En ce moment

    23/07/2013

    Les amours de vacances en mode « économie du partage »

    De l'aventure torride au plan galère : ça chope sur Couchsurfing

    Par Emilie Tôn

    Une boîte de préservatif sur la table de la cuisine : C'est la bonne surprise qu'Audrey a découvert à peine arrivée chez son couchsurfeur malaisien. Le site de partage de canapé est aussi un repère de crevards.

    « Bonjour, je suis Croate et j’ai travaillé comme cuisinier un peu partout dans le monde. Je pourrais te préparer un dîner. Tu m’as l’air d’être le genre de personne avec qui j’ai envie de passer du temps. Ça tombe bien, je serai à Paris quelques jours la semaine prochaine. On échange nos numéros ? »

    Lorsqu’on je reçois une telle demande, quelques heures après m’être inscrite sur CouchSurfing, deux questions se posent :

    > 1. A quoi ressemble la gastronomie croate ?

    > 2. Il veut pécho ou c’est comme ça qu’on demande le gîte sur couchsurfing.com ?

    Fleuron

    Depuis 2004, le site CouchSurfing permet de loger ou d’être accueilli chez les gens gratuitement à travers le monde. Le principe est simple : On s’inscrit, on met une photo et on se présente avec ses centres d’intérêts. Un peu comme sur un site de rencontre.

    Mais ici, soit vous mettez à disposition votre canapé en devenant « hôte », soit vous regardez qui peut vous accueillir à Jakarta de 7 au 9 août. CouchSurfing n’en finit plus de cartonner : Le site revendique 5 millions d’inscrits. « Organisation à but non lucratif » à sa fondation, le réseau social est devenu une entreprise en 2011. L’année dernière, elle a levé 1.5 millions de dollars , de quoi en faire un fleuron de « l’économie du co », cette branche de l’économie numérique qui fait du fric sur le partage entre internautes.

    Garçonnière

    Qui dit vacances à l’étranger, dit découverte des spécialités locales. Et quelques dragueurs invétérés ont bien compris quels avantages ils pouvaient tirer de CouchSurfing. Sans bouger de chez lui, Marco était devenu, selon ses propres mots, « l’ambassadeur sexuel de la France » :

    « Je répandais mon ADN à travers le monde. »

    Il y a trois ans, alors qu’il vient d’emménager dans un grand appartement de la capitale avec un pote, ce trentenaire décide de se proposer d’accueillir des voyageurs chez lui. Il a déjà couchsurfé chez des Américains lors d’un précédent voyage. Mais cette fois, il sera l’hôte. Et les demandes pleuvent :

    « En trois mois, on a eu une soixantaine de personnes, presque que des filles, dont beaucoup d’Américaines et d’Européennes prêtes à faire la fête.»

    La journée, visite touristique, et le soir, beuverie. « Avec tout cet alcool, ça conduit automatiquement au rapprochement. » D’autant plus qu’en vacance, « t’es plus sexuellement motivé ». Le fait d’avoir tout le temps des touristes à la maison, « ça génère une atmosphère propice au sexe », analyse t-il en fin sociologue.

    Signes

    Marco assure pourtant ne pas s’être inscrit sur le site pour avoir des aventures :

    « C’était pas dans ce but précis, ça s’est fait comme ça. Mais faut avouer que ça nous a incité à continuer. »

    Mais parfois, les intentions sont assez claires sur le site. La plupart des couchsurfeurs sont des mecs cool qui aiment rencontrer des gens du monde entier et partager une bière. D’autres sont plus frontaux et n’hésitent pas à mettre en avant leurs skills. Comme Denny, 26 ans, qui propose de vous accueillir à Barcelone. Denny travaille dans le marketing, est DJ et producteur de musique électronique. Dans son descriptif, il assure toujours avoir une bonne bouteille de vin et du bon son chez lui. Ses intérêts dans la vie : « musique, voyage, marketing, réseaux sociaux, gym et fitness »

    Mais la façon la plus simple de pour repérer un couch-chopeur, c’est de regarder l’historique des couchsurfeurs qu’il a accueilli. Pour Denny : 57 références positives, uniquement de filles. Toutes le décrivent comme un hôte délicieux, beau gosse et parfait « gentlemen ».

    Ajoutez-y une photo torse-poil et vous n’aurez plus de doute sur ses intentions.

