04/07/2024

Tribune Naytou Camara, américano-guinéenne arrivée il y a six ans en France

« J'ai peur que les agressions augmentent avec le RN au pouvoir »

Par Sara Carraud

Si Naytou n’a pas encore la nationalité française et n’a donc pas le droit de vote. Mais elle tient à exprimer son inquiétude face à l'extrême droite et appelle les électeurs français à faire barrage.

En France, la montée de l’extrême droite suscite une profonde inquiétude parmi les minorités. Naytou, une femme noire et voilée, exprime ses craintes face aux discours de haine et aux discriminations croissantes. Installée en France depuis six ans, elle partage son expérience de racisme et de rejet, tout en appelant à une mobilisation citoyenne pour préserver les valeurs d’ouverture et d’inclusion.

« Je m’appelle Naytou et je vis en France depuis un peu plus de six ans. Mon parcours est celui d’une migrante. J’ai déménagé avec toute ma famille aux États-Unis pendant mon adolescence où j’ai fait mes études. Je suis de nationalité guinéenne et américaine, mais je n’ai pas encore la nationalité française. »

« Oui, j’ai peur de l’extrême droite »

« Un homme m’a dit un jour : “Je vais être franc avec toi, tu risques de ne pas être embauchée à cause de ton voile.” C’est choquant d’entendre cela. Si l’extrême droite prend le pouvoir, je crains que ce genre de comportements se multiplient. Oui, j’ai peur de l’extrême droite. Leur montée au pouvoir est alarmante car elle s’accompagne souvent de discours de haine et de rejet des minorités.

Étant une femme noire et voilée, je crains que leur arrivée n’aggrave les discriminations et les agressions que nous subissons déjà. J’ai déjà vécu des discriminations en France, à cause de la couleur de ma peau et de mon voile. J’ai été victime d’agressions verbales dans les rues de Paris. C’était traumatisant, d’autant plus que je portais un bébé de quelques mois. Mes enfants risquent de grandir dans un environnement où ils ne se sentiront ni en sécurité, ni acceptés. Comme toute maman, j’aimerais qu’ils aient les mêmes opportunités que les autres enfants, sans être jugés ou discriminés à cause de la couleur de leur peau ou de leur religion. »

« Cette peur, je l’ai déjà vécue aux États-Unis »

« Cette peur, je l’ai déjà vécue aux États-Unis pendant l’élection présidentielle de 2016. C’était un moment très effrayant pour nous, les minorités. J’espère que la même chose ne se reproduira pas ici, et que la France restera un pays accueillant. Nous avons choisi ce pays car nous croyons en ses valeurs d’ouverture et d’inclusion. Nous avons contribué à cette société et nous voulons continuer à le faire. Je n’ai pas encore le droit de voter parce que je ne suis pas encore française, mais je dirais aux Français qui ont ce droit de ne pas minimiser leur vote. Chaque vote compte. Ne vous laissez pas emporter par la haine et la peur. »