29/06/2010

Les députés répondent à StreetPress

La régularisation des travailleurs sans-papiers est-elle une manière de faire passer la pilule des retraites ?

Par Manuella Anckaert

Alors que l'agitation syndicale bat son plein contre la réforme des retraites le gouvernement a assoupli le 18 juin les critères de régularisation des salariés sans-papiers comme demandé par la CGT. Un moyen de faire passer la pilule des retraites?

1. Les faits:

Le Ministre de l’Immigration et de l’Identité Nationale Éric Besson a proposé vendredi 18 juin un projet pour assouplir les critères de régularisation des sans-papiers par le travail. La CGT a salué l’initiative qualifiée de « positive » et a parlé de « véritables avancées ». Les travailleurs sans-papiers – qui manifestaient depuis 8 mois – ont levé leurs piquets et se sont remis au travail, satisfaits par l’accord.

2. Le contexte:

Au même moment, le gouvernement tente de faire passer la réforme des retraites qui rallongerait l’age de départ à la retraite de 60 à 62 ans. Jeudi 24 juin, 2 millions de personnes ont défilé dans les rues contre cette réforme, à l’appel notamment de la CGT qui avait salué quelques jours plus tôt l’assouplissement des critères de régularisation des sans-papiers par le travail.

3. La question de StreetPress:

Est-ce que l’assouplissement des critères de régularisation des salariés sans-papiers est une manière de faire passer la pilule des retraites auprès des syndicats ?

4. La réponse des députés:

« S’il s’agit pour le gouvernement de faire passer la potion extrêmement dure des retraites, tant mieux pour les sans-papiers » commence Noël Mamère (Vert – Rhône Alpes). Pour Henri Emmanuelli (PS – Landes) « ils lâchent [sur les sans-papiers] parce qu’ils ne peuvent pas faire autrement. Il est très difficile de tenir face à des gens qui ont travaillé pendant des années, qui ont versé des cotisations, et leur dire ‘vous n’êtes pas d’ici’. Ça n’a plus de sens. » Un point de vu partagé par Noël Mamère: « C’est d’abord une belle victoire pour ceux qui les ont soutenus et qui montre que l’on ne perd que les combats que l’on ne mène pas. » 

A droite, on refuse l’idée d’un compromis: « Il ne faut pas voir parce qu’on prend dans un domaine – notamment celui que vous indiquez – une relation avec un autre domaine où on a des difficulté de communication avec les Français » explique Patrick Ollier ( UMP – Hauts de Seine).

Le projet de loi d’Éric Besson ne fait pas pour autant l’unanimité dans la majorité. Jacques Myard estime que « lorsqu’il y a un certain nombre de cas où les gens méritent d’être régularisés, on le fait. Mais il ne faut pas avoir de politique systématique de régularisation. Qu’on le veuille ou non, nous en sommes au début des flux migratoires, pas à la fin. Je suis pour une politique ferme mais humaine également. » D’autres comme Nicolas Dupont-Aignant ( DLR – Essonne ) expriment leur complet désaccord : « Il faut fermer les frontières et prendre le temps de digérer les générations récentes. Le plus important c’est de donner du boulot aux jeunes des quartiers. ». Il ajoute: « Ce que n’a pas compris la gauche, c’est que ce combat pour les sans-papiers, c’est le combat du Medef. C’est encore un cadeau fait au patronat. C’est tellement facile de faire pression sur les salaires. »

Quant à Hervé Mariton, il ne souhaite pas s’exprimer: « Je ne suis pas une machine à répondre aux questions. »

« On ne perd que les combats que l’on ne mène pas » Noël Mamère

Source: Benjamin Farhat et Manuella Anckaert | StreetPress