Des gravats et des murs défoncés : voilà ce qu'il reste de l'appartement de Chafika. Virée par son bailleur, ce dernier aurait saccagé son appartement en représailles à sa plainte pour « expulsion illégale ».
Un appartement saccagé par son propre bailleur pour éviter qu’une famille expulsée vienne y ré-habiter… C’est sur ce constat consternant que des militants du Droit au logement et quelques voisins ont tenté d’alerter l’opinion mercredi 17 avril en organisant un rassemblement à Créteil (Val-de-Marne) devant les lieux du sinistre. Une affaire d’autant plus « honteuse » pour les manifestants que la famille concernée aurait été expulsée… illégalement.
Expulsion illégale Pour 600 euros d’impayés, Chafika, son mari handicapé, et leur fillette de 2 ans se sont retrouvés à la rue. La famille avait jusqu’au 15 avril pour quitter leur appartement selon l’avis d’expulsion, mais le propriétaire n’aurait pas attendu : le 1er avril, il a décidé en toute illégalité de changer les serrures et de jeter sur le pavé tous les meubles de l’appartement. Parmi ces affaires se trouvaient les médicaments de Nejma, la petite fille.
La loi prohibe pourtant au bailleur de mener lui-même l’expulsion, pouvant uniquement requérir l’intervention des forces de l’ordre sous mandat de justice. Avec l’aide du DAL, la famille a porté plainte pour « vol » et «expulsion illégale.»
Saccage Aujourd’hui, les 20 mètres carrés qui ont vu naître et grandir la petite fille sont complètement ravagés. Cloisons et lavabos détruits, trous énormes dans les murs, portes arrachées, installations électriques sectionnées. La mère de famille est en pleurs : « Ça fait trop mal ».
Parmi les militants, c’est la consternation générale. « Honte à l’Etat » scandent-ils. « Inhabitable, commente le porte-parole, Jean-Baptiste Eyraud, parcourant l’appartement encombré par les gravats. Ca alerte sur la façon dont le logement est traité dans ce pays. »
Ca alerte sur la façon dont le logement est traité dans ce pays
Le proprio n’y est pas allé de main morte…
C’est qu’en représailles, le bailleur serait venu dans l’appartement un jour ou deux après la plainte déposée par la famille pour tout saccager. Un bailleur dont les méthodes sont dénoncées par Chafika.
Avant l’expulsion, tout retard d’un ou deux jours de loyer était sanctionné par une coupure d’eau. « Pendant 15 ou 30 jours, je ne pouvais laver ma fille », raconte-t-elle. Depuis 3 ans, l’état de l’appartement était insalubre. Les murs étaient verts de moisissures, une odeur d’égouts s’en échappait. Une locatrice confirme « Dans tout l’immeuble l’évacuation ne marche pas, c’est souvent bouché. »
Au même moment, le propriétaire, au volant de sa berline blanche de marque allemande passe au ralenti, puis disparait, pied au plancher.Le bâtiment entier appartient à sa société immobilière (SCI). Dans les étages, d’autres voisins hésitent à parler, ils ont peur de lui.
Pendant 15 ou 30 jours, je ne pouvais laver ma fille
Chafika et sa fille Nejma
Hébergement d’urgence Avec l’aide du DAL, la famille a porté plainte pour « vol » et « expulsion illégale ». Le collectif demande que ce genre d’expulsion soit pénalement répréhensible.
« Le plus grave, c’est que la police n’a rien fait. La vérité, c’est que les autorités ont couvert [ce genre d’expulsion sauvage] », s’exclame Jean-Baptiste Eyraud au porte-voix. Il annonce l’envoi d’une délégation à la préfecture du Val-de-Marne pour loger la famille et poursuivre le bailleur.
En fin d’après-midi, la préfecture s’engage à héberger d’urgence la famille en hôtel, de leur trouver un logement viable, et suivre la procédure judiciaire contre le bailleur. Ce n’est pas fini, mais cette fois-ci, le sourire et le soulagement de la mère accompagnent ses larmes.
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