En détention provisoire depuis le meurtre de Mahamadou Cissé, l’ancien militaire octogénaire Hocine A. a été remis en liberté le 21 juillet dernier. La famille organise un rassemblement ce mardi pour protester.
« C’est avec colère et tristesse qu’on a appris cette nouvelle. » Au téléphone, Assetou Cissé est dégoûtée. Ce vendredi 21 juillet 2023, elle a appris la remise en liberté d’Hocine A., l’ancien militaire octogénaire qui a tué son frère Mahamadou d’une balle dans le thorax. Depuis le 9 décembre 2022, soir de la mort du vingtenaire, Hocine A. était en détention provisoire, en attente de son procès. Il avait été mis en examen pour « meurtre, détention d’arme illicite et violence avec arme sur personne dépositaire de l’autorité publique ». Dans un premier temps, Hocine A. a avoué devant les enquêteurs avoir tiré volontairement, avant de se rétracter ensuite. Il est désormais sous contrôle judiciaire. Assetou Cissé lance :
« C’est totalement scandaleux qu’un assassin poursuivi pour tout ça soit dehors au bout de six mois. On n’y croit pas, c’est irréel. »
Dans un communiqué publié ce lundi, l’avocat de la famille Saïd Harir souligne que cette mise en liberté intervient « alors qu’aucune confrontation n’a été réalisée entre le mis en examen et le témoin direct des faits, sans que la reconstitution n’ai été réalisée, et sans le retour de l’expertise balistique ». « L’enquête judiciaire ne fait que commencer ! », note Assetou.
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Un rassemblement le 25 juillet devant le tribunal
La soeur de Mahamadou n’est cependant « pas surprise » par cette décision :
« Dès les prémices de notre affaire, j’ai vu un parti-pris de la justice, j’ai alerté. J’aurais aimé ne pas avoir raison. »
Depuis la mort de son frère, elle et sa famille craignaient « une injustice ». Ils ont ressenti une « stigmatisation de l’affaire, car elle s’est déroulée dans une cité ». Le 11 décembre, le procureur d’alors, Matthieu Bourrette – il a quitté son poste le 1er juillet 2023 –, évoque la version d’Hocine A. qu’il qualifie de « crime par exaspération ». Des propos qui ont profondément choqué la famille. « On n’est pas soutenu, on n’est pas légitime. On est accusés, on n’est pas victimes », avait déclaré Assetou lors d’un rassemblement mi-juin à Reims (51).
Contacté, le procureur par interim de Reims a expliqué la décision du juge d’instruction, qui a estimé que les objectifs « étaient remplis » dans le cadre d’une liberté assortie d’un contrôle judiciaire. Hocine A. ne peut notamment pas quitter le territoire, son passeport et sa carte d’identité ont été saisies. il ne peut pas plus se rendre dans le département des Ardennes, rentrer en contact avec les témoins ou parties civiles. Il est hébergé dans le Sud de la France. « Le parquet était favorable à cette remise en liberté assortie d’un contrôle judiciaire », a complété le magistrat (1).
Dans le viseur de la famille se trouve aussi le soutien du collectif d’extrême droite Place d’Armes, qui avait publié une pétition avec l’association Générations Harkis pour qu’Hocine A. soit libéré et placé sous contrôle judiciaire. « Ils ont réussi », lâche Assetou.
La famille Cissé prévoit un nouveau rassemblement ce mardi 25 juillet 2023 devant le tribunal judiciaire de la cité champenoise à 14h. « On veut montrer notre incompréhension par rapport à cette décision et alerter tout le monde qu’un homme dangereux est dehors. C’est un ex-militaire qui sait manier les armes », pointe Assetou. Dans un communiqué, d’autres collectifs ont apporté leur soutien à Assetou et sa famille, notamment le comité Adama, le comité Justice pour Claude Jean-Pierre, l’association Justice et Vérité pour Yanis, le collectif Vérité pour Alassane ou encore le collectif Urgence notre police assassine. Les proches de Mahamadou ont également décidé d’affréter un bus de Nanterre (92), où une partie de la famille réside, pour se rendre au rassemblement.
Même le maire de Charleville-Mézières (08), Boris Ravignon (LR), a écrit un courrier au président du tribunal de la cour d’appel de Reims. Il y souligne « l’incompréhension de nombreux habitants » qu’a suscité la remise en liberté. Assetou conclut :
« C’est une guerre qu’on nous déclare, c’est le sentiment qu’on a. On tue mon frère une deuxième fois. On tue toute une famille, tout un quartier. C’est un symbole fort, surtout avec ce qu’on vient de vivre avec Nahel. »
(1) Edit le 24 juillet à 18h24 : ajout de la version du parquet de Reims.
Contactés, les avocats d’Hocine A. n’ont pas répondu aux sollicitations de StreetPress. En attente de son procès, Hocine A. est présumé innocent.
Photo de Une par LA FAKH – Droits réservés. _
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