TGI de Paris, 23e Chambre Correctionnelle – Laurent n’a pas vraiment la dégaine d’un joli cœur. Crâne rasé, visage émacié, le quarantenaire porte sur sa gueule les séquelles d’une vie dissolue. De l’héro’ qu’il consomme dès son jeune âge à son penchant, plus récent, pour la bouteille.
Assis dans le box des prévenus, l’homme rentre la tête entre ses frêles épaules. Il se mange les joues, entouré par 2 policiers à la forte carrure. La présidente finit par l’interpeller :
« Maintenant Monsieur M, il va falloir s’expliquer…».
Depuis plusieurs mois, l’ancien pizzaïolo harcèle son ex-compagne, Delphine. A la barre, l’avocate de la petite femme aux cheveux courts raconte les dizaines de textos envoyés par Laurent à sa cliente, les insultes, les crachats, les menaces de morts et la présence constante de son ancien amant aux abords de son domicile. Jusqu’au pas de sa porte :
« C’est arrivé à un point où ma cliente ne pouvait plus sortir de chez elle. »
Mi-octobre, après plusieurs nuits de calvaires, Delphine finit par porter plainte. Laurent avait alors menacé de l’étrangler, de la brûler vive après avoir tenté de casser sa serrure. Il tente de s’expliquer devant le tribunal :
« Je reconnais avoir dit ça mais ce ne sont que des mots. Dès qu’on s’engueule, ça part en vrille. Et après tout me retombe dessus. Quand elle a besoin de moi, elle vient toujours me chercher. Et quand elle en a marre, elle me laisse tomber. »
Une histoire débutée dans la rue
Laurent et Delphine, c’est une affaire qui remonte à quelques années déjà. L’avocate de la partie civile rembobine :
« Delphine D. et Laurent M. se sont rencontrés dans la rue. Laurent était un ami de l’ancien compagnon de Delphine. Ils ont eu une relation discontinue pendant plusieurs années ».
Ensemble ils ont tout vécu. Les hauts : la vie commune, les retrouvailles tendres après des mois de séparations. Les bas : l’avortement de Delphine, la toxicomanie, et la jalousie de Laurent quand elle le largue et rencontre un autre homme.
« Monsieur M. n’a pas supporté que ma cliente garde le bébé d’un autre homme que lui » souligne dans sa plaidoirie l’avocate de la partie civile. « Il racontait à tout le monde que c’était son enfant ». Dans le box, Laurent fait non de la tête.
Romance ambigue
Dans une ambiance tendue, l’ancien amant clame avoir été manipulé par la femme qu’il a tant aimée. Jusqu’à péter les plombs. « Il a conscience de l’impasse dans laquelle il se trouve », justifie son avocat. « Elle m’a envoyé au moins quarante lettres la dernière fois que j’étais en prison » renchérit même Laurent.
« Elle a été ambigue c’est vrai. Il y a une fragilité chez elle » concède l’avocate partie civile. La présidente interroge à nouveau le joli cœur, un peu à la manière d’un conseillère conjugale :
« – Vous allez arrêter cette relation ?
– Oui, aujourd’hui, je suis énervé contre cette personne, je ne veux plus la voir. »
4 ans de prison
Le casier de Laurent, 7 condamnations au compteur, et la gravité des faits ne plaident pas en sa faveur. « Monsieur M. ne peut plus dire que c’est la relation qui est en cause. Il faut qu’il prenne ses responsabilités » s’insurge la procureure :
« On a ici le dossier de quelqu’un qui s’en prend, sans relâche, à la femme qu’il aime et la violente. C’est inacceptable. »
Après la suspension d’audience, la Présidente annonce la sentence. Elle condamne Laurent à 4 ans de prison dont un avec sursis, le tout assorti d’une obligation de soins, de domicile une fois sortie et d’une interdiction formelle d’entrer au contact avec la victime. Le Ministère public n’avait requis que 10 mois ferme à son encontre.
L’audience reprend et les policiers emmènent Laurent. Il s’agite. « Ca va pas dans sa tête » l’entend-on crier alors qu’il sort du box par une porte dérobée.
Cet article est en accès libre, pour toutes et tous.
Mais sans les dons de ses lecteurs, StreetPress devra s’arrêter.
Je fais un don à partir de 1€Si vous voulez que StreetPress soit encore là l’an prochain, nous avons besoin de votre soutien.
Nous avons, en presque 15 ans, démontré notre utilité. StreetPress se bat pour construire un monde un peu plus juste. Nos articles ont de l’impact. Vous êtes des centaines de milliers à suivre chaque mois notre travail et à partager nos valeurs.
Aujourd’hui nous avons vraiment besoin de vous. Si vous n’êtes pas 6.000 à nous faire un don mensuel ou annuel, nous ne pourrons pas continuer.
Chaque don à partir de 1€ donne droit à une réduction fiscale de 66%. Vous pouvez stopper votre don à tout moment.
Je donne
NE MANQUEZ RIEN DE STREETPRESS,
ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER