« Wow ! C’est une véritable mine d’or ! » Sur la place de la République, un petit groupe de militants de Nuit Debout s’est formé autour d’Hector. Emmitouflé dans son écharpe bordeaux, l’activiste espagnol fait défiler sur son smartphone la liste de ses contacts militants à travers le monde. 100, 200, 300, 500, 1.000… Le répertoire d’adresses électroniques, classées pays par pays, est inépuisable. Il tombe à pic alors que Nuit Debout prépare une journée de mobilisation internationale pour le 15 mai. « Avec ça, on va préparer une liste de diffusion massive ! » s’enthousiasme un activiste français.
Spanish Connexion
Hector est arrivé le 9 avril à Paris. Dans ses bagages : ses conseils, acquis des mobilisations précédentes. Ce trentenaire au crâne chauve est un militant aguerri. En 2011, il faisait partie des équipes qui ont coordonné la marche des Indignés, entre Madrid et Bruxelles. Hector a aussi côtoyé les zapatistes au Chiapas : Il a participé à « l’Autre campagne », une mobilisation organisée par le sous-commandant Marcos pour hacker les élections présidentielles mexicaines de 2005.
Sur Telegram, la messagerie instantanée utilisée par les nuitdeboutistes, un groupe de discussion regroupe les hispanophones. Ils sont presque 300 à l’avoir rejoint. « Nuit Debout a été trending topic sur Twitter à Madrid et Barcelone dès le premier soir de mobilisation », commente Noémie, une des occupantes qui gère la page Facebook du mouvement. Depuis le 31 mars, elle a déjà hébergé 4 militants espagnols dans son appartement, qu’elle a transformé en auberge de jeunesse. La trentenaire estime à une vingtaine le nombre d’Indignados, qui font des allers/retours entre la France et l’Espagne pour participer à Nuit Debout.
Des pros de l’activisme
Ce vendredi matin dans le salon de Noémie, une réunion a été organisée pour préparer le 1er mai de Nuit Debout. Autour des croissants et des thermos de café, des activistes français comme Baki Youssoufou, fondateur du site de pétition en ligne We Sign It, ou Benjamin Ball, l’hyper-militant que StreetPress vous a déjà présenté.
Les espagnols en plein taff
Hector est installé dans un fauteuil club, son ordinateur sur les genoux. Il est rejoint au saut du lit par Toret. Ce catalan à bouclettes de 38 ans est un activiste de haut vol. Il a codirigé avec succès la stratégie sur le web d’Ada Colau, la maire de Barcelone, lors de la campagne des élections municipales de 2015.
Toret est également chercheur à l’Universitat Oberta de Catalunya où il dirige un labo qui travaille sur le rôle des réseaux sociaux dans les mobilisations politiques. Un boulot qui l’a fait voyager à Hong-Kong pour la « Révolution des parapluies » ou à Rio lors des manifs anti coupe du Monde. « Nuit Debout c’est incroyable », jure-t-il. « C’est très proche de ce qu’il s’est passé à Madrid, avec le mouvement du 15-M. »
Un Media Center made in Spain
Quelques jours avant le 31 mars, Emma était déjà au courant que la place de République allait être occupée. Militante dans le mouvement des Indignés, cette espagnole s’est constitué un solide réseau à Paris, lors d’un séjour prolongé en 2012. Parmi ses contacts des activistes d’Alternatiba, un collectif français mobilisé pendant la COP 21, la mettent dans la confidence qu’une occupation se prépare en marge des manifs contre la loi travail. Dès la fin mars, la jeune femme de 36 ans déboule à République. Depuis, elle multiplie les voyages entre Paris et Barcelone, où elle gère une ONG : la plateforme citoyenne pour un audit de la dette.
Grosses chaussures de rando et vêtements passe-partout, elle a impulsé le « Media Center » de Nuit Debout. Jeudi 14 avril, un petit groupe de manifestants se réunit autour d’elle, pour une formation au web-activisme dans un café de République. A ses côtés, Toret venu présenter Flocker, un module créé par son labo de recherche qui permet de cibler les hashtag et les influenceurs les plus efficaces sur Twitter. Plus loin, Hector est en train de créer le compte AppGree de Nuit Debout. Cette application permet de réaliser des votes en temps réel au sein d’une communauté virtuelle. « Si on avait eu cet outil au moment au moment des Indignés, nous aurions beaucoup mieux réussi », regrette-t-il. Emma, elle, est amère vis-à-vis de Podemos, le parti politique créé dans le sillage des Indignés :
« Ce sont des politilogues venus de l’Université qui ont vu une ouverture après le mouvement du 15-M. »
Lundi, elle repartira à Barcelone. Mais elle promet déjà de revenir à Paris, au début du mois de mai.
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