Après le buzz de l'expulsion des commémorations de l'abolition de l'esclavage la Brigade Anti-Négrophobie connait un petit succès. Moins radicaux que Kémi Seba «qui dénonce des choses réelles» ils prônent un anti-racisme communautaire.
Lundi 23 mai 15h10 – Place Pierre Dux. « Aucun média officiel n’a relayé une quelconque information sur la commémoration de l’esclavage qui appartient à l’Humanité entière ! Ce non-dit en dit beaucoup plus long que tous les propos et les injures racistes ! » Devant le Sénat, calé entre l’arrêt du bus 89 et la rue de Vaugirard, un petit groupe d’une soixantaine de militants tout de noir vêtu applaudissent le discours au mégaphone de Franco, le leader de la Brigade Anti-Négrophobie.
Buzz Le 11 mai 2010, une vidéo du collectif visionnée 700.000 fois avait crée l’émoi sur Facebook: Des militants arborant des t-shirts floqués « Brigade Anti-Négrophobie » se faisaient « encagés » avant d’être emmenés au commissariat « en toute illégalité », comme le racontait à StreetPress un des protagonistes de l’interpellation Mannone Cadoret.
Depuis ce dernier croule sous les demandes d’amis Facebook tandis la page officielle La Brigade Anti-Négrophobie a désormais plus de fans que celle StreetPress. Almamy Kanouté un des cadres du mouvement de se féliciter: « On a imprimé 1.000 t-shirts. Avec la vidéo on est en rupture de stock ! ».
Fédération anti-négrophobe La Brigade Anti-Négrophobie a été fondée en octobre 2010 sous l’impulsion de Franco (Aka Le Pacificateur dans le groupe de rap La Brigade) à la fin des 90’s) à la suite du coming-out raciste de Jean-Paul Guerlain .
Le collectif fédère le Mirada (le Mouvement International pour le Respect et l’Avancée des Droits des Afro-descendants) et l’Association Noire Citoyenne (ANC comme le parti de Nelson Mandela en Afrique du Sud), fondée par le même Franco en 2005.
« Cette année-là, il y eu les incendies criminels qui avaient tué 52 personnes d’origine africaine dont 33 enfants. Ces incendies étaient la conséquence d’une discrimination au logement qui touchait les Noirs. La même année, il y a eu la condamnation de Marc-Olivier Fogiel pour injure à caractère racial ». Un événement qui n’avait « pas fait réagir la classe politique et médiatique » dans les souvenirs de l’activiste: « A partir de là, on a décidé de constituer une association réalisant que les principes fondamentaux des droits de l’Homme n’étaient pas les mêmes en fonction des communautés ».
Happenings Acte de naissance de la Brigade Anti-Négrophobie : Octobre 2010 avec la formation de cordons de sécurité humains autour des points de vente Guerlain aux Galeries Lafayette . Puis ils participent à la Marche des esclaves à Nantes avec Malaak Shabbaz, la fille de Malcom X ou encore manifestent pendant la finale de la Coupe de France en pleine affaire des quotas.
Premier coup d’éclat : Tasha De Vasconcelos , superstar de la mode pose avec un de leur t-shirt au défilé Jean Paul Gautier pendant la Fashion Week 2011. Prends ça Patrick Lozès.
L’expulsion de la Brigade Anti-Négrophobie le 10 mai
On a l’impression qu’il y en a toujours que pour les mêmes. On voit l’islamophobie, l’homohobie
Kémi Seba « La crainte c’est qu’on nous taxe d’extrémistes communautaires parce nous réunissons une communauté », confie Almamy Kanouté l’autre leader de la Brigade Anti-Négrophobie au look très paramilitaire avec ses lunettes de soleil, sa tenue sombre et sa barbe de guerillero. Mais 5 minutes plus tôt le même Almamy Kanouté qui craint d’être taxé d’extrémiste assurait à StreetPress de « ne pas avoir peur de dire que Kémi Seba dénonce des choses réelles ».
Alors de dangereux « ethno-différencialistes » comme le fondateur de la Tribu Ka, la Brigade Anti-Négrophobie ? En tout cas, le sentiment partagé du « deux poids, deux mesures ». Almamy Kanoute : « On ne peut pas interdire un groupe extrémiste comme celui de Kémi Séba et en laissez d’autres comme le Betar (…) On a l’impression qu’il y en a toujours que pour les mêmes. On voit l’islamophobie, l’homohobie … Ils font du particularisme, alors faisons du particularisme »
Compétition victimaire Quand on les accuse de participer à une compétition victimaire, le leader Franco rétorque que l’argument est un moyen de « les culpabiliser à chaque fois qu’ils essayent de dénoncer une injustice ». Il livre à StreetPress sa conception de la lutte anti-raciste très loin du so 80’s « Touche pas à mon pote » : « Le racisme en général noie les spécificités du racisme, dont le racisme anti-noir. Ça ne revient pas à dire qu’on en a rien à faire des autres communautés victimes de racisme mais on estime que chaque communauté touchée doit s’organiser en tant que telle ».
Devant le sénat
Une théorie ethniciste de l’anti-racisme qui amène le leader de la Brigade à prendre parti pour une politique des quotas : « Si vous mettez un poids de 50 kilos à une personne durant toute sa vie, il ne faut pas penser qu’en lui enlevant, elle va retrouver d’emblée le dos droit. Il faudra des mesures compensatoires pour l’aider à se redresser ».
Niger, nigra, nigrum Au mégaphone devant les militants Franco explique comment le mot « dénigrer dont la racine vient du mot nègre » alimente le racisme. Une jeune femme parmi les manifestants applaudit à bâtons rompus et renchérit : « Et série noire alors ?! ». Puis Franco s’attaque à Jules Ferry: « cet homme qui a affirmé que les droits de l’Homme n’étaient pas valables pour les Noirs de l’Afrique Australe » et qui « rend suspect cette gratuité et cette obligation de scolarité ». « Nous pensons qu’il y a un système qui véhicule une idéologie subtilement raciste qui nous nourrit », explique t-il pour justifier le choix de ses exemples.
La petite troupe de militants applaudit fort mais pas sur qu’ils reviennent à d’autres rassemblements. La grande majorité d’entre eux étaient là « parce qu’il y a eu la vidéo ». Kim, nancéien à tresses de 22 ans trouve d’ailleurs que La Brigade Anti-Négrophobie « ressemble à SOS Racisme ».
On estime que chaque communauté touchée par le racisme doit s’organiser en tant que telle
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