Nicolas était à proximité du lycée Suger de Saint-Denis au moment des affrontements entre jeunes et képis. Témoin d'une interpellation plutôt musclée, il s'interpose et devient la cible de la police. A StreetPress, il raconte sa GAV.
Saint-Denis (93) – C’est l’histoire d’un mec qui est tombé au mauvais endroit, au mauvais moment. Mardi 6 mars, à 12h30, alors que plusieurs centaines de lycéens affrontent les forces de l’ordre devant le lycée Suger de Saint-Denis, Nicolas sort d’un troquet rue Gabriel Péri, à deux pas. Il vient de boire une bière et s’apprête à aller chercher du pain. Devant ses yeux, deux policiers sont en train d’arrêter deux lycéens. Pour l’un deux , l’interpellation est plus musclée que la normale. « C’était vraiment violent », raconte Nicolas, quand StreetPress lui passe un coup de fil. Face à eux, Nicolas s’exclame :
« Arrêtez c’est des gamins de 15 ans ! »
Nicolas se rapproche, tente de voir la scène de plus près et pourquoi pas de mettre fin au pugilat. Échaudé, l’un des policiers le repousse d’un coup de main sec avant de lui ordonner de « dégager ». Le ton monte. Les képis se désintéressent alors des deux jeunes et se jettent sur Nicolas.
Nico, le jour d'après / Crédits : Nicolas Keraudren
« Ce fils de pute a rayé mes lunettes ! »
Rapidement Nicolas est encerclé. Quatres agents de police se massent autour de lui pour procéder à son interpellation. En deux deux, les bleus mettent le jeune homme à terre. Dans la bataille, l’un des fonctionnaires perd ses lunettes. « Ce fils de pute a rayé mes lunettes ! » a-t-il crié.
L’interpellation redouble en intensité. En violence aussi. Nicolas est immobilisé au sol. Un des deux policiers pose son genou sur sa tempe. Sa tête est alors coincée sur le bitume. C’est ce geste qui lui a causé une entaille qui recouvre 5 centimètres de son front. La blessure lui vaudra 3 jours d’interruption totale de travail (ITT) selon un certificat que StreetPress a pu consulter. Dans son procès-verbal, cet habitant de Saint-Denis concède avoir insulté les policiers suite aux coups qu’il a reçu.
Menotté, les mains dans le dos, Nicolas est assis au milieu de la chaussée quand l’un des policiers lui envoie une rafale de coups dans les côtes. Face à la violence de l’interpellation, les commerçants du coin sortent de leur échoppe et manifestent leur soutien au jeune homme. Contacté par StreetPress, 3 d’entre eux corroborent le récit de Nicolas.
Nicolas compte porter plainte à l’IGPN
Nicolas est transféré du commissariat de Saint-Ouen, blindé en raison des 55 interpellations réalisés à Saint-Denis, à celui de Bobigny. L’homme découvre les cellules vétustes et les conditions de garde à vue plutôt rudes.
Sonné par son interpellation, il a du mal à se souvenir combien de temps il passe en cellule. Moins de 24 heures, selon son avocat, au cours desquels il sera confronté avec les policiers qui l’ont interpellé. Il est ensuite déferré devant le parquet de Bobigny. L’homme comparaîtra en mai prochain pour des faits « d’outrage », « de violence », et de « rebellion ».
« Ma position ne consiste pas à amalgamer la police qui fait son travail dans des conditions difficiles et parfois de tensions extrêmes », tempère l’avocat de Nicolas, Maître Colas, quand StreetPress lui passe un coup de fil :
« Mais de faire la lumière sur une affaire de qui a des échos profondément divergents entre la position d’un agent de police et celle du prévenu confortée par de multiples badauds témoins de la scène sur l’espace public »
La mine grisée, par la fatigue, le corps lourd, Nicolas sort de sa garde à vue exténué. Quelques heures plus tard, sa décision est prise : choqué par ce qu’il vient de vivre, le jeune homme ira porter plainte à l’IGPN.
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