26/05/2024

Les manifestants dénoncent son impact sur l’environnement

Grande manifestation contre le projet Green Dock, gigantesque entrepôt qui doit s’installer à l'entrée de la Seine-Saint-Denis

Par Laura Hue

Ce samedi 25 mai, 2000 manifestants se sont rassemblés contre Green Dock, un projet d’entrepôt logistique géant sur les berges de Seine à Gennevilliers, qualifié d’« écocide » par les militants. La police a procédé à 58 interpellations.

Mairie de Gennevilliers (92) – Une militante distribue fièrement des stickers à l’inscription « Stop Green Dock » aux manifestants qui commencent à se tasser sur les marches, en ce début d’après-midi. L’un d’eux balade une pancarte sur laquelle on peut lire : « Moins d’entrepôts plus de moineaux ». Ce samedi 25 mai, à l’appel des Soulèvements de la Terre et de nombreuses associations et organisations, près de 2.000 manifestants se sont rassemblés contre Green Dock, un projet d’entrepôt logistique d’une longueur équivalente à deux stades de France, et haut comme un immeuble de 12 étages. Il doit être construit sur les berges de Seine, à proximité du port de Gennevilliers, juste en face d’une zone Natura 2000. Pour plusieurs associations locales, c’est l’un des rares espaces boisé de promenade et de loisir de la Seine-Saint-Denis. Ils jugent que le paysage sera « défiguré » si le projet aboutit. S’il est mis en place, l’entrepôt fonctionnera 24h sur 24 avec plus de 1.200 rotations de véhicules et poids lourds par jour. La mobilisation dénonce un projet « écocidaire », porteur d’inégalités environnementales et sociales dans une banlieue déjà sur-polluée et saturée.

« Je suis sûr qu’on va gagner »

« La banlieue Nord en a marre qu’on se serve d’elle pour mettre en place des entrepôts et des autoroutes », déclare fermement au micro Antoine Gaudin, président de l’association Protection Berges de Seine. Il poursuit :

« Ce n’est pas du tout green et c’est à peine un dock. »

Les prises de parole se suivent devant une foule conquise. Le député LFI Éric Coquerel s’indigne :

« Il n’y a pas un seul argument en faveur de ce projet, je ne m’explique même pas qu’il puisse exister ! »

Optimiste, le député termine : « Je suis sûr qu’on va gagner, ce projet n’a rien à faire là », et appelle le maire de Gennevilliers, favorable à Green Dock, à ne pas autoriser le permis de construire. Marine Tondelier, secrétaire nationale d’EELV parle, elle, d’un « projet périmé ». « On manifeste contre des gens qui ne comprennent rien à l’écologie », décrit-elle en haussant la voix.

Près de 2000 manifestants mobilisés contre le projet GreenDock. /

« Mort assurée » de la zone Natura 2000

Trois cortèges se mettent en place après les discours. Chacun a son nom et son drapeau : grand cormoran, ronce des bois et lézards des murailles. Pour la première fois de leur histoire, les Soulèvements de la Terre organisent une grande manifestation nationale en ville. « Les colis c’est pour Paris, les ennuis c’est pour la Seine-Saint-Denis ! Cet air est le nôtre ! Qui sème l’entrepôt récolte le chaos », clame Ambre, membre des Soulèvements de la Terre devant les cortèges qui se forment. Les manifestants arpentent les rues des Hauts-de-Seine (92) en direction de la Seine-Saint-Denis (93) sous les yeux étonnés des riverains perchés sur leurs balcons.

Les manifestants dénoncent une réduction des espaces verts aux portes d'un département déjà très bétonné. /

« T’es pas pour ce gros truc moche qui tue des oiseaux toi ? » « Ah non non », répond timidement Marius, huit ans, à sa mère. Salim aussi est venu en famille avec sa femme et ses deux enfants. Il se balade sur les bords de Seine depuis 20 ans et a encore espoir que ce projet soit abandonné. Pour lui, s’il est mis en place : « C’est la mort assurée de la zone natura 2000 ». Il assure même avoir constaté une diminution du nombre de grands cormorans depuis que la démolition des anciens entrepôts a commencé. Green Dock est pour le moment encore en discussion mais s’il est autorisé les travaux pourraient débuter bientôt, pour un début d’exploitation prévu en 2027. « Le peu de point positif qu’il y avait avec la nature et les espaces verts qu’on est venus chercher en quittant Paris, ça va peut-être disparaître », déplore la compagne de Salim qui ne comprend pas un tel recul.

La manifestation est bon enfant. « On est venus en soutien ! », expliquent en souriant Lucien, Raphaël et Lisa qui brandissent tous les trois un cormoran en carton, symbole du cortège à l’avant de la manifestation. Charlotte, elle, montre fièrement les huit bannières qu’elle a réalisé avec ses amis qui représentent chacune une espèce d’oiseaux de la zone Natura 2000. « J’avais besoin de m’engager contre Green Dock, c’est proche de chez moi et c’est complètement absurde un tel projet en 2024 ! », s’agace-t-elle.

Les grands cormorans /

Intervention musclée des forces de police

Vers 16 heures, pendant que l’avant du cortège chante en chœur en tapant des mains « nous sommes tous les enfants de la Seine », un groupe de manifestants à l’arrière quitte le cortège aux abords du parc des Chanteraines. « N’hésitez pas à rentrer dans le parc pour une balade contre l’empire logistique », appelle un militant à l’aide de son mégaphone. Les forces de polices s’engouffrent à leur tour dans le parc, pour les faire sortir. Damien, membre des Soulèvements de la terre Île-de-France assure qu’« il n’y avait aucune volonté d’affrontement de notre part. Nos militants ont réalisé une action symbolique de blocage de la zone logistique de Gennevilliers, la police les a chargés très violemment en tirant au LBD et une personne a été transportée à l’hôpital », affirme-t-il. Du côté de la police on affirme qu’« un groupe de manifestants qui s’est détaché du parcours pour commettre des dégradations » . Ils ont « immédiatement » été pris en charge par les policiers qui ont procédé à 58 interpellations, toujours selon la police.