Plutôt que d’engorger les tribunaux, le policier Yves Milla, propose d’annuler le délit qui pèse sur les consommateurs de cannabis.
Nous devons arrêter de marginaliser les consommateurs de cannabis. N’importe qui peut fumer, des mamans, des ados, des vieux.
Quand on surprend des gamins à la sortie du collège par exemple, quel moyen a-t-on aujourd’hui pour faire en sorte qu’ils arrêtent de fumer, pour prévenir plutôt que punir ? La consommation de cannabis est toujours un délit en France.
Donc soit on jette le joint et la boulette de shit avec, soit – en vertu de la politique du chiffre instituée par Nicolas Sarkozy – on lance une procédure : on embarque trois gamins sur tout le groupe, histoire de marquer le coup, suivent contrôles d’identité, PV au commissariat, et procédure pénale avec risque de casier judiciaire.
Dans le premier cas, on ne sert à rien, les parents ne seront pas prévenus et ne pourront pas avoir de discussion avec leurs enfants sur le sujet. Dans le second, on engorge les tribunaux, on oblige des familles à payer des frais d’avocat (entre 1.500 – 2.000 euros) et on monopolise les forces de police sur des missions qui n’en valent pas la peine. Il faut arrêter de marginaliser les consommateurs et éviter la bâtonnite à tout prix.
Loi obsolète
A quoi bon criminaliser des mineurs qui fumeront quelques années et arrêteront ensuite ? A quoi bon inscrire une mention inutile à leur casier et les empêcher un jour de devenir fonctionnaires, pour ne citer que cet exemple ?
Face à une infraction, il existe trois types de sanctions : la contravention, le délit ou le crime. La loi qui régit le cannabis en France date de 1970, à l’heure où De Gaulle voulait endiguer le trafic de drogues dures comme l’héroïne. Une loi très propre très carrée sur l’usage des drogues en général, considéré comme un délit.
50 ans après la loi, en 2017, il est temps de regarder le problème en face : on nage en pleine hypocrisie. On pense aujourd’hui que, grâce à la justice, des gens arrêtent de fumer. Or, la consommation et l’addiction nécessitent un traitement thérapeutique, pas une criminalisation.
Un timbre amende pour dissuader
Nous proposons de délivrer une amende minimum, une contravention sur le même principe que la ceinture de sécurité ou le parking non payé.
Si on tombe sur un fumeur dans la rue, on lui indique qu’il recevra une contravention chez lui, une amende minime pour marquer le coup et inciter la personne à cesser de commettre l’infraction. Et c’est tout ! Pas besoin d’aller au commissariat. Ca prend trois secondes et ça permet aussi d’ouvrir le dialogue. Nous avons besoin de cette dimension pédagogique. Les mineurs s’arrangeront chez eux avec leurs parents quand ils auront reçu le courrier et, au moins, ces derniers seront au courant. Ils pourront en discuter entre eux.
En revanche, si on assiste à une revente, on n’a pas le choix, on embarque, c’est du deal.
Il est grand temps de légiférer
Chacun doit apporter sa pierre à l’édifice. Le législateur le premier. Il me semble que c’est à lui de prendre en charge le dossier aujourd’hui. Il y a une rupture complète de dialogue avec les familles, les éducateurs. Nous devons renouer le dialogue.
Je fais beaucoup de sport avec des gens plus jeunes que moi. Certains fument sans doute. Je n’aimerais vraiment pas tomber sur l’un d’eux en arrivant au poste un matin.
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