28/02/2012

Tu ne diras plus jamais « Lol » devant un #PointGodwin

Mike Godwin: « On ne peut pas accuser quelqu'un d'être un nazi en toute désinvolture »

Par a/b

Sur StreetPress Mike Godwin inventeur de la loi du même nom est très sérieux: « Il y a un problème de responsabilité de la parole. » Car oui, avant d'être une vanne le point Godwin « doit responsabiliser chacun. » Prends ça la génération Y!


Bonjour Mike. Vous pouvez expliquer le concept de Loi Godwin ?
Cela correspond à la définition anglaise que j’en ai donnée et qui est reprise par Wikipédia à savoir: Plus une discussion en ligne dure longtemps, plus la probabilité d’y trouver une comparaison impliquant les nazis ou Adolf Hitler s’approche de 1. La probabilité de l’évocation du nazisme dans une discussion en ligne est de 100 pour 100 en fait. J’ai remarqué lors de mes observations que c’est facile d’être vite en désaccord avec quelqu’un sur Internet: il n’y a qu’à voir ce qui se dit dans les forums pour s’en rendre compte. Et forcément au bout d’un moment, cela conduit certains à traiter leur interlocuteur de nazi, d’Hitler ou de faire une comparaison sur la seconde guerre mondiale. C’est ça la loi Godwin.
Vous voyez une différence entre la loi Godwin et le point Godwin ?
Je crois que la notion de « point Godwin » est née avec les francophones et est principalement utilisée par eux. Chez vous, le point Godwin a deux significations : Ou cela signifie que le niveau Godwin est atteint. Ou on décerne un « point Godwin » comme on donne un mauvais point. Les francophones s’amusent pas mal avec le « point Godwin » en imaginant donner un point virtuel à celui qui l’atteint. Mes fans francophones me disent que c’est de plus en plus fréquent dans les discussions.
«La référence à la seconde guerre mondiale s'immisce dans le dialogue politique de façon démesurée ou hyperbolique» Mike Godwin

Existe-t-il des points Godwin pertinents ?
Je ne sais pas exactement ce qu’il en est en France mais aux Etats-Unis, la référence au nazisme est souvent mentionnée dans le discours politique. Parfois c’est approprié, parfois ça ne l’est pas. Par exemple, quand les politiques parlent du génocide cambodgien ou rwandais, la comparaison avec la seconde guerre mondiale peut-être appropriée. En revanche, il y a des situations où la référence à la seconde guerre mondiale s’immisce dans le dialogue politique de façon démesurée ou hyperbolique. Dans ce cas là, il y a un manque de responsabilité dans le discours et la loi Godwin s’applique. L’utilisation sans fondement du nazisme ou d’Hitler dans la sphère politique reflète une certaine perte de repère, un chamboulement des perspectives politiques.
Sans Twitter le point Godwin se serait-t-il aussi popularisé ?
C’est un lieu d’échange très utilisé. Je possède un compte Twitter et je l’utilise tous les jours; j’ai des followers et je suis moi-même un follower donc j’observe les discours qui se tiennent. Il est évident que la limitation imposée par Twitter joue un rôle important dans le developpement l’expression. Ces réseaux où nous sommes contraints de parler vite et court modifient très certainement notre langage et notre rapport à la réalité. C’est un problème de responsabilité de la parole qu’il faut apprendre à mesurer. C’est une des raisons pour laquelle j’ai créé la Loi Godwin.

Le point Godwin n’est donc pas qu’une vanne ?
Le but que j’avais en 1990 en étudiant la loi Godwin - et que j’ai toujours-  est de faire prendre conscience de la violence d’une telle comparaison. La loi Godwin est là pour rappeler que le recours facile à la caricature ne peut pas s’appliquer à certains événements dramatiques de l’Histoire. Ce que j’espère c’est responsabiliser chacun sur l’utilisation de la blague sur Hitler ou les nazis. C’est une façon de rendre les gens plus prudents, plus réfléchis dans l’utilisation d’une telle évocation historique. On ne peut pas accuser quelqu’un d’être Hitler ou un nazi en toute désinvolture.