TGI de Paris, 23e chambre correctionnelle – Dans le box des prévenus, Mohammed et Hicham se tiennent côte à côte, mains dans le dos. Le premier, élancé, arbore un sweatshirt de sport sur le dos et une queue de cheval. Le second, petit trapus, a l’air grave.
Le 10 janvier dernier, les 2 loustics se sont mis dans une sacrée galère. Après avoir sifflé une bouteille de vodka et 6 canettes de bières, ils escaladent la façade d’un immeuble cossu du 18e. Puis, pénètrent par effraction, à l’aide d’un burin, dans les bureaux d’une petite entreprise. La présidente raconte :
« La police a été prévenue par un voisin qui a vu de la lumière dans l’immeuble. Elle a retrouvé les 2 hommes cachés sous un bureau. »
Mohammed et Hicham sont immédiatement placés en garde à vue avant d’être déférés devant le parquet. Motif ? Tentative de cambriolage.
Ils nient le cambriolage
Pendant l’audience, les 2 hommes contestent la version des enquêteurs. Ils sont entrés par effraction, certes. Mais ils n’ont pas voulu cambrioler les bureaux de l’entreprise. « On n’a pas fouillé Madame la Présidente », lance Hicham. Et encore moins mis le bureau sans dessus dessous :
« Quand le policier est arrivé, il était en panique. Il a jeté une poubelle à travers la pièce. »
Et Mohammed d’ajouter :
« Hicham avait repéré un local qu’il voulait squatter, au même étage. On ne voulait pas voler Madame La Présidente… Mais on a été tenté. »
Sur les faits, rien d’extraordinaire : une dégradation estimée à 1000 euros que les prévenus s’engagent à rembourser et aucun bien dérobé. « Je ne me souviens de rien, j’avais trop bu », avoue Hicham.
Mohammed oublie sa chaussette
Rapidement, le tribunal évoque le pedigree des 2 hommes. A ma gauche, Mohammed, 13 ans sur le territoire pour ce jeune sans-papiers au sérieux bagou, 4 fausses identités et 18 condamnations au compteur, en majorité pour vol. A la suite de l’affaire, l’ADN du grand dadais a été retrouvé dans 2 autres cambriolages.
Dans l’un d’eux, celui d’un magasin de sport du 3e arrondissement, l’homme a été confondu par une de ses chaussettes, noire, qu’il a laissé trainer dans le shop. Il aurait embarqué pour 25.000 euros de chaussettes, caleçons, maillots de foot et survêtements.
Quand la présidente l’interroge sur l’affaire, Mohammed ne nie pas les faits… Mais n’avoue pas pour autant :
« Je ne vais pas dire que ce n’est pas moi parce qu’il y a mon ADN. Mais la vérité, c’est que je ne me souviens pas de cette histoire
– Comment ça se fait ?
– Ça date… Et puis des fois, je perds la tête. »
Hicham fait un selfie devant un coffre-fort volé
A ma droite, Hicham, 2 condamnations et une situation familiale complexe. SDF, sans-papiers, l’homme a une femme et un enfant qu’il visite parfois à Marseille.
Pendant l’audience, Hicham semble accablé. Son avocate l’interroge. « Monsieur, avez-vous déjà été condamné à de la prison ? » Hicham nie de la tête. Au vu de son casier, la zonzon n’est pas une solution pour le petit homme, assure son avocate : « Du sursis et un suivi pour ses problèmes d’alcool, ce serait mieux. »
Pendant l’audience, la procureure s’interroge :
« Monsieur, dans une vidéo sur votre portable, on vous voit devant un coffre-fort. Des hommes sont en train de le découper à la disqueuse. Pendant votre audition, vous avez dit que c’était pour un film. Vous maintenez cette version ? »
A la barre, Hicham bafouille, bute sur les mots :
« Je suis rentré à la cité, j’ai vu des petits en train d’ouvrir un coffre. Je suis curieux, j’ai juste passé ma tête. »
Ils ont pris du ferme
Du haut de son perchoir, la procureure prévient : elle ne croit pas un mot des explications des 2 pieds nickelés. « Ça ressemble quand même à une version qu’ils ont élaboré en garde à vue. » Mohammed et Hicham ne bronchent pas. Verdict : 30 et 6 mois de prison ferme.
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