités injustifiables qui ne sont pas liées au mérite, à l’effort ou à l’inventivité. En terme de fiscalité, on n’a pas de recette miracle, mais on a déjà la direction.
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