Sur StreetPress, Alexis Helcmanocki de l'institut GfK, explique pourquoi un Français sur deux voudrait que l'information en ligne soit gratuite et sans pub. Et comment les pure players sont mieux placés pour inventer les business modèles à ven
Bonjour Alexis, les 50% d’internautes français qui ne veulent pas payer pour l’information en ligne et refusent qu’elle soit financée par la pub, ils vivent dans le monde de Bisounours ?
A ben oui ! Il y a le mythe, en France, de l’Internet où tout est gratuit.
Les Français et l’information sur le web, ça n’est pas encore tout à fait ça…
Oui. « Le Monde », vous le payez en kiosque, ça vous paraît évident. Sur Internet, est-ce que vous acceptez de le payer ? Pas vraiment. Et est-ce que vous accepteriez que la pub finance l’information ? Pas vraiment. En France, on est bonnet d’âne.
Ni payant, ni pub, on fait comment, nous ?
Il y a un modèle, à prendre avec des pincettes, qui vient des Etats-Unis : Pour butiner et consulter quelques infos de temps en temps sur un site d’info, c’est gratuit. Vous lisez jusqu’à 25 articles par mois, c’est gratuit. Après, on vous demande une obole. Et si vous voulez avoir acès à tout, alors vous payez un abonnement mensuel.
Et ça pourrait se démocratiser avec l’iPad…
Le iPad est attendu par la presse américaine comme le messie, qui serait capable de les sauver d’un monde où les gens ne payent pas. Et il semblerait qu’on s’achemine vers un modèle avec les 25 premiers articles gratuits et un vrai confort de lecture, dans l’espoir de faire s’abonner les internautes.
Alexis Helcmanocki est le directeur du pôle telecom, IT & Consumer Electronics de la société GfK Custom Research France, un institut d’études marketing.
Les Français et l’information sur Internet
Selon l’étude GfK, 89% des Français ne sont pas prêts à payer pour de l’information en ligne. 39% acceptent la publicité , tandis que 50% la refusent. Seuls 8% des Français sont prêts à payer selon le panel de GfK. A l’international, les plus enclins à payer pour de l’information sont les Suédois (23%), les Hollandais (20%), les Anglais (18%) et les Américains (17%).
Et vous, vous payez pour vous informer sur Internet ?
Principalement, la presse éco. Je suis abonné aux Echos papier et web.
Vous payez, parce que l’information économique, ce sont souvent des informations exclusives. De la même manière que Mediapart vend du scoop.
C’est intéressant de le prendre comme ça. Peut-être que ce qui est imprimé en kiosque n’aurait de valeur que par le fait qu’il est imprimé. Du coup, en digital, on ne payerait pas. Mais à l’inverse, s’il y a de investigation, alors il y a peut-être un premium que le consommateur est prêt à payer, parce que c’est – entre guillemets – une exclu Internet.
Ca veut dire que l’info qu’on nous vend doit avoir une valeur ajoutée par rapport à ce que l’on peut lire ailleurs.
Oui. Pour qu’elle ait une valeur, il faut qu’il y ait une information exclusive. Et dans ce cas-là, elle est forcément digitale, parce que c’est le seul moyen de la distribuer : C’est du chaud ; à peine validée, elle est publiée ; elle s’adresse à une cible limitée d’abonnés.
Qu’est-ce qu’on fait, les journalistes comme moi, qui ne travaillons que sur Internet ?
La presse 100% Internet ? Elle a plus de chance que la presse mixte ! Je pense sincèrement que vous avez plus de chance de survie dans cet environnement que la presse classique qui est en train de rater sa bascule et de faire les mêmes conneries que ce qu’a fait l’univers de la musique lors de la bascule au digital. Vous voyez ?
Vous dites cela parce que les sites pure player sont plus adaptés au support internet ?
Bien sûr ! Et le support est en train d’évoluer. Le support, ce n’est pas forcément le PC. Quand, peut-être à l’horizon 2011, on aura en France 1,5 million ou 2 millions de tablettes, peut-être qu’on va trouver le modèle.
La version Internet doit être moins chère parce qu’elle est digitale, parce qu’elle n’a pas les coûts de distribution et parce qu’il faut trouver des sponsors spécifiques qui eux sont intéressés par un contact digital tel qu’on sait le faire aujourd’hui.
Entre temps, la question que tout le monde se pose, c’est: Qu’est-ce qu’il va rester de la presse? Et un monde sans journalistes, ça s’appelle un monde totalitaire.
« Ma crainte, c’est que la presse électronique fasse les mêmes erreurs que la musique »
« Ma crainte, c’est que je ne voudrais pas que dans la presse électronique, on fasse les mêmes erreurs que dans la musique », nous confie Alexis Helcmanocki. « C’est-à-dire que si un journal n’est plus imprimé mais diffusé électroniquement, vous devriez le payer moins cher. Il semblerait que ça ne soit pas le modèle sur lequel les médias partent. Et que l’abonnement physique coûte le même prix que l’abonnement digital. Et on a vu ce que ça a donné dans la musique ».
Source: Johan Weisz | StreetPress