La police ouvre des permanences dans des centres d’hébergement d’urgence pour sans-papiers. La nouvelle, révélée par StreetPress, fait grincer des dents les ONG : « Les centres d’hébergement sont des lieux de protection. »
Le gouvernement est en train de franchir une nouvelle étape en matière de lutte contre l’immigration clandestine. Selon des informations de StreetPress, le ministère de l’intérieur, via les préfectures, a demandé à plusieurs bailleurs sociaux de mettre à disposition des bureaux pour les fonctionnaires de police dans certains centres d’hébergement d’urgence. Chaque semaine, de nombreux exilés assignés à résidence doivent pointer au commissariat le plus proche. Le but de cette nouvelle mesure ? Faire signer les migrants dans leur centre d’accueil plutôt que de les faire se déplacer.
Dans le monde du logement social, la nouvelle a du mal à passer. « Les centres d’hébergement sont des lieux de protection. Si on généralise les contrôles, les gens n’auront plus confiance », s’étrangle Florent Guégen de la Fédération nationale des acteurs du logement social (FNARS) :
« Les travailleurs sociaux n’ont pas à participer à des mesures de contrôle, de contrainte ou de signalement. »
Dans le 93, la mesure est déjà effective. Ainsi, les policiers posent, une fois par semaine, leurs cartons dans deux centres d’hébergement d’urgence installés à Aubervilliers et à Neuilly-sur-Marne. Une matinée durant, les fonctionnaires s’installent dans un petit bureau, mis à disposition par le bailleur social Adoma qui administre les deux lieux. « Quand on crée un centre, on définit dans une convention le régime qui permet de faire respecter l’assignation à résidence », explique la préfecture :
« Dans le cas d’Aubervilliers, le commissaire trouvait que c’était plus simple de venir une fois par semaine plutôt que de faire déplacer les migrants. »
Partage des tâches
Le dispositif pourrait être étendu à toute la France. « Un responsable de la sécurité d’Adoma nous a dit que ce serait le cas, surtout pour les centres isolés », indique de son côté une travailleuse sociale, qui travaille dans un centre d’hébergement de province. La cause de cette évolution ? L’ouverture à la rentrée des Prahda : un nouveau type de centre d’hébergement d’urgence réservé, en partie, aux déboutés de l’asile, qui sont souvent assignés à résidence. Ces derniers sont installés dans des hôtels Formule 1, anciennement propriété du groupe Accor. Ils sont également gérés par le bailleur social Adoma.
Dans un mail interne que StreetPress a pu consulter, la direction du bailleur informe ses salariés des nouvelles dispositions. La police pourra intervenir dans les centres, écrit la directrice du logement :
« Des consignes ont été passées via la DGEF [direction générale des étrangers en France, un service du ministère de l’intérieur] aux préfets pour privilégier l’accès à un local sur site aux services compétents pour le suivi des assignations. »
De leurs côtés, les travailleurs sociaux qui interviennent dans les hébergements type Prahda se verront confier de nouvelles missions, dont la distribution des convocations de la préfecture aux exilés. Cette mesure fait écho à une circulaire publiée le 12 décembre par le Ministère de l’Intérieur, dévoilée par le Monde. Celle-ci prévoit la délivrance rapide d’une obligation de quitter le territoire français aux hébergés en situation irrégulière. Elle prévoit également la visite fréquente d’une équipe mobile de l’OFII et de la préfecture dans les centres d’hébergement d’urgence pour « examiner les situations administratives » des mêmes hébergés.
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