Selon des documents rédigés par les services de renseignements, le ministère de l’Intérieur envisage la dissolution de trois associations pro-palestiniennes : le Comité Action Palestine, Samidoun Paris Banlieue et Capjpo EuroPalestine.
« Dans le contexte actuel, prononcer la dissolution d’une association qui défend la Palestine serait plus que grave », soupire Dominique Cochain, avocate de Capjpo EuroPalestine. Selon deux notes rédigées par les services de renseignements français, que StreetPress a pu consulter, le ministère de l’Intérieur envisage de demander la dissolution – parmi d’autres structures – de plusieurs associations engagées en faveur de la cause palestinienne : le Comité Action Palestine, Samidoun Paris Banlieue et Capjpo EuroPalestine. Trois associations radicalement anti-israéliennes, accusées de tenir des propos complaisants vis-à-vis de la « résistance palestinienne » du Hamas.
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La note consultée par StreetPress est datée de décembre et envisage une dissolution du Comité Action Palestine en janvier ou février. Rien de très surprenant puisqu’en mars 2022, Gérald Darmanin avait déjà tenté la dissolution de l’association bordelaise. Il s’était à l’époque cassé les dents sur le Conseil d’État. « La dissolution porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’association et à la liberté d’expression », avait tranché dans sa décision la plus haute juridiction administrative. Beauvau envisagerait de retenter sa chance sur une nouvelle base juridique. On serait dans une « logique d’acharnement », gronde Vincent Brengarth, l’avocat du Comité Action Palestine. D’autant plus grave qu’il intervient « dans un contexte de criminalisation des expressions en soutien aux droits de la population civile palestinienne », soupire-t-il.
Interdire un slogan
Également dans le viseur de Beauvau, la branche française de Samidoun Paris Banlieue, un « réseau international de solidarité avec les prisonniers palestiniens ». « Sa branche allemande vient d’être dissoute en même temps qu’était prononcée l’interdiction sous peine de poursuites du slogan : “Du fleuve à la mer, la Palestine sera libre” », détaille le politologue Jean-Yves Camus. La France pourrait être tentée d’emprunter le même chemin, sur les mêmes bases argumentaires, pour contrer la popularisation d’un slogan jugé radical, car souvent interprété comme une volonté d’éradiquer l’État d’Israël. C’est seulement une manière de revendiquer que « tous les Palestiniens soient libérés de toutes [les] oppressions », plaide de son côté dans Libé Rima Hassan. L’activiste franco-palestinienne rêve d’un État binational et revendique « une égalité de droits », sans l’associer « à une logique anti-israélienne ». « Je n’utilise pas ce slogan car effectivement je trouve qu’il porte à confusion. Mais interdire une association sur cette base serait une atteinte à la liberté d’expression grave », commente un autre militant pro-palestinien.
Les documents que StreetPress a pu consulter évoquent aussi l’hypothèse d’une dissolution de Capjpo EuroPalestine. Une association connue notamment pour ses campagnes en faveur du boycott des produits israéliens. Selon nos informations, son cas n’est pas encore tranché. « Je pense que ce sont des demandes télécommandées », commente Dominique Cochain, l’avocate d’EuroPalestine. Elle voit derrière ses hypothèses de dissolution la marque d’un politique plus que celle d’un quelconque service de renseignements. « Au moins en partie, oui », abonde une source bien informée et par ailleurs plutôt favorable à la dissolution de ces groupes :
« Le dîner du Crif approche, le gouvernement aura besoin de faire des annonces. »
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