Deux enquêtes ont été ouvertes après la révélation par StreetPress de deux groupes Facebook où plusieurs milliers de policiers s’échangent des messages racistes. Facebook va collaborer avec la justice, pas StreetPress. Explications.
Jeudi 5 juin au soir, StreetPress révélait que des milliers de fonctionnaires de police partageaient des messages racistes dans un groupe Facebook baptisé « TN Rabiot Police Officiel ». Moins de 24 heures après, le ministre de l’Intérieur saisit le parquet de Paris. Le dossier est éminemment politique et la Brigade de Répression de la Délinquance contre la Personne (BRDP) en charge des investigations est priée d’agir promptement. Le jour même, une réquisition judiciaire (en anglais) est envoyée à Facebook. Le document ne vise que les administrateurs du groupe. Une seconde réquisition est également envoyée à… StreetPress. Rebelote quelques jours plus tard, après la publication d’une seconde enquête dévoilant l’existence d’un second groupe Facebook aux contenus similaire, baptisé « FDO 22 Unis » : le réseau social et notre directeur de publication, Jo Weisz, sont destinataires d’une nouvelle réquisition.
Nous avons, par l’intermédiaire de notre avocate Valentine Rebérioux, indiqué à la BRDP que nous ne donnerons pas suite à ses demandes. Pourquoi ne pas collaborer avec la justice dans un tel dossier ? Affaire de principe : même si une telle procédure nous semble opportune, nous ne sommes pas des auxiliaires de police. Comme nous ne fournirions pas des images tournées en manif, nous ne communiquerons pas les identités des policiers mis en causes. Notre rôle est uniquement d’informer le public. Aller au-delà mettrait en péril la confiance qui nous lie à nos interlocuteurs. D’autant que les autorités disposent des moyens nécessaires pour mener de telles investigations à terme.
Facebook va donner des noms
Facebook a, de son côté, pour habitude de se référer au droit américain qui autorise l’expression de propos racistes (malgré certaines exceptions) et ne collabore pas toujours aux enquêtes sur ces sujets. Une ligne de conduite que connaissent certains policiers présents dans ces groupes où s’échangent des messages racistes. Après la publication des enquêtes de Streetpress, l’un d’eux commente :
« À mon avis, c’est pas gagné. J’ai fait une réquisition à Facebook en 2017 suite à une plainte. Je suis parti en retraite le 31/12/2018 et je n’avais aucune réponse de ma réquisition. »
Sauf que cette fois le réseau social a indiqué à StreetPress qu’il collaborerait avec la justice. Mais aussi qu’il avait, depuis la publication de l’article, procédé à la modération de certains contenus. Une décision politique, sur un sujet – le racisme dans la police – qui depuis la mort de Georges Floyd aux États-Unis a pris une dimension planétaire. Il faut agir et le montrer !