Le couple de Tokyoïtes a choisi de venir s'installer à Fukushima malgré la catastrophe. Aujourd'hui ils sont agriculteurs, en zone irradiée.
Le poêle à bois ronronne dans un coin du salon. Massanori et sa femme Yoshié se réchauffent après une journée de travail dans leur ferme de Towa. Une cité située à quelques kilomètres seulement de la zone évacuée après les accidents nucléaires de mars 2011. Le sol est gelé depuis plusieurs semaines. Les deux fermiers se sont donc lancés dans la construction d’un poulailler. Massanori espère y mettre dès le printemps une centaine de poules pondeuses
Déménagement Le couple n’a pas toujours porté des vêtements dépareillés et des bottes boueuses. Il y a deux ans, Massanori dirigeait l’agence tokyoïte d’une entreprise de déménagement. Yoshié était réceptionniste pour la société Tokyo gaz. C’est après le tremblement de terre qu’ils ont rejoint la préfecture de Fukushima.
« Ca faisait plusieurs mois qu’on avait décidé de quitter Tokyo. On avait déjà visité la région de Towa et décidé que l’on voulait venir ici, raconte Yoshié, le regard tourné vers les paysages enneigés entourant leur maison traditionnelle japonaise. Début mars, on était prêts à partir. Lorsque le tremblement de terre est survenu, on ne savait pas ce qui se passait là-bas. Les moyens de communication étaient coupés. On a choisi de venir quand même ».
Le 15 mars, alors que tout le Japon s’inquiète des dégâts subis par la centrale de Fukushima daiishi, les deux Tokyoïtes emménagent dans leur nouvelle ferme. A 45 km de la centrale. « On ne s’est pas vraiment inquiétés de la radioactivité », explique Massanori, ses mains burinées entourant une tasse de thé vert. « On avait hâte de venir ici. Et puis, on s’est dit qu’on pourrait être utiles. »
Radiations Depuis, le couple a appris à vivre en terre irradiée. Ici, les retombées radioactives ont pollué de manière significative les champs et les forêts. Les contrôles ont prouvé que les cultures absorbaient peu la radioactivité. Le couple s’est donc mis à faire pousser concombres, tomates, pomme de terre et aubergines. Ils les vendent au marché de producteur du coin après avoir contrôlé leur degré de contamination.
La radioactivité ? « On ne s’en inquiète pas vraiment, explique Massanori. Il y a des dangers partout. A Tokyo, il y a de la pollution. Ici, c’est la radioactivité. » A côté, Yoshié opine. Elle sort un document d’une pochette. Il s’agit de l’estimation personnalisée de son taux d’irradiation. 1,6 millisievert/an. Largement en-dessous de la réglementation. Est-ce que ça la rassure ? « Pas vraiment. » Avec un sourire énigmatique, elle ajoute : «Mais je vais garder ce document. Si un jour les choses tournent mal pour moi, ce pourrait être utile».
Massanori et Yoshié Kobayashi
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