Entre des GIs qui se lancent dans la parapsychologie et un journaliste loser, l'histoire d'une expérience menée par l'armée américaine entre les années 1960 et 1980. Ca se regarde, écrit Benjamin Gans.
La première scène du film Les chèvres du Pentagone réalisé par Grant Heslov, m’évoque tout de suite un souvenir. En 1986, j’ai 13 ans, je suis en cours d’espagnol et je m’ennuie ferme. Alors je regarde le mur en face de moi, je me concentre hyper fort, persuadé que je peux le traverser par la seule force de ma pensée… Bon, on n’est pas fini à cet âge, on a le droit d’être un peu con.
Un film débile s’il n’était pas inspiré de la réalité
Par contre, quand c’est un général de l’armée américaine, qui, lui, essaye vraiment de traverser le mur et se fracasse la tête sur le placo, comme dans cette première scène du film, on est à la fois affligé et amusé par sa connerie abyssale. Et ce film serait complètement débile s’il n’était pas directement inspiré de la réalité et plus précisément d’une sérieuse enquête intitulée The Men who stare at goats du journaliste Jon Ronson. Du coup, non seulement cette fiction n’est pas stupide mais elle en devient à la fois drôle, acide et terrifiante. C’est un traveling dans la psychologie totalement absurde du haut commandement militaire américain.
Les GI deviennent parapsychologues
Les Chèvres du Pentagone raconte comment le Pentagone a créé à partir de 1960 et jusque dans les années 1980, une mission de réflexion impliquant jusqu’à plusieurs centaines de personnes pour mettre au point des techniques de combat alternatives. Très alternatives. Vous rirez sans doute en voyant Bill Django (Jeff Bridges), personnage directement inspiré du très réel Jim Channon, théoriser la naissance de sa nouvelle armée de Jedi dans la New Earth Army. Vous hallucinerez en le voyant convertir de sévères GI en parapsychologues capables de visualiser à plusieurs milliers de kilomètres de distance un prisonnier américain. Vous serez incrédules en voyant l’un d’entre eux tuer une pauvre chèvre innocente rien qu’en la fixant intensément du regard. Sachez en tout cas que tout est vrai, surtout le pire et le plus loufoque.
Un journaliste loser
Le spectateur suivra les pérégrinations de Bob Wilton, journaliste loser incarné par Ewan Mac Gregor qui tient le scoop du siècle en tombant par hasard sur l’énigmatique et impassible Lyn Cassidy (George Clooney). Le scénario patine dans le sable du désert irakien au bout d’une heure. Mais il finit par s’en sortir, et avec les honneurs. Car on saisit finalement où le réalisateur veut en venir.
Les conséquences de ces techniques héritées de ces expérimentations New Age ont connu leurs tristes heures de gloire ces dernières années en Irak. La fiction rejoint l’actualité quand on sait que l’armée américaine infligeait aux prisonniers de Guantanamo des tortures basées sur la diffusion en continu de musique yankee telle que Staying Alive des Bee Gees, Baby one more time de Britney Spears ou même la chanson pour enfants I love you pourtant chantée par le super gentil Barney, le dinosaure violet du programme tv pour enfants.
Les Chèvres, la bande annonce:
La fiche technique :
Les Chèvres du Pentagone, réalisé par Grant Heslov, avec George Clooney, Ewan McGregor et Jeff Bridges. 90 mn.
Vu au: Gaumont Disney Village en salle 5, samedi 13 avril à 16 h.
Taux de remplissage de la salle: à moitié pleine
J’y vais: en couple
On mange: rien
La note: 3/5
Le côté obscur d’une force qui devait être pacifique
Voilà comment certaines techniques de la très – voire trop – angélique New Earth Army (inspirée du très réel First Earth Batallion) a été dévoyée et détournée de sa vocation première d’armée de la paix. On comprend mieux la comparaison employée tout au long du film entre les Jedi et le côté obscur de la force dans lequel s’est fourvoyé le fourbe et cynique Larry Hooper (Kevin Spacey), disciple de Bill Django.
Vous aimez l’humour pince sans rire ? Vous rêviez d’être un Jedi ? Mesdames, êtes-vous curieuses de voir les fesses de George Clooney et d’Ewan Mac Gregor ? Vous croyez au pouvoir terrifiant de la pensée et surtout de la connerie des militaires ? Alors voilà quelques bonnes raisons d’aller voir Les Chèvres du Pentagone.Source: Benjamin Gans | StreetPress