    Aventure

    Certaines aiment se laisser prendre au jeu. Comme Annaëlle*, 24 ans, partie seule en voyage découvrir Israël. A l’époque, elle envoie une demande publique mais privilégie plutôt les filles et les grosses colocations. Mais plein de mecs lui répondent. « En toute logique, j’ai donné suite à ceux qui me plaisaient. » Tant qu’à faire…

    Un jeune homme seul de Jérusalem, où elle cherche à passer quelques nuits, lui propose de l’accueillir. « Il avait l’air sympa quoi. » Elle pense rapidement à l’idée d’un rapprochement, puis se dit : « on verra ». Le bel israélien est chargé de ramener la voiture de ses parents à l’autre bout du pays. Pourquoi pas le suivre ? Sur la route, ils font plus ample connaissance : « On s’est bien entendu, et on est sorti ensemble. » Visite de coins sympas et, en prime, câlins et nuits torrides :

    « Au final, vivre des moments intimes tout con avec les gens, le lever, le coucher, des soirées… Ça rapproche automatiquement. C’est une intimité inhabituelle, qui peut soit te gêner soit vraiment créer des liens forts. »

    Mauvais plan

    Mais le couchsurfing peut aussi tourner au vinaigre quand on tombe sur un gros crevard. « Ce mec m’a traumatisé, je ne ferai plus jamais de couchsurfing ! » Il y a deux ans, Audrey, sur conseil de son petit-ami, couchsurfait pour la première fois lors de son passage à Malacca, en Malaisie. Pour cette première, la jeune architecte choisit de se rendre chez un trentenaire avec de très bonnes références « provenant exclusivement de filles ». Son profil spécifie qu’il habite à proximité du centre-ville, « mais c’était vraiment très loin de centre en réalité. »

    La première chose qu’elle voit en arrivant chez lui, c’est une boîte de préservatifs sur la table de la cuisine. Pour la chambre ? « Il m’a dit que j’allais dormir avec lui, dans sa chambre éclairée par des lumières noires. Je me demandais vraiment ce que je foutais là. »

    Finalement, il la conduit vers une autre chambre, qu’elle barricade avant de se coucher. Le lendemain, il la conduit partout où elle veut aller, sans jamais la quitter :

    « Il agissait comme si on était en couple et n’arrêtais pas d’essayer de me prendre dans ses gros bras, alors que je parlais de mon petit-ami avec insistance. »

    Il tente un coup de poker pour séduire la jolie blonde : la saouler. « Il m’a amenée dans un bar et commandait de l’alcool sans arrêt, même si je lui disais que je ne voulais plus boire. Il a même commencé à devenir déplaisant … et c’est lui qui conduisait en plus ! »

    Le charmeur n’aura pas eu gain de cause. Pourtant, Audrey affirme que d’autres filles auraient succombées : « J’imagine que si il avait autant de bonnes références, c’est parce qu’il couchait avec elles. » Les commentaires sur son profil sont louches : « Nous avons passé des moments incroyables. » ou encore « Jusqu’au petit matin nous sommes restés à discuter sur son balcon avant de faire un saut dans sa piscine. »

    Audrey, elle, n’a pas laissé de commentaire. « Je voulais juste m’en aller et ne plus jamais faire de couch-surfing. »

    *Annaëlle ne s’appelle pas Annaëlle

    Cet article est en accès libre, pour toutes et tous.

    Mais sans les dons de ses lecteurs, StreetPress devra s’arrêter.

    Je fais un don à partir de 1€
    Sans vos dons, nous mourrons.

    Si vous voulez que StreetPress soit encore là l’an prochain, nous avons besoin de votre soutien.

    Nous avons, en presque 15 ans, démontré notre utilité. StreetPress se bat pour construire un monde un peu plus juste. Nos articles ont de l’impact. Vous êtes des centaines de milliers à suivre chaque mois notre travail et à partager nos valeurs.

    Aujourd’hui nous avons vraiment besoin de vous. Si vous n’êtes pas 6.000 à nous faire un don mensuel ou annuel, nous ne pourrons pas continuer.

    Chaque don à partir de 1€ donne droit à une réduction fiscale de 66%. Vous pouvez stopper votre don à tout moment.

    Je donne

    NE MANQUEZ RIEN DE STREETPRESS,
    ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER