Cette année, plus d’une centaine de militants LGBT+ ont dénoncé la présence de LREM, de la police, ainsi que de plusieurs grosses entreprises à la Pride parisienne.
Paris 14ème – Devant l’église Notre-Dame des Champs la Pride bat son plein quand une dizaine de coups de sifflets retentissent. Un groupe d’une centaine de personnes s’arrête et fait marche arrière. Elles se postent devant le char du personnel LGBT d’Air France, Person’Ailes, en brandissant des pancartes « Air France : complice des politiques racistes », « Déporter des migrant.e.s, c’est ça votre fierté ? », « Vos fiertés ne valent pas leur vie ». Toutes en choeur, les Gouines contre les déportations scandent : « État raciste, Air France complice ! » sous le regard interloqué des passants. Tout avait été préparé en sous-marin sur la messagerie cryptée Signal.
Une marche des fiertés anticapitaliste
« Le collectif est constitué de militantes lesbiennes qui ont participé l’an dernier à la prise du cortège de tête en non-mixité qui avait rassemblé 2.500 personnes », explique Irène (1), qui a participé à l’organisation de l’action. On retrouve également de nombreuses personnes qui se trouvaient en tête de cortège de la manifestation Nous Toutes, le 24 novembre dernier. « Cette année, avec le contexte des luttes pour les droits des migrantes et migrants, on a décidé de réagir à la participation d’Air France », continue Irène. Célia (1), une autre organisatrice, ajoute : « Air France travaille conjointement avec le ministère de l’Intérieur pour faciliter l’expulsion des migrants et migrantes sans papiers. »
« Cette année, avec le contexte des luttes pour les droits des migrantes et migrants, on a décidé de réagir à la participation d’Air France », déclare Irène, une des organisatrices. / Crédits : Rémi Yang
La présence de grandes entreprises comme Air France, la SNCF, MasterCard, ou encore Google à la marche des fiertés met en rogne une partie des militants LGBT+. L’année dernière, le cortège de tête auquel les Gouines contre les déportations avaient participé s’était réuni contre le pinkwashing. « Le pinkwashing, c’est quand un événement politique est dépouillé de son sens et transformé en une fête pour redorer son image. À la base, la Pride c’est un mouvement politique, idéologique », rappelle Mischa, du collectif des Délaissé-e-s des fiertés. Cette année, son groupe a pris la tête du cortège pour mettre en lumière « les violences médicales commises contre les personnes intersexuées ».
À la #Pride2019, le collectif des Gouines contre les déportations dénonce la complicité d'Air France dans l'expulsion de réfugiés LGBT à coup de « État raciste, Air France complice! » pic.twitter.com/KRsfCNpY7v
— Rémi Yang (@RemiYang) 29 juin 2019
« On est par essence anticapitalistes. C’est pour ça qu’on trouve que la présence des chars de Google ou MasterCard est irrespectueuse. Le capitalisme rend les minorités précaires et nous tue. On se bat contre ça », martèle le militant. Une vision partagée par les Gouines contre les déportations. « On a la même position envers la présence de LREM, du Flag [Personnels LGBT+ du ministère de l’Intérieur et de la Justice] ou de la SNCF à la Pride que pour Air France. Ce sont des entreprises qui participent à des politiques mortifères pour les personnes LGBT+ », dénonce Célia.
« On reviendra ! »
Sur le boulevard Montparnasse, l’action des Gouines contre les déportations ne fait pas l’unanimité. Sur le trottoir, un groupe de participants à la Pride lance des : « Du balai, du balai, du balai ! ». Sur le char d’Air France, le personnel se remet à danser alors que les militantes rythment leur marche de : « Et pierre par pierre, et mur par mur, nous détruirons les centres de rétention ! »
L’action avait pour but de forcer le char de Person’Ailes à couper sa musique pour amorcer un dialogue avec le personnel LGBT+ d’Air France. / Crédits : Rémi Yang
Préparée depuis quelques semaines, l’action avait pour but de forcer le char de Person’Ailes à couper sa musique pour amorcer un dialogue avec le personnel LGBT+ d’Air France. « Il nous ont dits : “Vous ne monterez pas, on ne vous laissera pas parler” », lance Sarah (1) après avoir tenté de négocier. Tant pis. Vers 16h15, des coups de sifflet marquent la fin de la manif’ sauvage. « On reviendra ! » chantent les militantes en se repliant sur le trottoir. Le passage du char Flag ravive la flamme d’une trentaine d’entre elles qui s’élancent tout autour de lui en criant : « Tout le monde déteste la police ! »
(1) Les prénoms ont été modifiés à leur demande.
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